(Actualisé tout du long avec éléments supplémentaires; TV à disposition)
par Kanishka Singh, Andrew Goudsward et Sarah N. Lynch
Le département américain de la Justice a inculpé jeudi l'ancien directeur du FBI, James Comey, des chefs d'accusation de fausses déclarations et entrave à une enquête du Congrès, une décision qui marque une escalade dans les efforts déployés par le président américain Donald Trump pour se venger de ceux ayant enquêté contre lui ou l'ayant critiqué.
En cas de condamnation, James Comey encourt une peine pouvant aller jusqu'à cinq ans d'emprisonnement.
"J'ai le coeur brisé pour le département de la Justice, mais j'ai grande confiance dans le système judiciaire fédéral", a dit James Comey dans une vidéo publiée sur le réseau Instagram, ajoutant être innocent et vouloir le démontrer lors d'un procès.
Cette inculpation s'inscrit en contradiction de la tradition voulant que, depuis des décennies, les responsables des forces de l'ordre américaines sont protégés des pressions politiques.
La procédure engagée contre James Comey, directeur du FBI de 2013 à 2017, met en exergue la manière dont l'administration Trump use de ses pouvoirs pour réprimander des détracteurs de premier plan du président républicain.
Donald Trump avait promis lors de la campagne électorale l'an dernier qu'il engagerait, en cas de retour à la Maison blanche, des poursuites judiciaires contre un éventail de personnes qu'il a dit considérer comme hostiles.
Le président américain avait limogé James Comey de la direction du FBI en 2017, au début de son premier mandat, après que Comey a confirmé la tenue d'une enquête de l'agence fédérale sur une collusion présumée entre l'équipe de campagne Trump et la Russie lors de l'élection présidentielle de 2016.
"JUSTICE EN AMÉRIQUE !"
Revenu au pouvoir en janvier dernier, Donald Trump a demandé au département de la Justice d'examiner le témoignage effectué par James Comey devant une commission sénatoriale en 2020 pour répondre, comme réclamé par des élus républicains, de sa gestion de l'"enquête russe". Comey a nié avoir autorisé que des informations sensibles soient fournies aux médias.
Donald Trump a reproché plus tôt cette année à l'Attorney General (ministre de la Justice), Pam Bondi, qu'il a nommée à ce poste, de ne pas faire avancer suffisamment vite les procédures contre James Comey et d'autres opposants de premier plan.
"JUSTICE EN AMÉRIQUE !", s'est réjoui jeudi soir le président américain sur les réseaux sociaux, après l'annonce de l'inculpation de James Comey. "Il a été très mauvais pour notre pays, pendant longtemps", a-t-il ajouté.
Pam Bondi a déclaré via le réseau social X que "personne n'est au-dessus de la loi". Cette procédure "reflète l'engagement du département de la Justice à tenir pour responsables ceux qui abusent des positions de pouvoir pour induire le peuple américain en erreur", a-t-elle ajouté, sans mentionner explicitement James Comey.
La volonté de l'administration fédérale d'inculper James Comey avait été accueillie avec scepticisme par le parquet du district-Est de l'Etat de Virginie, chargé de l'affaire.
Le procureur en chef du parquet, Erik Siebert, a démissionné la semaine dernière après s'être attiré les foudres de Donald Trump pour avoir émis des doutes sur cette affaire. La procureure en chef adjointe Mary Cleary a aussi exprimé des inquiétudes, ont rapporté des personnes au fait de la question.
Certains représentants du parquet ont déclaré à Lindsey Halligan, fidèle trumpiste nommée en remplacement d'Erik Siebert, que les preuves étaient insuffisantes pour inculper James Comey, a dit l'une des sources.
"VINDICATIF ET SANS FONDEMENT"
Donald Trump et James Comey ont eu une relation acerbe dès le début du premier mandat du président américain. Limogé par Trump pour avoir publiquement confirmé que le FBI enquêtait sur une possible collusion avec Moscou lors de la campagne électorale de 2016, Comey a par la suite décrit le dirigeant comme "moralement inapte" pour gouverner.
L'"enquête russe", dont un procureur spécialement nommé, Robert Mueller, a repris le flambeau à la suite du limogeage de James Comey, a établi nombre d'échanges entre la campagne Trump et des représentants russes, sans toutefois conclure qu'il y avait matière à prouver une conspiration criminelle.
Donald Trump a régulièrement dénoncé une "chasse aux sorcières" et reproché à l'administration de Joe Biden de se servir du département de la Justice comme d'une arme politique.
A son retour à la Maison blanche en janvier dernier, Donald Trump a entrepris une "purge" du département de la Justice, avec l'objectif d'installer des loyalistes, et a lancé des démarches pour jeter une ombre sur les conclusions des agences fédérales américaines à propos d'une ingérence russe lors de l'élection présidentielle de 2016.
"Donald Trump a ordonné des poursuites criminelles contre des cibles politiques, et le département de la Justice obéit corruptement", a commenté Norm Eisen, ancien représentant chargé de l'éthique dans l'administration du président démocrate Barack Obama et désormais membre du think tank Brookings Institution.
"Cette inculpation a les caractéristiques d'une accusation vindicative et sans fondement", a-t-il ajouté.
(Andrew Goudsward, Sarah N. Lynch et Kanishka Singh; version française Jean Terzian)
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