L’ex-président considère que la guerre en Ukraine, «bien sûr provoquée» par la Russie, est «amplifiée» par les États-Unis.
L’ombre de la guerre en Ukraine continue de planer sur la vie politique française. Une semaine après l’altercation historique entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky dans le Bureau ovale, qui a acté une rupture diplomatique entre les deux chefs d’État, le débat national n’échappe pas aux interrogations que soulève cette bascule géopolitique. Et pour cause : depuis le lâchage militaire américain de Kiev, Washington s’étant rapproché de la position russe, les Européens - Emmanuel Macron en premier - se démènent pour subvenir aux besoins de l’Ukraine, qui doit continuer de résister à l’agresseur russe. Lequel a encore revendiqué ce week-end la reprise de trois villages dans la région de Koursk.
Alors que le président de la République s’est exprimé mercredi soir depuis l’Élysée pour répondre aux « inquiétudes légitimes » des Français s’agissant de ce conflit, son prédécesseur juge qu’il a été « lucide sur la menace russe », qui « s’exerce sur l’Ukraine, mais aussi à travers des cyberattaques, des interruptions sur les routes maritimes » . Un point positif pour François Hollande, invité ce dimanche du « Grand Jury RTL-Le Figaro-M6-Public Sénat », qui regrette dans le même temps qu’Emmanuel Macron ait été « trop discret » sur le revirement spectaculaire du président américain vis-à-vis de ses partenaires historiques. « Il ne dit pas ce que nous devons penser par rapport aux décisions de Donald Trump qui viennent d’arriver : suspendre l’aide militaire et suspendre le renseignement (américain) » , a déploré le député PS de Corrèze, établissant un lien de cause à effet entre la nouvelle politique étrangère de l’Oncle Sam et les récentes frappes russes sur l’est de l’Ukraine, qui ont fait, ces dernières heures, au moins quatorze morts et blessé des dizaines de personnes. Si la guerre a « bien sûr (été) provoquée par Vladimir Poutine » , elle est selon François Hollande « amplifiée paradoxalement par Donald Trump » .
Dans ce contexte, les États-Unis ne sont plus l’interlocuteur privilégié de l’Europe. « Un allié, c’est celui qui condamne l’agresseur ; un allié, c’est celui qui vient au secours de l’agressé ; un allié, c’est celui qui partage l’effort du continent européen - pas celui qui se dégage de cette solidarité - ; un allié ne vote pas avec la Corée du Nord et la Russie une résolution à l’ONU contre les Européens » , a scandé l’élu socialiste, qui exhorte Emmanuel Macron à prendre en compte la « rupture » - peut-être temporaire - que le locataire de la Maison-Blanche incarne sur la scène internationale. Au point d’appeler son successeur à extraire la France de l’Otan - l’organisation politico-militaire atlantique à la tête de laquelle les États-Unis sont depuis 1949 ? « Jusqu’à présent, Donald Trump ne s’en est pas dégagé. Si, demain, il se dégageait de l’alliance, ce serait une étape supplémentaire qui justifierait que les Européens en fassent davantage pour leur propre sécurité » , a évacué François Hollande.
Le président « fait appel à notre unité »
Fort des négociations qu’il a dû mener avec Vladimir Poutine entre 2014 et 2015 au moment de la première crise ukrainienne, l’ex-chef de l’État pense que le président russe « a la perspective de prendre la totalité de l’Ukraine, soit par des voies directes - la guerre -, soit par des voies indirectes - la tutelle ». Avec l’objectif de « reprendre les frontières de l’Union soviétique ». Devant cette perspective, François Hollande demande aux dirigeants européens de « renforcer notre propre sécurité » et de « ne pas abandonner l’Ukraine » en lui « donnant ce qu’elle attend de nous » en termes d’équipements militaires.
L’occasion de saluer la rhétorique patriotique d’Emmanuel Macron, qui a voulu mercredi soir remobiliser les Français, parfois lassés de ce conflit qui dure depuis trois ans : « La patrie a besoin de vous. » « C’est le rôle du président de la République de faire appel à notre unité. La patrie, ce n’est pas simplement à participer à une opération militaire, c’est ce que nous avons de plus cher à défendre : c’est la démocratie, les libertés, le pluralisme. (…) Chaque citoyen doit se sentir investi de cette mission » , a martelé le socialiste, qui en a profité pour dénoncer l’« indulgence » des Insoumis, de la droite française et du RN à l’égard de la Russie pendant des années, jusqu’au début de la guerre en Ukraine.
Alors qu’Emmanuel Macron a invité les forces politiques et syndicales à faire des propositions pour financer l’effort de guerre - et faire monter le budget de la défense à 3 %, voire 3,5 %, du PIB -, François Hollande ne souhaite pas seulement « dépenser plus », il voudrait une « organisation » dans le cadre de l’Alliance atlantique « entre quelques pays » qui « nous mette en capacité d’agir » sur le plan militaire. « Ce que Trump et Poutine respectent, c’est la force, il faut montrer qu’on est capables d’utiliser la force, pas simplement de faire des accumulations de matériel militaire », a tonné l’ancien président, saluant le renouveau de l’ « idée européenne » à la faveur des tensions internationales. Celle qui « construit la paix » et « installe une défense suffisamment crédible et solide pour dissuader tout agresseur ».
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