Depuis 2011, le nombre de naissance ne cesse de reculer en France, confrontant le pays à une situation inédite depuis des décennies. Quelles en sont les conséquences ?

( AFP / ALAIN JOCARD )
• Quelle est la situation ?
En 2024, 663.000 bébés ont vu le jour, soit 2,2% de moins que l'année précédente , a indiqué l'Insee mardi. Les naissances sont au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ce repli s'inscrit dans une tendance de plus long terme: depuis 2011, le nombre de naissance recule chaque année en France, à l'exception de 2021, qui a connu un léger rebond après les confinements liés au Covid-19.
L'an dernier, il a connu fort un décrochage, ce qui avait provoqué de nombreuses réactions politiques et conduit le président Emmanuel Macron à plaider pour un "réarmement démographique" du pays .
• Pourquoi se préoccupe-t-on de la natalité ?
La France a la particularité de se préoccuper de sa natalité depuis plusieurs siècles. "Sa fécondité était la plus faible d'Europe au XIXe , elle a vu d'autres pays s'accroître beaucoup plus vite et a craint de manquer de population", notamment en cas de guerre, explique à l' AFP Hervé Le Bras, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). L'idée qui prédominait alors était qu' une population importante permettrait d'aligner plus de soldats afin d'avoir l'avantage en cas de conflit .
Dès cette époque, des mouvements natalistes se développent. Par la suite, "le souci pour la natalité a été partagé par la plupart des dirigeants" français, ce qui a donné une politique familiale plus importante qu'ailleurs, selon le spécialiste. À l'heure où l'on compte en moyenne 1,62 enfant par femme (et même 1,59 en métropole, soit le plus bas depuis plus d'un siècle), certains craignent de voir la population française diminuer. Car pour assurer le renouvellement des générations, il faut atteindre un taux de fécondité de 2,1 enfants par femme.
• Synonyme de perte d'influence ?
Les États refusent généralement de voir leur population diminuer car cela "renvoie à un sentiment de déclin", décrit à l' AFP Catherine Scornet, maîtresse de conférence à l'Université d'Aix-Marseille. Pourtant, d'un point de vue diplomatique, le poids démographique "ne suffit pas" pour qu'un pays rayonne et s'impose sur la scène internationale, souligne la spécialiste. Ainsi, l'Inde, pays désormais le plus peuplé au monde avec ses 1,4 milliard d'habitants, "n'a pas un poids politique majeur", cite-t-elle en exemple.

Graphique montrant une baisse de 2,2% de la natalité française par rapport à 2023, selon les statistiques de l'Insee ( AFP / Pierre MOUTOT )
• Une économie ralentie ?
Une baisse de la natalité inquiète également car elle "a pour conséquence un vieillissement de la population, ce qui est associé à une perte de dynamisme" de l'économie, relève Catherine Scornet.
Dans un premier temps, le recul des naissances peut avoir un impact positif sur les finances publiques puisque cela signifie moins de dépenses en matière de soins, d'éducation et d'allocations. La situation peut se complexifier lorsque les générations moins nombreuses atteignent l'âge adulte. Pour la France, il pourrait alors être plus difficile de financer son système de retraite , basé sur les cotisations des seuls actifs. Des solutions existent toutefois pour accroître la population active, comme encourager l'arrivée de travailleurs immigrés.
• Une bonne nouvelle pour la planète ?
Moins d'enfants signifie-t-il moins de pollution ? À l'heure où la planète compte plus de 8 milliards d'habitants, la croissance démographique est parfois considérée par certains militants comme problématique en raison de la pression exercée sur les ressources naturelles et de la production de CO2. Des défenseurs du climat, en France et ailleurs, revendiquent le fait de ne pas avoir d'enfant pour lutter contre le réchauffement.
Mais l'impact d'une population sur l'environnement, "c'est essentiellement une question de consommation", rappelle Hervé Le Bras, de l'EHESS. Si les Français ont moins d'enfants, cela peut paradoxalement avoir un impact négatif en matière de pollution : "Cela laisse aux familles plus de revenu disponible pour d'autres dépenses , souvent émettrices de CO2", tels que l'achat d'un véhicule ou les voyages en avion, pointe-t-il.
18 commentaires
Vous devez être membre pour ajouter un commentaire.
Vous êtes déjà membre ? Connectez-vous
Pas encore membre ? Devenez membre gratuitement
Signaler le commentaire
Fermer