Le projet de loi sur la "fin de vie", examiné à partir du 27 mai à l'Assemblée nationale, sera le texte-phare du calendrier parlementaire des prochains mois

( AFP / EMMANUEL DUNAND )
Après un long cheminement, le président de la République a livré dimanche, dans La Croix et Libération, ses arbitrages pour un "modèle français de la fin de vie": une "aide à mourir" qui permettra à certains patients, selon des "conditions strictes", de recevoir une "substance létale". Le projet a été salué lundi 11 mars par les partisans d'une "aide active à mourir" mais a indigné certains soignants, l'Église, la droite et l'extrême droite.
Quelle différence entre euthanasie, suicide assisté et aide active à mourir ? Décryptage des mots de la fin de vie.
• Euthanasie
Il s'agit d'un "acte destiné à mettre délibérément fin à la vie d'une personne atteinte d'une maladie grave et incurable, à sa demande, afin de faire cesser une situation qu'elle juge insupportable", selon la définition retenue par le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) dans un avis de 2013. Cela suppose donc l'intervention d'un tiers qui accomplit le geste fatal.
• Suicide assisté
Dans le langage commun, cela désigne ce que les spécialistes appellent en fait "assistance au suicide". À la différence de l'euthanasie, c'est la personne elle-même qui accomplit le geste. "L'assistance au suicide consiste à donner les moyens à une personne de se suicider elle-même. Dans ce cas, la personne réalise elle-même son suicide en absorbant un produit létal qui lui a été préalablement délivré", selon la définition du CCNE.
• Aide active à mourir
C'est le terme retenu par le président Emmanuel Macron, qui souhaite ouvrir cette possibilité dans un projet de loi qui sera présenté en avril. Le chef de l'État se refuse en revanche à parler d'euthanasie ou de suicide assisté.
En réalité, l'aide active à mourir peut désigner ces deux actes, car il s'agit d'un terme plus vague. Au vu des orientations annoncées par Emmanuel Macron, il s'agira de fait de légaliser une forme d'assistance au suicide dans des conditions strictement encadrées. En principe, ce sera en effet au patient de prendre seul la substance létale qui lui aura été prescrite.
Toutefois, la nouvelle loi devrait aussi laisser à un tiers -proche ou soignant- la possibilité d'administrer la substance létale si le patient n'est plus en mesure d'accomplir ce geste. Cela correspond à la définition stricte du "suicide assisté" : lorsqu'une personne veut se suicider mais n'en est pas physiquement capable. Et, à ce compte, "la différence est ténue avec la notion d'euthanasie", note le CCNE.
• Loi Claeys-Leonetti
C'est pour l'heure la loi qui encadre la fin de vie des malades incurables en France. Adoptée en 2016, après une première version en 2005, elle interdit l'euthanasie et le suicide assisté, mais permet une "sédation profonde et continue jusqu'au décès" dans des cas précis. Cette loi prévoit l'arrêt des traitements en cas "d'obstination déraisonnable" (ou acharnement thérapeutique) : si le patient le souhaite, les traitements peuvent être "suspendus" lorsqu'ils "apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie". Si le patient ne peut exprimer sa volonté, la décision doit être prise par les médecins de façon "collégiale".
• Sédation profonde et continue
Cela consiste à endormir définitivement les malades incurables et en très grande souffrance qui le souhaitent , si leur pronostic vital est engagé "à court terme" par leur maladie ou leur décision d'arrêter les traitements. Pour cela, on injecte au patient du midazolam en intraveineuse. Ce médicament de la famille des benzodiazépines est puissant. Avec l'arrêt simultané de l'hydratation et de l'alimentation, les spécialistes estiment que la mort survient aux alentours d'une semaine.
• Directives anticipées
Ce sont des instructions écrites permettant d'indiquer à l'avance ses volontés sur les décisions médicales à prendre au cas où on arrive en fin de vie et qu'on n'est plus capable de s'exprimer (accident, maladie grave...). Elles permettent de stipuler qu'on s'oppose à l'acharnement thérapeutique. Elles "s'imposent au médecin", selon la loi Claeys-Leonetti, qui leur a donné plus d'importance.
Les médecins peuvent toutefois passer outre si ces directives "apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale" de leur auteur. Une décision du Conseil constitutionnel a confirmé cette possibilité en 2022.
Et, telle qu'elle est présentée par Emmanuel Macron -qui a par ailleurs précisé avoir rédigé ses propres directives anticipées-, la future loi ne laissera par exemple pas à un patient atteint d'Alzheimer la possibilité de recevoir une aide à mourir, quand bien même il l'aurait demandé dans ses directives.
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