
Vingt ans de prison requis contre le "parrain" d'un réseau prostituant des mineures ( AFP / LOIC VENANCE )
Treize condamnations à de la prison ferme ont été requises mercredi devant le tribunal correctionnel de Toulouse contre de jeunes proxénètes qui exploitaient des adolescentes de 14 à 16 ans, dont une peine de vingt ans contre le cerveau de cette "industrie de la souffrance".
Dans un dossier où comparaissent jusqu'à vendredi quatorze prévenus, et avant que huit mineurs ne soient jugés ultérieurement par le tribunal pour enfants, le procureur Tristan Lamouille n'a requis qu'une seule relaxe, à l'encontre d'un prévenu accusé d'avoir été un "prête-nom" sans qu'il soit démontré sa réelle implication.
A l'opposé, il a requis vingt ans d'emprisonnement, maximum de la peine encourue devant un tribunal correctionnel en état de récidive, contre Olivier Habchi Hamadouche, 29 ans. Déjà condamné dans une autre affaire à 25 ans de réclusion pour des faits d'enlèvement et séquestration suivis de mort, il opérait depuis sa cellule de prison à Béziers.
Cette peine doit être assortie d'une période de sûreté de dix ans et d'une amende de 150.000 euros, a-t-il également requis, compte tenu du caractère "extrêmement lucratif" du réseau de proxénétisme dans lequel il exerçait un "rôle central" et un "mode de contrôle rigide" qui justifient, selon le magistrat, qu'on puisse le qualifier de "parrain".
L'enquête de gendarmerie qui l'a mené devant le tribunal a permis de montrer qu'un premier réseau, créé depuis sa cellule par M. Habchi Hamadouche, a exploité plusieurs mineures, parfois âgées de 14 ans, avant qu'un deuxième réseau mené par d'anciens complices prenne son indépendance en utilisant le même mode opératoire, au cours des années 2023 et 2024.
- "Entreprise" -
Des peines allant d'un à sept ans de prison ferme ont été requises pour douze des hommes jugés, pour la plupart âgés d'une vingtaine d'années, en fonction de leur degré d'implication et de leur rôle dans l'un ou l'autre réseau.
Même si certains d'entre eux ont dit à l'audience avoir pris conscience des souffrances infligées aux victimes, d'autres se sont présentés en protecteurs ou ont minimisé leur rôle, tandis que le principal prévenu, surnommé "Mowgli", a parlé d'une "entreprise" faisant appel à des "personnes consentantes".
Le représentant du ministère public a dénoncé dans son réquisitoire une "industrie de la souffrance", exploitant de très jeunes filles, le plus souvent suivies par l'Aide sociale à l'enfance, "justement parce qu'elles sont vulnérables".
Il a rappelé qu'il s'agissait d'adolescentes âgées de 14 à 16 ans, parfois "polytraumatisées" et "en difficulté psychologique" du fait de leur parcours personnel, des victimes que l'on retrouve désormais dans de nombreux dossiers du même type, a expliqué M. Lamouille, égrainant pour en témoigner plus de 80 prénoms cités dans des procédures similaires, rien qu'en région toulousaine, ainsi que leur âge, de 12 à 17 ans.
- Forcées à continuer -
"Il est difficile de se représenter les dégâts que peut produire la succession de trente rapports sexuels en 24h pour des adolescentes, difficile également de se représenter le désespoir de celles qui veulent arrêter" et que l'on force à continuer, a déclaré M. Lamouille, évoquant la peur qui irrigue ce dossier avec "onze victimes potentielles, mais seulement cinq parties civiles".
Du côté de ces dernières, Me Jonathan Bomstain, mandaté par une administratrice ad hoc désignée pour s'occuper des intérêts d'une des jeunes filles victimes, a décrit l'état de "dissociation de la personnalité" de cette dernière.
Entrée dans un des deux réseaux à 14 ans, elle a retrouvé sa famille, "maigre, sale, désorientée, des piercings sur les tétons", avec d'un côté "aucune pudeur" et de l'autre des "comportements d'enfant" comme "reprendre la tétine" ou "mettre ses pyjamas" de petite fille.
"Votre décision est attendue", a lancé en guise de conclusion le procureur, évoquant les services sociaux souvent dépassés qui guettent la réponse de la justice face à un phénomène en pleine croissance mais aussi les réseaux criminels qui veulent savoir s'il "est plus rentable de trafiquer de la drogue ou des mineures".
Jugement attendu vendredi.
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