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Les "baby boomers" au centre du débat politique sur les retraites
information fournie par Reuters 09/10/2024 à 18:11

Evénement du Rassemblement national à Nice

Evénement du Rassemblement national à Nice

par Leigh Thomas et Michel Rose

Alors que le gouvernement de Michel Barnier s'engage dans une course contre la montre pour boucler son budget avant la fin de l'année, de plus en plus de voix s'élèvent pour demander aux retraités de contribuer à l'effort de réduction du déficit.

La génération du "baby boom" notamment, née entre 1946 et 1964, est accusée par un nombre croissant d'analystes d'avoir été injustement épargnée par l'effort collectif, alors que gronde la colère contre un possible "choc fiscal" à venir.

Un récent épisode a encore rappelé à quel point il est délicat politiquement de s'attaquer au sujet des retraites : alors que le gouvernement envisageait de reporter de six mois la revalorisation des retraites par rapport à l'inflation, une mesure pourtant timide permettant d'économiser quatre milliards d'euros, elle a immédiatement provoqué une levée de boucliers.

De nombreux députés, soucieux de ne pas se mettre à dos les seniors - la catégorie d'électeurs qui se rend plus volontiers aux urnes - ont fortement critiqué cette proposition.

La présidente du groupe Rassemblement national (RN) à l'Assemblée nationale, Marine Le Pen, dont Michel Barnier a besoin pour éviter une censure, a fustigé sur le réseau social X une mesure revenant à "voler à nos aînés des milliards d'euros de pouvoir d'achat".

L'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, pourtant officiellement en soutien du nouveau Premier ministre, a lui jugé dans les Échos qu'un report de la revalorisation des retraite serait "absurde" alors que Michel Barnier a promis de revenir sur la réforme des retraites, une mesure qui va entraîner d'avantage de dépenses.

Sous Emmanuel Macron, les gouvernements précédents s'étaient aussi largement abstenu de cibler les personnes déjà à la retraite pour réduire le poids des pensions sur les actifs, préférant demander à ces derniers de travailler plus longtemps, d'où l'adoption l'année dernière de la controversée réforme répoussant l'âge minimum de la retraite à 64 ans.

Mais alors que la dépense publique française est l'une des plus élevées au monde, à 57% du PIB, un nombre croissant d'économistes et d'analystes sont convaincus de la nécessité de faire contribuer les retraités pour réaliser des économies.

"Les dépenses de retraite sont un quart des dépenses publiques. Donc c'est difficile d'arriver à (réduire les dépenses) uniquement sur les économies sans toucher aux retraites", souligne François Ecalle, ancien auditeur du ministère des Finances.

Cependant, sans majorité absolue, Michel Barnier peut difficilement se permettre d'ignorer les chefs de file de partis dont dépend la survie de son gouvernement.

TROUVER DES ÉCONOMIES

Face à l'offensive de Marine Le Pen et d'autres voix de la majorité, le Premier ministre a temporisé - sans abandonner explicitement la mesure - se montrant ouvert à "d'autres idées" si des sources d'économies équivalentes étaient proposées par les députés.

Aucune des propositions apparues en réponse ne permet pourtant à elle seule de compenser les quatre milliards que pourrait faire économiser la sous-indexation des retraites.

Marine Le Pen a préconisé la suppression des subventions destinées aux organisation non gouvernementales qui viennent en aide aux migrants, soit selon elle 750 millions d'euros d'économies par an.

Gérald Darmanin a lui suggéré de faire des économies sur l'audiovisuel public ou de supprimer la semaine de 35 heures.

Pour beaucoup d'économistes, l'échec de la classe politique à demander des efforts aux retraités, dont la moitié touchait plus de 1.900 euros de retraite par mois en 2019, selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), obère gravement les chances de réduire le déficit.

L'ancien ministre des Finances Bruno Le Maire a notamment raté une occasion historique de faire des économies l'an dernier, lorsqu'il a décidé d'augmenter les retraites de 5,3% en 2024, en suivant l'inflation.

En une seule décision, le gouvernement a accru les dépenses publiques de près de 15 milliards d'euros annuels, presque autant que les 17 milliards que devait rapporter le recul de deux ans de l'âge de la retraite.

"La revalorisation des pensions a été la pire décision économique de ces dix voire quinze dernières années," a estimé Ludovic Subran, chef économiste d'Allianz, interrogé sur BFM. "Elle a, à elle seule, annulé tous les effets budgétaires de la réforme des retraites."

D'après un député Renaissance, Emmanuel Macron s'est pourtant vu mettre en garde sur ce sujet à plusieurs reprises. Mais le président a estimé qu'il aurait été "suicidaire" de toucher aux retraites juste avant les élections européennes, selon cette source.

En moyenne, les retraités français ont un pouvoir d'achat équivalent ou supérieur à la population active, alors que, selon le Conseil d'orientation des retraites (COR), ce n'est pas le cas dans de nombreux autres pays.

Les travailleurs français partent en outre plus tôt à la retraite que dans les autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et ils vivent plus longtemps.

Les pensions versées aux retraités français atteignent par conséquent 14% du produit intérieur brut (PIB) contre une moyenne de 8% sur les 39 États membres de l'OCDE.

Dans son rapport publié en juin, le COR disait prévoir un déficit du système de retraites dès cette année si rien n'était mis en place pour l'éviter, et ce malgré la réforme de 2023.

Mais cet état de fait passe de moins en moins chez les actifs.

"Je le dis et je le répète: il n'y a aucune raison pour que les boomers ne contribuent pas à l'effort national", déplorait Rafik Smati, chef d'entreprise, sur X, en réaction à un article sur le possible recul de Michel Barnier sur les retraites.

"Un tel renoncement serait un pied de nez au bon sens, un bras d'honneur aux actifs, et une soumission à Marine Le Pen."

(Reportage Leigh Thomas et Michel Rose, version française Pauline Foret, édité par Kate Entringer)

24 commentaires

  • 09 octobre 21:56

    Les économistes (qui se trompent 50 % du temps ) se rendent t-ils compte que les retraités font retomber une grande partie de leur argent sur les génerations suivantes (donations, legs, héritages) et sur l'etat , CSG, IR etc ? . Diminuer les retraites aura un effet au debut, puis plus rien. Le problème est structurel: On a un état inefficace et ventripotent et plus grave 1/3 de l'indutrie a été perdue .C'est l'industrie qui est à la base la richesse d'un pays, le reste suit..


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