
L'ex président brésilien Jair Bolsonaro le 5 août 2021, à Brasilia, au Brésil ( AFP / Sergio Lima )
Le juge chargé du procès historique de l'ancien président Jair Bolsonaro pour tentative de coup d'Etat au Brésil a rejeté mardi les "pressions externes", face à l'offensive lancée par l'administration Trump à l'approche du verdict.
Dans l'enceinte solennelle de la Cour suprême à Brasilia s'est tenue la première de cinq journées d'audience cruciales.
Jair Bolsonaro, 70 ans, qui présida le plus grand pays d'Amérique latine de 2019 à 2022, joue son avenir.
Le leader d'extrême droite risque jusqu'à 43 ans de prison pour avoir, selon l'accusation, cherché son "maintien autoritaire au pouvoir" après sa défaite face au président actuel de gauche Luiz Inacio Lula da Silva au scrutin de 2022.
Visé par de lourdes sanctions financières américaines, le rapporteur du procès, Alexandre de Moraes, a d'emblée défendu le travail de la justice.
La Cour suprême "sera absolument inflexible dans la défense de la souveraineté nationale" et elle va ignorer "les pressions internes ou externes", a lancé ce magistrat aussi puissant que clivant.
Dénonçant une "chasse aux sorcières" contre son allié, le président américain Donald Trump a imposé depuis le 6 août une surtaxe punitive de 50% sur une part des exportations brésiliennes.
- "Dictature" -
Assigné à résidence depuis début août et inéligible jusqu'en 2030, M. Bolsonaro clame son innocence et se dit victime d'une "persécution politique", à un peu plus d'un an de la présidentielle de 2026.
Avec ses sept co-accusés, dont plusieurs anciens ministres et militaires hauts gradés, l'ex-président connaîtra le verdict d'ici au 12 septembre.
Absent mardi, il n'assistera pas à la phase finale du procès car "il est affaibli", a dit devant des journalistes son avocat Paulo Costa Cunha, évoquant une "conséquence du coup de couteau" qu'il a reçu en 2018.
Cette attaque en pleine campagne électorale lui vaut des problèmes de santé récurrents.

Le juge Alexandre de Moraes à la Cour suprême de Brasilia, le 2 septembre 2025 ( AFP / Evaristo Sa )
C'est la première fois qu'un ancien chef de l'Etat brésilien est jugé pour un projet présumé de coup d'Etat.
Un moment historique, 40 ans après la fin de la dictature militaire (1964-1985), dont les responsables n'ont jamais été traduits en justice.
"Nous déplorons que l'histoire républicaine brésilienne ait été à nouveau marquée par une tentative de coup d'Etat, portant atteinte aux institutions et à la démocratie, cherchant à installer un Etat d'exception et une véritable dictature", a dit le juge Moraes.
Barrières, agents armés, chiens renifleurs: à Brasilia, la sécurité a été renforcée sur l'emblématique place des Trois-Pouvoirs, où se côtoient palais présidentiel, Parlement et Cour suprême.
C'est sur cette place que, le 8 janvier 2023, des milliers de sympathisants bolsonaristes avaient saccagé les lieux de pouvoir, réclamant une intervention militaire pour déloger Lula.
M. Bolsonaro, qui se trouvait alors aux Etats-Unis, est accusé par le parquet d'avoir été l'instigateur des émeutes.
Le projet putschiste incluait aussi, selon l'accusation, un décret d'état de siège et un plan pour assassiner Lula avant son installation, ainsi que le juge Moraes.
- Amnistie -

Des partisans de Jair Bolsonaro prient lors d'une veillée à proximité du domicile de l'ex-président, à Brasilia, le 1er septembre 2025 ( AFP / Evaristo Sa )
Le fait que M. Bolsonaro ait discuté avec les chefs de l'armée d'un "document formalisant un coup d'Etat" prouve le "processus criminel", a estimé le procureur général Paulo Gonet.
Selon l'accusation, c'est précisément faute de soutien dans la hiérarchie militaire que le supposé plan a échoué.
La défense de l'ex-président doit délivrer sa plaidoirie mercredi matin. Les cinq juges devraient voter pour décider du verdict la semaine prochaine.
Si ses alliés estiment que Jair Bolsonaro est pratiquement condamné d'avance, ils misent sur l'approbation au Parlement d'une amnistie pour lui éviter la prison.
Des parlementaires se sont réunis mardi pour tenter de mettre à l'agenda de façon "immédiate" un projet de loi en ce sens, a dit Luciano Zucco, un député bolsonariste.
Devant l'entrée de la résidence de luxe à Brasilia où l'ancien chef d'Etat est confiné, une altercation a brièvement opposé quelques-uns de ses sympathisants à des partisans de Lula, quand les premiers ont voulu casser une pancarte sur laquelle était écrit "Bolsonaro en prison", ont constaté des journalistes de l'AFP.

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'exprime lors d'une conférence de presse à Contagem, dans l'Etat du Minas Gerais, au Brésil, le 29 août 2025 ( AFP / Douglas MAGNO )
Avec une popularité renforcée par les attaques américaines, Lula, 79 ans, affiche son intention de briguer un nouveau mandat, se posant en champion de la "souveraineté" brésilienne.
Il a lui-même été incarcéré en 2018-2019 pour corruption passive et blanchiment. Sa condamnation a ensuite été annulée pour vice de forme.
A l'époque "je n'ai pas pleuré, je suis allé au combat", a-t-il dit mardi, souhaitant que "justice soit faite".
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