
Catherine Vautrin à Paris, le 16 juillet 2025. ( AFP / LUDOVIC MARIN )
Le nombre de ruptures conventionnelles a bondi de 17% depuis 2019, passant d'environ 440.000 à 514.000 en 2024.
Le "divorce à l'amiable" entre un salarié et son employeur est dans le collimateur du gouvernement. Les partenaires sociaux doivent en effet être invités à plancher sur les "conditions d'indemnisation des ruptures conventionnelles", dans le cadre de la réforme de l'assurance chômage voulue par le gouvernement. Le point sur ce sujet.
De quoi s'agit-il ?
La rupture conventionnelle a été créée en 2008. Avant cela, le salarié devait soit démissionner - et perdre ses droits au chômage -, soit être licencié, ce qui nécessite un motif et peut être stigmatisant. La rupture conventionnelle permet de mettre fin à un CDI d'un commun accord et ouvre donc droit aux indemnités chômage (sous réserve d'avoir été salarié au moins six mois). L'employeur verse par ailleurs une indemnité qui ne peut pas être inférieure à l'indemnité légale de licenciement.
Le salarié et l'employeur ont un délai de rétractation de 15 jours. L'inspection du travail a ensuite 15 jours pour l'homologuer ou pas (à défaut de notification dans ce délai, la rupture est homologuée). Le nombre de ruptures conventionnelles a bondi de 17% depuis 2019, passant d'environ 440.000 à 514.000 en 2024 (à comparer à quelque 2 millions de démissions en 2024, selon la Dares). Au premier trimestre 2025, les ruptures conventionnelles étaient le quatrième motif d'inscription à France Travail (après la fin de contrat en tête).
Pourquoi le gouvernement s'y intéresse ?
Dans un récent entretien à L'Union, la ministre du Travail et de la Santé Catherine Vautrin a estimé que "cela a fluidifié les relations au travail", mais pointé "aussi un effet d'aubaine extrêmement important". "Le salarié perçoit des indemnités pour quitter l'entreprise et bénéficie aussitôt de l'assurance chômage. Ne faut-il pas instaurer un délai correspondant à cette indemnisation avant de percevoir le chômage ?", demandait-elle.
La ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet a aussi mis en avant "des abus". "C'est aujourd'hui 25% de l'indemnisation au chômage", a-t-elle affirmé récemment sur BFMTV/RMC, pointant des indemnités "supérieures" et une durée d'indemnisation plus longue (15 mois, contre 14 pour un licenciement économique ou 13 pour un départ volontaire, selon l'Unédic). La piste d'une prolongation du délai de carence, c'est-à-dire le moment où démarre l'indemnisation, fait partie des choses qui "pourraient être envisagées", a-t-elle indiqué.
Qu'en disent les syndicats ?
Pour Marylise Léon (CFDT), le gouvernement "écoute beaucoup les employeurs qui passent leur temps à se plaindre qu'il n'y a pas assez de possibilités de flexibilité ou de souplesse". "Je trouve ça très paradoxal qu'aujourd'hui il y ait des employeurs qui viennent se plaindre que les ruptures conventionnelles" devraient être des démissions et que dans le même temps ils "acceptent de signer ces ruptures conventionnelles", a-t-elle dit après avoir rencontré Astrid Panosyan-Bouvet la semaine dernière. "Quand l'employeur n'est pas d'accord, je ne vois pas pourquoi il signe ce type de départ. Donc c'est d'abord de la responsabilité des employeurs", dit-elle, pointant un "abandon en responsabilité du patronat" sur ce sujet - comme celui des retraites -, ce qui "n'est pas une bonne chose".
"La suppression de deux jours fériés (proposée par le gouvernement dans le cadre du prochain budget, NDLR), c'est juste un chiffon rouge. Tout ce qu'il y a derrière c'est pire, notamment le fait de revenir sur les ruptures conventionnelles", s'agace de son côté Frédéric Souillot (FO). "Le gouvernement dit que toutes les ruptures conventionnelles signées par les salariés ou demandées par les salariés, ça aurait pu être une démission" et menace d'un retrait de "droit à l'assurance chômage", croit comprendre le leader syndical. "Par contre, quand c'est l'employeur qui propose la rupture conventionnelle et qu'elle est signée par les deux parties, là elle serait valide", grince-t-il.
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