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«On ne fait pas le même métier» : les futures règles du «fait maison» divisent les restaurateurs

information fournie par Le Figaro 23/10/2023 à 19:44

(Crédits photo : Unsplash - Jay Wennington )

(Crédits photo : Unsplash - Jay Wennington )

Le gouvernement a annoncé que les cartes des restaurants en France devront mentionner les plats qui ne sont pas préparés sur place d'ici à 2025.

Le patron du bistrot « M. Jacques », torchon sur l'épaule, se démultiplie derrière le zinc pour préparer deux cafés crème et un chocolat chaud. « Qu'est-ce que c'est encore, ça ? », lâche-t-il, un brin désabusé. Il n'a pas encore entendu parler, ce lundi matin, de la mesure annoncée la veille par le gouvernement. La ministre déléguée en charge de la consommation, du commerce et de l'artisanat, Olivia Grégoire , souhaite obliger d'ici à 2025 les restaurateurs à mentionner sur leurs cartes les plats qui ne sont pas «faits maison» . Une manière de «valoriser la fonction de maître restaurateur, protéger le consommateur et préserver la gastronomie française» .

S'il est par nature sceptique aux « normes » imposées par l'État, le restaurateur de « M. Jacques » salue cette initiative. « J'ai des clients qui s'étonnent du prix de mon confit de canard, vendu 19 euros à la carte, alors qu'un restaurant un peu plus loin le propose à 12 ou 13 euros , raconte-t-il. La différence, je le sais, c'est que moi je prends le temps de confire mon canard moi-même. C'est plus cher, mais c'est meilleur.» Sans jeter l'opprobre sur son voisin, ce restaurateur estime qu'un affichage sur la carte expliquant que le produit a été acheté en conserve ou surgelé permet de justifier la politique des prix bas pratiquée par l'établissement. « C'est une question de transparence », clame-t-il.

Restauration : comment seront fixées les règles du «fait maison» ?

«Plus de transparence»

Le dirigeant du restaurant « Les Naturistes », dans le XVIIIe arrondissement de Paris, se réjouit lui aussi de cette avancée. Considérant que « le fait maison devrait être la norme », François trouve normal que l'affichage concerne les restaurants qui ne préparent pas leurs plats sur place plutôt que ceux qui prennent le temps de sélectionner des produits frais et de les cuisiner. Le label «fait maison» actuel permet en effet aux restaurateurs qui le souhaitent de mentionner explicitement sur leurs cartes les plats préparés sur place. Mais le dispositif, qui date de 2014, n'est pas très répandu. «L'État a tendance à demander à ceux qui font mieux de se justifier, alors que ce devrait être l'inverse, ce n'est pas normal» , tance le propriétaire des « Naturistes ».

Plus globalement, François ne souhaite pas porter préjudice aux restaurateurs qui décident de se tourner vers le surgelé ou les conserves. Il comprend parfaitement du reste que des clients soient séduits par les prix bas. « Nous ne faisons pas le même métier, c'est tout, et il est bon que le client sache s'il mange chez quelqu'un qui mitonne sa cuisine ou dans un dépôt d'achat-revente de nourriture », explique-t-il.

Des propos qui rejoignent ceux tenus lundi matin par le principal représentant du secteur, Thierry Marx , président de l'Umih. « On ne sait pas toujours ce qu'on achète et bien souvent il y a beaucoup de produits ultratransformés : ça, le client doit absolument le savoir », a-t-il réagi sur France 2. Le chef étoilé a été rejoint par un porte-parole de l'autre syndicat du secteur de la restauration, le GHR, qui a confié à l'AFP que « ça fait des années qu'on se bat pour plus de transparence et de valorisation du travail des restaurateurs », qualifiant le label actuel de « poussiéreux ».

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Le privilège du choix

Tous les professionnels s'interrogent toutefois sur les contours précis de cette future obligation. « “Non fait maison”, ça veut dire quoi ? Parce que la salade que vous voyez à la carte, je ne l'ai pas cueillie ce matin dans le potager derrière le restaurant », ironise le patron du bistrot parisien « M. Jacques ». François croit savoir pour sa part que la transformation du label « fait maison » est dans les tuyaux depuis longtemps et se demande « pourquoi c'est si difficile à mettre en place », pointant l'échéance de 2025 fixée par le gouvernement qu'il juge tardive.

Le directeur d'un restaurant franchisé qui concède avoir « une bonne partie de la carte qui est surgelée » ne cache pas sa circonspection. « Je demande à voir ce qu'ils considèrent comme “non fait maison” ou pas. Nous proposons ici une formule petit-déjeuner avec la moitié des produits surgelés et l'autre moitié de produits frais. Je vais noter quoi ? À demi fait maison ? », déclare-t-il. Ce restaurateur met en avant les autres labels dont ses produits sont bel et bien couronnés : « pêche responsable », « origine France », appellations d'origine protégée... Il estime que ces clients y sont sensibles.

Une telle mesure pourrait-elle l'encourager à ne proposer que des plats « fait maison » à la carte ? « Sûrement pas, cela coûterait trop cher aux clients qui risqueraient de ne plus venir », lâche-t-il. Autre argument qui plaide à ses yeux en faveur du surgelé : la taille de la carte. Alors que le « fait maison » contraint les restaurateurs à limiter les plats qu'ils proposent pour des questions de gestion des stocks, le surgelé permet de multiplier les choix. « Nos clients, notamment les familles, apprécient beaucoup cela », indique le directeur du restaurant franchisé, qui propose une trentaine de plats différents.

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