Photo d'Abdelkader Bouguettaia obtenue le 20 juin 2025, après son extradition de Dubaï, par l'AFP auprès d'Interpol ( INTERPOL / Handout )
Accusé d'avoir orchestré des importations massives de cocaïne, Abdelkader Bouguettaia a assuré lundi qu'il n'avait "jamais fui" la France, alors qu'il résidait à Dubaï lors de ses trois condamnations, en son absence, à des peines allant jusqu'à 15 ans de prison.
Abdelkader Bouguettaia, 38 ans, est apparu dans son box avec des lunettes aux verres épais sur le nez, le crâne et la barbe rasés, au premier jour de son nouveau procès à Lille.
Il a rejoint le nouveau quartier de lutte contre la criminalité organisée (QLCO) de la prison de haute sécurité de Condé-sur-Sarthe (Orne) "à quelques jours de l'audience", a souligné lundi l'une de ses avocates, qui voit dans ce transfert une manoeuvre pour le présenter comme "un trophée" que la justice voudrait "brandir".
Celui qui est surnommé "Bibi" a été condamné en 2022, 2023 et 2024 à Lille, deux fois à neuf ans et une fois à 15 ans de réclusion criminelle, pour des importations de cocaïne ayant eu lieu entre 2019 et 2021.
Mais ces procès se sont tenus en son absence car il résidait à l'époque à Dubaï, d'où il aurait continué à piloter le trafic de cocaïne par le port du Havre, sa ville natale, selon les investigations.
"Je n'ai jamais fui", s'est défendu lundi le prévenu à ce sujet. "Quand je suis parti de la France vers l'étranger, je n'avais aucun problème avec la justice", a-t-il assuré.
Après son extradition en juin dernier vers la France, Abdelkader Bouguettaia n'a pas acquiescé à ses trois condamnations, ouvrant la voie à de nouveaux procès, regroupés en un seul sur trois jours devant la Juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Lille.
La matinée du premier jour d'audience s'est principalement concentrée sur divers points de procédure, les trois avocates de M. Bouguettaia dénonçant les conditions de l'extradition de leur client, de l'instruction puis du procès et demandant le huis clos ou le renvoi de l'audience à une date ultérieure, sans succès.
- Méthodes d'intimidation violentes -
"Je suis un être humain, je suis un citoyen français, j'ai travaillé ici en France, j'ai payé mes impôts (...). Je suis qui pour qu'on ne respecte pas mes droits?", a accusé Abdelkader Bouguettaia dans une colère contenue.
Les trois dossiers rejugés cette semaine portent sur plusieurs saisies de cocaïne au port du Havre, pour un total de plus de deux tonnes de drogue, rappelle un dossier de presse du parquet de Lille.
Dans chacun de ces dossiers, les investigations ont permis d'identifier Abdelkader Bouguettaia comme l'un des principaux commanditaires de ces importations.
Dans l'un des dossiers, portant sur la découverte de 141 kgs de cocaïne en février 2019, un témoin a identifié "deux commanditaires, dont Abdelkader Bouguettaia", avant de se rétracter en 2021, selon le parquet. Une rétractation négociée par M. Bouguettaia en échange d'une "somme d'argent substantielle", a établi l'enquête.
Certaines de ces importations étaient effectuées via "des cargaisons légales de gélatines de boeuf et de lames de bois en provenance d'Amérique du Sud, notamment du Brésil", ou encore "dans un conteneur de miettes de thon sous vide en provenance d'Equateur".
Un de ses collaborateurs présumés avait affirmé, lors d'un interrogatoire dont l'AFP a pu lire le procès-verbal, que M. Bouguettaia était associé avec un haut responsable de la distribution de cocaïne aux Pays-Bas et qu'il gérait la "réception de la marchandise" au Havre, ainsi qu'à Paris et à Anvers, en Belgique.
Ses méthodes d'intimidation étaient violentes, poursuivait ce témoin: l'envoi de photos de membres de sa famille sans autre message, celui d'hommes de main quand il répond trop lentement à un message ou qu'il refuse une mission.
M. Bouguettaia a en outre été mis en examen en juin à Paris, notamment pour "importation de stupéfiants en bande organisée en récidive" dans une autre affaire, portant sur l'importation d'un conteneur contenant 2,5 tonnes de cocaïne arrivé au Havre depuis la Colombie.

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