
Un membre du personnel médical et d'autres hommes se tiennent parmi les corps de victimes des récents affrontements entre des combattants druzes et des tribus bédouines, disposés pour identification dans la cour d'un hôpital dans la ville de Soueida, dans le sud de la Syrie, le 17 juillet 2025 ( AFP / Shadi AL-DUBAISI )
La ville syrienne à majorité druze de Soueida compte ses morts après le retrait des troupes gouvernementales, décidé par le président intérimaire Ahmad al-Chareh pour éviter selon lui une "guerre ouverte" avec Israël.
Mais la présidence syrienne a accusé jeudi les combattants druzes de Soueida de violer le cessez-le-feu. Elle a aussi mis en garde contre "l'interférence israélienne flagrante continue dans les affaires internes de la Syrie, qui ne conduit qu'à davantage de chaos et de destruction et complique plus encore la situation régionale".
Israël a menacé mercredi d'intensifier ses frappes si les forces syriennes ne quittaient pas cette province du sud de la Syrie, où les combats ont fait près de 600 morts selon une ONG. Jeudi soir, l'agence officielle Sana a fait état d'un raid israélien près de Soueida, la premier depuis le retrait syrien.
Les habitants de Soueida ont découvert une ville sinistrée. Un correspondant de l'AFP a compté 15 cadavres gisant dans le centre.
"C'est comme si Soueida sortait d'une catastrophe naturelle ou d'une inondation", a raconté à l'AFP Hanadi Obeid, un médecin de 39 ans.
Devant l'hôpital principal, des familles cherchent leurs proches dans un climat de colère et de peur.
Selon le bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), "près de 2.000 familles ont été déplacées" en raison des violences à travers la province, qui ont éclaté dimanche entre tribus bédouines sunnites et combattants druzes.

Le ministère syrien de la Défense et le quartier général de l'armée à Damas, partiellement détruit par un bombardement israélien, le 16 juillet 2025 en Syrie ( AFP / Bakr ALkasem )
Le pouvoir syrien, disant vouloir rétablir l'ordre, a déployé ses forces mardi à Soueida, jusque-là contrôlée par des combattants druzes. L'OSDH, des témoins et des groupes druzes ont toutefois accusé les forces syriennes d'avoir combattu au côté des tribus et d'avoir commis des exactions.
- "Par la force" -

Des combattants druzes syriens parcourent les rues de la ville de Soueida, au sud du pays, après le retrait des troupes gouvernementales, le 17 juillet 2025 ( AFP / Shadi AL-DUBAISI )
Cette escalade ébranle davantage le pouvoir de Chareh, qui a renversé, à la tête d'une coalition de groupes rebelles islamistes le président Bachar al-Assad en décembre, dans un pays meurtri par près de 14 ans de guerre civile.
Des membres des forces gouvernementales ont affirmé à l'AFP qu'ils avaient reçu l'ordre de se retirer de la province de Soueida peu avant minuit mercredi et qu'ils avaient achevé leur retrait à l'aube.
Dans un discours télévisé dans la nuit, M. Chareh a annoncé le transfert "à des groupes locaux" et des dignitaires religieux druzes de la responsabilité du maintien de la sécurité à Soueida.
"Nous avons donné la priorité à l'intérêt des Syriens plutôt qu'au chaos et à la destruction", a-t-il déclaré, disant avoir voulu éviter "une guerre ouverte" avec Israël dont il a condamné l'intervention.

Un membre des forces de sécurité syriennes dans la ville de Soueida, le 16 juillet 2025 ( AFP / Bakr ALKASEM )
Mercredi, Israël a bombardé plusieurs cibles au coeur de Damas dont le QG de l'armée, faisant trois morts selon les autorités.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a dit jeudi que le cessez-le-feu avait été obtenu "par la force".
- "Sauver la région" -
M. Chareh a souligné que "l'intervention efficace de la médiation américaine, arabe et turque, a sauvé la région d'un sort inconnu".
Les Etats-Unis, alliés d'Israël et qui affichent leur soutien au nouveau dirigeant syrien malgré son passé jihadiste, avaient annoncé mercredi un accord pour rétablir le calme en Syrie.

Des druzes armés se déploient dans le village de al-Dur, dans le sud de la Syrie, après le retrait des forces gouvernementales, le 17 juillet 2025 ( AFP / Omar HAJ KADOUR )
Le département d'Etat, Tammy Bruce, avait dans le même temps appelé le pouvoir syrien à se retirer de la zone de conflit afin d'apaiser les tensions avec Israël.
Washington "n'a pas soutenu les récentes frappes israéliennes", a déclaré M. Bruce jeudi. La Maison Blanche a elle mis en avant le rôle des Etats-Unis dans la désescalade, qui "semble continuer".
Les ministres des Affaires étrangères des Emirats, de Jordanie, de Bahrein, de Turquie, d'Arabie Saoudite, d'Irak, d'Oman, du Qatar, de Koweit, du Liban et d'Egypte ont affirmé dans un communiqué conjoint leur "condamnation la plus ferme et leur rejet catégorique des attaques israéliennes répétées sur la Syrie qui sont une violation manifeste de la loi internationale et une attaque flagrante contre la souveraineté syrienne".
- "Exécutions sommaires" -

Des véhicules militaires israéliens longent la barrière frontalière, près de la ville de Majdal Shams, sur les hauteurs du Golan annexées par Israël, le 17 juillet 2025 ( AFP / Jalaa MAREY )
Selon l'OSDH, les violences ont fait 594 morts: 300 druzes de Soueida, dont 154 civils y compris 83 "exécutés sommairement par des membres (des forces relevant) des ministères de la Défense et de l'Intérieur".
Les combats ont également coûté la vie à 257 membres du gouvernement et 18 combattants bédouins sunnites, outre trois membres de tribus "exécutés sommairement par des combattants druzes", selon cette source.
Selon M. Chareh, les auteurs d'exactions contre "notre peuple druze, qui est sous la protection et la responsabilité de l'Etat", "rendront des comptes".
Il avait fait la même promesse après le massacre de centaines de membres de la communauté alaouite, dont est issu M. Assad, début mars sur le littoral syrien. Mais une commission d'enquête sur ces massacres n'a jamais rendu ses conclusions.

Des druzes tentent d'entrer en force en Syrie depuis le plateau du Golan annexé par Israël, le 16 juillet 2025 ( AFP / Jalaa MAREY )
Présente principalement à Soueida, la communauté druze de Syrie comptait avant la guerre civile quelque 700.000 personnes. Cette minorité ésotérique issue d'une branche de l'islam est aussi implantée au Liban et en Israël.
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