
Lagarde, présidente de la BCE, s'adresse aux médias à Francfort
L'euro pourrait devenir une alternative viable au dollar et rapporter d'immenses bénéfices à l'ensemble des 20 pays partageant la devise unique, si leurs gouvernements renforçaient l'architecture financière et sécuritaire de la zone euro, a déclaré Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), lundi.
Inquiets de la politique économique erratique des États-Unis, les investisseurs mondiaux ont réduit leur exposition aux actifs libellés en dollars ces derniers mois, mais beaucoup ont opté pour l'or à la place, ne voyant pas d'alternative directe.
Le rôle mondial de l'euro stagne depuis des décennies car les institutions financières de l'Union européenne (UE) restent inachevées et les gouvernements n'ont pas montré d'intérêt pour une intégration plus profonde.
"Les changements en cours ouvrent la voie à un 'moment global de l'euro'", a déclaré Christine Lagarde lors d'une conférence à Berlin. "L'euro ne gagnera pas en influence par défaut, il devra la mériter", estime la présidente de la BCE.
Pour cela, l'Europe a besoin d'un marché des capitaux plus profond et plus liquide, doit renforcer ses fondements juridiques et doit étayer son engagement en faveur de l'ouverture des échanges par des capacités de sécurité, a expliqué Christine Lagarde.
Le rôle du dollar est en déclin depuis des années et représente aujourd'hui 58% des réserves internationales, soit le niveau le plus bas depuis des décennies, mais toujours bien supérieur à la part de 20% de l'euro.
Tout renforcement du rôle de l'euro doit coïncider avec une plus grande puissance militaire capable de soutenir les partenariats, selon Christine Lagarde.
"En effet, les investisseurs, en particulier les investisseurs institutionnels, recherchent également des garanties géopolitiques sous une autre forme : ils investissent dans les actifs de régions qui sont des partenaires fiables en matière de sécurité et qui peuvent honorer leurs alliances par la puissance militaire", a déclaré Christine Lagarde lors d'une conférence donnée à l'université privée Hertie.
L'Europe devrait également faire de l'euro la monnaie de préférence des entreprises qui facturent leurs transactions commerciales internationales, a-t-elle ajouté. Pour ce faire, elle pourrait conclure de nouveaux accords commerciaux, améliorer les paiements transfrontaliers et conclure des accords de liquidité avec la BCE.
Toutefois, la réforme de l'économie nationale pourrait s'avérer plus urgente, a déclaré Christine Lagarde. Le marché des capitaux de la zone euro est encore fragmenté, inefficace et ne dispose pas d'un actif sûr véritablement liquide et largement disponible vers lequel les investisseurs pourraient affluer, a-t-elle déclaré.
"La logique économique nous dit que les biens publics doivent être financés conjointement. Et ce financement conjoint pourrait permettre à l'Europe d'augmenter progressivement son offre d'actifs sûrs", estime la présidente de la BCE.
L'emprunt conjoint est un tabou pour certains membres clés de la zone euro, notamment l'Allemagne, qui craint que ses propres contribuables ne finissent par devoir payer pour l'irresponsabilité budgétaire des autres.
Si l'Europe réussissait, les avantages seraient considérables, a affirmé Christine Lagarde. Les flux d'investissements permettraient aux acteurs nationaux d'emprunter à moindre coût, protégeraient la zone euro des fluctuations des taux de change et la mettraient à l'abri des sanctions internationales.
(Rédigé par Balazs Koranyi, Mara Vîlcu pour la version française, édité par Blandine Hénault)
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