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Israël-Hamas : Jean-Luc Mélenchon et LFI de plus en plus isolés
information fournie par Boursorama avec Media Services 10/10/2023 à 10:25

Depuis l'attaque du mouvement islamiste palestinien contre l'État hébreu samedi, les prises de positions de La France insoumise ont été jugées ambiguës, voire complaisantes, par leurs partenaires de gauche. Le parti a mis en balance les actes du Hamas et la politique du gouvernement israëlien. L'avenir de la Nupes semble plus fragilisé que jamais. Lundi, le leader insoumis s'en est pris au Crif.

Pour Jean-Luc Mélenchon, "les insoumis se voient infliger une lapidation médiatique désormais permanente".  ( AFP / EMMANUEL DUNAND )

Pour Jean-Luc Mélenchon, "les insoumis se voient infliger une lapidation médiatique désormais permanente". ( AFP / EMMANUEL DUNAND )

Déjà isolé au sein même de la gauche, pour son refus de condamner sans équivoque l'attaque du Hamas , le leader de LFI a ouvert un nouveau front politique lundi soir, en s'en prenant au Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif). Le post sur la plateforme X est tombé dans la soirée, quelques heures à peine après le rassemblement de milliers de personnes, dans une atmosphère grave, pour dire leur solidarité avec Israël, près de trois jours après l'offensive du mouvement islamiste qui y a fait plus de 900 morts.

"En obligeant tout le monde à s'aligner sur la position du gouvernement d'extrême droite israélien , en acceptant de manifester avec le RN, en insultant les élus futiles du PS, le Crif a isolé et empêché la solidarité des Français avec la volonté de paix et la demande de cessez-le-feu immédiat. Les morts de tous côtés méritent mieux et notre compassion totale", a écrit Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon est "un ennemi de la République"

Une position "abjecte", selon le président du Crif, pour qui Jean-Luc Mélenchon est "un ennemi de la République". "Jean-Luc Mélenchon a choisi de ne pas s'exprimer en solidarité avec Israël mais de légitimer le terrorisme par sa mise en équivalence entre Israël et le Hamas" , a réagi Yonathan Arfi mardi sur RMC . "C'est 'une classique' de Jean-Luc Mélenchon, il a décidé de manière obsessionnelle de s'attaquer au Crif", estime Yonathan Arfi. "Là, ce n'est plus de la politique, c'est une question morale. Jean-Luc Mélenchon prend toujours le parti, au fond, du totalitarisme : il soutient la Russie face à l'Ukraine, la Chine face à Taïwan et aujourd'hui, d'une certaine manière, le Hamas face à Israël. C'est une constante, il est toujours du mauvais côté de l'Histoire".

Plus largement, LFI est au centre d'une très vive controverse depuis samedi, accusé d’ambiguïtés, voire de complaisance sur l'attaque du Hamas. À l'inverse des autres formations de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), LFI n'a pas envoyé de représentant à la marche parisienne. "Nous allons à tous les rassemblements qui expriment une solidarité avec les victimes israéliennes et palestiniennes et qui demandent un cessez-le-feu et le retour de la paix. Ce n'est pas le cas du rassemblement de ce soir", avait justifié lundi matin le coordinateur du mouvement, Manuel Bompard.

Frondeurs

Chez LFI, seul le député de Paris Rodrigo Arenas s'est rendu à la manifestation. "La justesse et la justice des causes anticoloniales et du refus des oppressions perdent leur légitimité le jour où elles acceptent les massacres de civils et le terrorisme aveugle comme des stratégies militaires acceptable", a-t-il estimé dans une lettre à son groupe politique, appelant à "l'empathie".

Outre Rodrigo Arenas, quelques figures de LFI semblent vouloir marquer leur différence avec Jean-Luc Mélenchon et avec le communiqué initial de leur parti, qui mettait en parallèle l'attaque du Hamas et la politique du gouvernement israélien. Dans une interview à Libération lundi, Clémentine Autain , une des "frondeuses" du mouvement, reconnaît que l'on peut reprocher à LFI "un manque de clarté" ou "des maladresses". "Les mots sont importants", explique-t-elle, s'indignant par ailleurs que l'on puisse "laisser entendre ou dire sérieusement que LFI soutient le Hamas".

La Nupes survivra-t-elle à cette crise ?

Dans ce contexte, la prise de position du député insoumis de la Somme François Ruffin ne passe pas inaperçue. Celui qui est vu comme un candidat potentiel en 2027 s'est distingué au sein de son parti en exprimant sa "condamnation totale de l'attaque du Hamas", tout en s'inquiétant que la réponse soit "dans les mains du gouvernement israélien le plus brutal depuis trente ans". Des propos appuyés par l'élu de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière.

Cette controverse sur le Proche-Orient ouvre un nouveau front dans la crise sans fin que traverse la Nupes. Divisée pour les Européennes de juin 2024, elle ambitionne pourtant de présenter un candidat commun à l'élection présidentielle de 2027. L'alliance des partis de gauche y survivra-t-elle ? En renvoyant dos à dos le Hamas et le gouvernement israélien, LFI s'est plus que jamais aliénée ses partenaires de gauche, en premier lieu les socialistes. Pour ces derniers, l'heure ne peut être qu'à une condamnation sans la moindre ambiguïté du Hamas.

Réunion à l'Assemblée ce mardi

Le Parti socialiste a tenu dimanche à réaffirmer sa position. "La politique du gouvernement Netanyahu ne saurait être mise en avant pour relativiser l'agression terroriste dont est aujourd'hui la cible la population israélienne", martèle le PS. Son patron Olivier Faure, qui a toujours défendu l'union des partis de gauche, malgré les crises à répétitions, a estimé lundi que les déclarations de LFI "laisseront des traces". Il exige des "explications". La veille, le député Jérôme Guedj (PS), autre grand avocat jusqu'ici de la Nupes, s'était dit "dégoûté" par les prises de position des insoumis. Pire, il a jeté un pavé dans la mare, posant la question du maintien de son parti au sein de cette coalition.

Première action concrète : le groupe socialiste de la région Île-de-France a annoncé lundi "suspendre temporairement (ses) travaux en commun" avec les insoumis, se disant "choqué par la position nationale du mouvement". Dans ce climat, les députés de gauche se réunissent mardi pour la réunion hebdomadaire de l'intergroupe de la Nupes. "Nous allons avoir une discussion franche et peut-être difficile, nous verrons bien", a indiqué à l' AFP le chef de file des socialistes à l'Assemblée, Boris Vallaud.

LFI ne parle pas de "terrorisme"

Pour Jean-Luc Mélenchon, "les insoumis se voient infliger une lapidation médiatique désormais permanente". "Les insoumis n'approuvent aucun massacre quels qu'en soient les auteurs. Comment pourrait-on croire autre chose ? Pourquoi ? Ou y-en a-t-il la moindre trace ? Je recommande donc de ne rien céder aux pressions qui s'exercent", a-t-il écrit sur son blog lundi soir.

C'est la première réaction de LFI samedi qui a mis le feu aux poudres. "L'offensive armée de forces palestiniennes menée par le Hamas intervient dans un contexte d'intensification de la politique d'occupation israélienne à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem Est", avait indiqué le parti, se gardant bien d'employer le mot de "terrorisme". Plusieurs députés insoumis sont même allés au-delà, comme Louis Boyard, qui a accusé le gouvernement français d'avoir fermé les yeux sur "la colonisation et les exactions en Palestine". "Que certains à gauche parlent du Hamas comme 'des forces armées palestiennes' me dégoûte. Le Hamas est une organisation terroriste", a réagi la députée socialiste Valérie Rabault.

Chaque mot est pesé

La violence des mots en dit long sur la difficultés de la gauche à s'entendre sur l'un des dossiers les plus chauds de la diplomatie , domaine réservé du président de la République. Sur l'Ukraine aussi, LFI se voit régulièrement reprocher son faible soutien à Kiev, son opposition vis-à-vis de l'Otan, et des déclarations passées de Jean-Luc Mélenchon jugées complaisantes avec la Russie.

Depuis son communiqué initial, la position du mouvement de gauche radicale s'est légèrement infléchie. Dans un contexte extrêmement tendu, où chaque mot est pesé, Manuel Bompard n'a toujours pas employé le terme de "terroriste" à l'égard du mouvement islamiste palestinien. Mais il a évoqué des "crimes de guerre" commis par les deux parties. "C'est bien qu'il mette ces mots-là", note Cyrielle Chatelain, cheffe du groupe écologiste à l'Assemblée, qui parle d'"actes terroristes inqualifiables et injustifiables".

Ne pas "se regarder le nombril"

Comme beaucoup d'élus, elle refuse de se "regarder le nombril" et de s'avancer sur l'avenir de la Nupes, sujet trop dérisoire par rapport à la gravité de la situation au Proche-Orient. "Ce que pensent MM. Guedj ou Faure de la question stratégique de la Nupes ne m'intéresse absolument pas. C'est dramatique de parler de ça aujourd'hui, ce n'est pas le sujet" , balaie pour sa part le député apparenté LFI Aymeric Caron.

"La Nupes est un instrument, ce n'est pas une fin en soi. Je suis pro-Nupes mais ce n'est pas le Graal", rappelle l'élu de Paris, qui se dit "engagé depuis de nombreuses années pour le respect des droits des Palestiniens". Concernant les premières déclarations du groupe LFI et le changement syntaxique qui s'en est suivi, Aymeric Caron parle d'"un communiqué équilibré avec tous les éléments dont on disposait à ce moment-là". Depuis, "on sait que des crimes de guerre ont été commis par le Hamas. Il est de notre devoir de les dénoncer. Personne dans notre groupe ne cautionne ce genre de choses", précise-t-il.

"Contrairement à Guedj, on n'a pas attendu ces événements"

Côté communistes, même si Fabien Roussel a bien évoqué une attaque "terroriste", le député du Nord s'est pour une fois gardé de porter des coups aux insoumis, avec qui il entretient pourtant une relation très difficile. "Se servir de tout ça pour instruire le procès de LFI, ce n'est pas à la hauteur, même si je ne sais pas ce qui leur est passé par la tête", soupire un responsable communiste, reconnaissant qu'il existe "historiquement des similitudes" sur la question palestinienne entre le PCF et LFI.

Chez les communistes, la question de l'avenir de la coalition ne semble même plus se poser : on a déjà basculé dans l'après. "La gauche sous hégémonie LFI, c'est l'échec assuré. Contrairement à Guedj, on n'a pas attendu ces événements pour défendre cette option", indique le responsable communiste.

Le NPA soutient "la résistance palestinienne"

LFI est aussi très sévèrement critiquée jusqu'au gouvernement. Dimanche, depuis Bordeaux, où elle assistait au campus de rentrée du parti présidentiel Renaissance, la Première ministre Élisabeth Borne n'a guère pris de gants pour dénoncer les "ambiguïtés révoltantes" du parti de Jean-Luc Mélenchon. Selon elle, l'"antisionisme" de LFI est "aussi une façon de masquer de l'antisémitisme".

À gauche de LFI, une autre polémique a éclaté concernant la prise de position du Nouveau parti anticapitaliste (NPA). "Nous sommes tous et toutes Palestiniennes", a proclamé le parti de Philippe Poutou et Olivier Besancenot, en affirmant sans ambigüité son soutien à la "résistance palestinienne". L'Union des étudiants juifs de France (UEJF) a annoncé son intention de déposer une plainte pour apologie du terrorisme, inquiète de l'impact du NPA dans les universités françaises.

26 commentaires

  • 10 octobre 10:58

    Nos politiques peuvent toujours dire, reprocher des attitudes, pousser des cris d'orfraie, in fine c'est le peuple qui choisit..........normalement.


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