(actualisé avec fin de la réunion de Genève)
par Francois Murphy, John Irish et Parisa Hafezi
Les ministres européens des Affaires étrangères ont tenu vendredi à Genève des discussions avec leur homologue iranien avec l'espoir très ténu de voir l'Iran manifester la volonté de reprendre des négociations sur son programme nucléaire malgré la poursuite des frappes israéliennes sur son territoire, ont déclaré des diplomates.
Les ministres européens comptaient faire savoir à Abbas Araqchi que les Etats-Unis étaient prêts à des négociations directes avec Téhéran même si Washington étudie la possibilité de participer à la campagne israélienne, ont-ils ajouté.
S'exprimant après la rencontre, la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a annoncé que les ministres européens et iraniens étaient convenus de poursuivre leurs discussions et de ne pas les limiter au seul programme nucléaire de la République islamique.
"Mes collègues l'ont dit avec nos partenaires américains, Israéliens et avec les pays de la région. Le ministre des Affaires étrangères iranien a marqué sa disposition à poursuivre ses discussions sur le programme nucléaire et plus largement sur tous les sujets", a ajouté le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot.
La rencontre en Suisse s'est produite alors que la pression sur l'Iran s'intensifie pour qu'il accepte des limitations strictes à son programme nucléaire afin d'empêcher le développement potentiel d'une arme atomique.
Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio s'est entretenu avec plusieurs homologues occidentaux avant la réunion de Genève, ont déclaré les diplomates, faisant état de sa volonté d'engager des discussions directes avec Téhéran, ce que Washington n'a pas confirmé.
"Il n'y a pas de place pour des négociations avec les Etats-Unis tant que l'agression israélienne se poursuit", a réaffirmé Abbas Araqchi avant la réunion de Genève. "S'ils ont quelque chose à dire, nous écouterons", a-t-il toutefois ajouté à propos des Européens.
Les ministres du Royaume-Uni, de la France et de l'Allemagne - pays qui forment le "groupe E3" ayant participé aux négociateurs de l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien -, ainsi que la cheffe de la politique étrangère de l'Union européenne Kaja Kallas, s'étaient déjà entretenus avec Abbas Araqchi en début de semaine et se sont coordonnés avec Marco Rubio.
Le président français Emmanuel Macron a déclaré avant le début de la réunion de vendredi que celle-ci porterait sur "une offre de négociation complète, diplomatique et technique".
"DISCUTER AVANT LE PIRE DES SCÉNARIOS"
"Il faut absolument prioriser le retour à la négociation de fond", a-t-il dit lors de son arrivée au Salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget (Seine-Saint-Denis). "Rien ne justifie les frappes sur les infrastructures énergétiques et les populations civiles."
Emmanuel Macron a précisé que la proposition européenne incluait une reprise des travaux de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour "aller vers le zéro enrichissement" de l'uranium, un encadrement des activités balistiques de l'Iran et du financement par Téhéran de groupes armés, ainsi qu'une libération des "otages" dans le pays.
Un haut responsable iranien a déclaré à Reuters que Téhéran était prêt à discuter d'une limitation de ses activités d'enrichissement d'uranium mais qu'il rejetterait probablement la demande d'y mettre un terme, en particulier au moment où le pays subit des attaques d'Israël.
Les pourparlers de Genève interviennent après l'échec des négociations entre l'Iran et les Etats-Unis, interrompues par l'opération lancée la semaine dernière par Israël contre les installations nucléaires et les capacités balistiques de l'Iran.
"Les Iraniens ne peuvent pas s'asseoir avec les Américains, mais nous le pouvons", a déclaré un diplomate européen.
"Nous leur dirons de revenir à la table des négociations pour discuter de la question du nucléaire avant le pire des scénarios, tout en exprimant nos inquiétudes quant à leurs missiles balistiques, leur soutien à la Russie et la détention de nos ressortissants."
"UNE FENÊTRE S'OUVRE DÉSORMAIS"
Les pays européens, qui n'ont pas participé aux négociations nucléaires entre l'Iran et les Etats-Unis, sont de plus en plus frustrés par la stratégie de négociation américaine.
Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot s'est entretenu jeudi soir avec Marco Rubio et celui-ci a déclaré que Washington était prêt à un contact direct avec les Iraniens à tout moment, selon une source diplomatique française.
Selon des sources, l'envoyé spécial du président américain Donald Trump au Moyen-Orient, Steve Witkoff, s'est entretenu avec Abbas Araqchi à plusieurs reprises depuis la semaine dernière.
Deux diplomates avaient prévenu que les espoirs de percée à Genève étaient faibles. Ils ont toutefois estimé qu'il était essentiel de discuter avec l'Iran car, une fois la guerre terminée, la question du programme nucléaire iranien ne serait toujours pas résolue.
(Rédigé par John Irish; version française Camille Raynaud, Benjamin Mallet et Nicolas Delame édité par Jean-Stéphane Brosse)
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