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Avec cette machine, un boulanger transforme son pain sec en farine
information fournie par Le Figaro 08/12/2018 à 06:00

FIGARO DEMAIN - Le Crumbler, inventé par un Bordelais chantre de l'anti-gaspi, est utilisé par une vingtaine de boulangeries françaises pour ne plus gaspiller leur pain.

C'est une boulangerie de quartier comme une autre, en apparence. Au pied de la butte Montmartre, dans le 18ème arrondissement de Paris, le boulanger sort ses pains du four. Six beaux pains de plus d'un kilo chacun, bien dorés. Mais ces pains-là ne sont pas tout à fait comme les autres. Sébastien Hayertz les a faits avec une farine d'un nouveau genre, confectionnée à partir de pains invendus concassés.

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C'est grâce à la machine baptisée le Crumbler que la boulangerie Raphaëlle parvient à faire de ses pains de la veille une sorte de chapelure, qui lui sert de farine pour refaire du pain «recyclé». Baptisé le Phénix - celui qui renaît de ses cendres - ce pain qu'il commercialise est composé pour moitié de cette farinée recyclée et pour moitié d'une farine traditionnelle. «Je fais sécher le pain sec au four, ce qui développe le goût. Après avoir broyé le pain sec dans le Crumbler, je mélange 2 kilos de la chapelure obtenue avec deux kilos de farine traditionnelle. J'hydrate et je fais cuire 50 minutes (contre 20 minutes pour une baguette), ce qui fait que la levure est cuite, donc le pain plus digeste.», explique le boulanger qui utilise cette innovation depuis deux semaines.

Certes, la boulangerie Raphaëlle continuera de donner des invendus aux associations, notamment le Carillon qui s'appuie sur les commerçants pour aider les sans-abri. Mais il lui en restera toujours. Soit une perte de 10% en moyenne de chiffre d'affaires. «Ce n'est pas seulement l'interêt financier qui nous a motivés. Cela nous intéresse de nous investir dans une démarche zéro déchet. Nous essayons d'éduquer nos enfants dans une approche développement durable et nous faisons déjà des ateliers de sensibilisation pour les enfants de l'école d'en face», témoigne le patron de la boulangerie qui se situe à une centaine de mètres de

Un investissement vite amorti

La machine, qui coûte deux mille euros à l'achat, devrait être vite amortie. Car ce pain d'un kilo, qui se vend 7 euros, ne manque pas d'atouts: plus digeste, il se conserve aussi plus longtemps. «Dès que nous en avons parlé sur Facebook, nous avons eu de nombreux clients venus nous le réclamer», témoigne le boulanger. «Le concept va beaucoup plaire à ma fille», confirme Madeleine, une cliente venue chercher son pain du jour.

Aujourd'hui, une vingtaine de boulangeries sont équipées du Crumbler en France. C'est le Bordelais Franck Wallet, l'inventeur de la machine, qui est à l'initiative de ce projet, baptisé les Recettes évadées.

Après un voyage Paris-Pékin aller-retour à vélo pendant deux ans en sensibilisant les enfants au développement durable dans les écoles, Franck Wallet a travaillé comme urbaniste pendant quatre ans. «Mais il me manquait quelque chose en termes d'engagement», raconte-t-il. C'est en collectant du pain pour les Restos du cœur qu'il a réalisé qu'il en restait toujours. Son truc à lui, c'était le pain perdu. Il en faisait avec les invendus qu'il récupérait dans les boulangeries de Bordeaux et le distribuait autour de lui. «Le problème c'est qu'à mon échelle c'est trop limité et il est difficile d'inciter les boulangers à faire du pain perdu car cela ne se conserve pas longtemps et c'est surtout bon chaud».

C'est en faisant des expériences chez lui que Franck Wallet fait cette découverte: «en broyant du pain sec, je récupère une poudre dotée d'un bien plus grand potentiel que le pain perdu». Cette farine se conserve facilement et permet de réaliser une multitude de recettes. Son idée, née en 2016, fait son chemin dans le cadre d'une start-up baptisée Expliceat, incubée au sein de la couveuse d'entreprises Anabase à Bordeaux, créée sur fonds propres (ses économies) avec l'aide de l'Ademe, de la région Nouvelle Aquitaine et de Bordeaux Métropole. De façon très pragmatique, l'inventeur a fait fabriquer sa machine par un industriel avant de la proposer à la vente aux professionnels du pain à partir de mi-2017.

Un des projets du budget participatif de la ville de Paris

«Il y a 30 000 boulangers en France: le potentiel est réel». En passant par les chambres de métiers, ce chantre de l'anti-gaspi parvient ainsi à toucher les professionnels les plus sensibilisés au gaspillage. Aux boulangers indépendants le petit modèle, aux grandes surfaces, chefs de restauration collective et boulangeries industrielles le grand modèle, capable de broyer des baguettes entières. Son projet Recettes Evadées a même été sélectionné dans le cadre du budget participatif de la ville de Paris, ce qui lui a permis de récolter une aide de 5 000 euros. De quoi lui fabriquer et acheminer trois machines pour les fournir gratuitement à l'essai pendant six mois à trois boulangeries parisiennes.

Les Recettes évadées gagnent les buffets écoresponsables

Au-delà du pain, la plupart des boulangeries font avec cette farine de seconde main de nombreuses recettes de biscuits et autres produits à base de farine, auxquelles la start-up Expliceat les forme. «L'idée est d'en faire des produits à valeur ajoutée, un peu comme le croissant aux amandes», souligne Franck Wallet.

Ce dernier, qui a fait de la lutte contre le gaspillage son cheval de bataille, ne se contente pas de faire vivre son invention. Avec son équipe de trois personnes, il fournit des buffets écoresponsables à Paris et Bordeaux - notamment avec des produits fabriqués à partir de cette farine issus des boulangeries partenaires - et du conseil en gaspillage alimentaire. Si son chiffre d'affaires atteint 100 000 euros environ pour cette première véritable année d'exploitation, l'inventeur ne se verse pas encore de salaire. Mais comme sa croissance est, de son propre aveu, «exponentielle», ce sera peut-être le cas l'an prochain.

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