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Jusqu'à 40% de chiffre d'affaires amputé : les pêcheurs français face à l'exclusion des eaux anglaises
information fournie par Boursorama avec Media Services 21/05/2024 à 14:20

Selon Paris, l'impact sur la pêche française s'élèverait à 5 millions d'euros par an, soit six fois plus que pour les pêcheurs britanniques. La pêche belge serait encore davantage affectée.

Des pêcheurs britanniques près de Whitby, au Royaume-Uni, le 16 mai 2024. (illustration) ( AFP / OLI SCARFF )

Des pêcheurs britanniques près de Whitby, au Royaume-Uni, le 16 mai 2024. (illustration) ( AFP / OLI SCARFF )

Depuis mars, la pêche au chalut est interdite dans certaines eaux anglaises, au large des Hauts-de-France, entraînant un risque important pour l'activité de certains pêcheurs français. Si la mesure est écologique selon les Britanniques, les Français dénoncent un choix "protectionniste".

À bord de son chalutier d'une vingtaine de mètres amarré dans le port de Boulogne-sur-Mer, Donovan Leprêtre pointe sur ses cartes les 13 zones marines protégées (4.000 km2) où il est interdit de pêcher depuis le 22 mars. "C'était une grosse partie de notre chiffre d'affaires, 35 à 40%" , souffle le pêcheur. "On doit se rabattre sur d'autres zones, mais où ? On va se retrouver dans un petit cercle à tourner en rond", peste-t-il à son poste de pilotage, cris de mouettes en fond sonore.

La décision de l'Organisation de gestion marine britannique, destinée à protéger les espèces et habitats marins , concerne les pêcheurs de toutes nationalités. Mais selon le trentenaire, c'est une façon pour les Britanniques de "se réapproprier leurs eaux" en les "grignotant petit à petit" aux pêcheurs européens, nombreux dans ces zones. Il demande à l'Europe de les "protéger" pour "continuer à vivre" de son métier, "une passion" qui fournit aux consommateurs cabillaud, sardine, seiche ou encornets.

" Si les bateaux ne peuvent plus aller dans ces zones, on va manquer de produits", abonde Georges Thomas, président du syndicat général des mareyeurs de Boulogne-sur-Mer.

Un impact de 5 millions par an

Selon Paris, l'impact sur la pêche française s'élèverait à 5 millions d'euros par an, soit six fois plus que pour les pêcheurs britanniques. La pêche belge serait encore davantage affectée. La filière pêche des Hauts-de-France, qui dépend en partie des eaux britanniques, est perturbée depuis le Brexit. La première difficulté a "été l'obtention des licences" pour pêcher en eaux anglaises, rappelle Etienne Dachicourt, directeur de la coopérative maritime étaploise.

Pour lui, ces nouvelles restrictions sont une mesure "protectionniste", et l'écologie est "un prétexte" pour "récupérer la souveraineté" sur les eaux. D'autant que dans ces zones "on pêche l'encornet, une espèce à forte valeur marchande".

L'eurodéputée EELV Caroline Roose rappelle la nécessité de protéger efficacement certains espaces marins : "À force de pêcher plus que de raison, nous n'aurons plus de ressources", alerte-t-elle.

Et le gouvernement britannique se défend : cette décision "qui s'applique à tous les navires", dont les britanniques , "a été prise à l'issue d'une vaste consultation avec toute une série de parties prenantes, y compris les organisations de pêche britanniques et françaises".

Les pêcheurs britanniques, eux, jugent l'interdiction "préjudiciable" , estimant par la voix de leur fédération qu'il n'existe pas "de justification scientifique suffisante pour exclure le chalutage" de ces zones.

Des mesures de rétorsion

Faisant écho aux inquiétudes des pêcheurs, le président LR de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand, a estimé que cette mesure pourrait signer "l'arrêt de mort" des flottilles régionales.

Jean-Noël Barrot, le ministre français chargé de l'Europe, avait évoqué fin mars de possibles "mesures de rétorsion", citant notamment "des droits de douanes sur les importations britanniques". Une perspective encore lointaine. Huit États de l'UE, emmenés par la France, ont appelé Bruxelles à vérifier "la conformité" de la décision de Londres, jugée potentiellement discriminatoire, car touchant surtout des pêcheurs étrangers.

Selon l'ONG Oceana, les navires britanniques représentent seulement 6% de l'activité de chalutage de fond dans les zones que le Royaume Uni a choisi de protéger. La Commission européenne abordera le sujet avec Londres jeudi lors d'une réunion régulière du "comité spécial sur la pêche" établi après le Brexit. L'idée est de chercher une solution amiable , avant d'engager une éventuelle procédure de règlement des différends.

Bruxelles s'est déjà dit prêt à engager un bras de fer dans un autre dossier halieutique après l'interdiction de pêcher le lançon (anguille des sables) décrétée par le Royaume-Uni depuis le 26 mars, une décision dont pâtissent le Danemark et la Suède.

Ces tensions pourraient compliquer les négociations annuelles des quotas de pêche 2025 dans les eaux partagées entre l'UE et le Royaume-Uni, et les pourparlers pour l'accès des navires européens aux eaux britanniques après la fin en 2026 de la période de transition prévue par l'accord post-Brexit.

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