Les eaux usées sont "une ressource insuffisamment exploitée, forte de développements potentiels intéressants, mais sous le poids d'importantes contraintes techniques, réglementaires et socio-économiques", selon un rapport de 2022.

( AFP / EMMANUEL DUNAND )
Dans un contexte de changement climatique et de multiplication des sécheresses, la France prévoit de "lever en 2023 "les freins règlementaires à la valorisation des eaux non conventionnelles". Dans un arrêté, publié jeudi 28 décembre au Journal officiel, le gouvernement détaille les conditions de l'irrigation de cultures agricoles à partir d'eaux usées traitées au préalable dans des stations d'épuration.
Cet arrêté du gouvernement prescrit des mesures (traitement, stockage, distribution, surveillance) destinées à "garantir la protection de la santé publique, humaine et animale, et de l'environnement". Il est notamment précisé le niveau de qualité sanitaire que doivent atteindre, en fonction des cultures, ces eaux issues de stations d'épuration, aujourd'hui massivement rejetées dans le milieu naturel. Ce type d'irrigation devra faire l'objet d'une autorisation des autorités. Un arrêté du 14 décembre fixait un cadre similaire pour l'arrosage des espaces verts. Un autre texte est attendu par le secteur agroalimentaire qui compte réutiliser l'eau traitée dans les stations d'épuration des usines.
Après la sécheresse de 2022 et son cortège de restrictions, le plan eau présenté en mars par le gouvernement français prévoyait de lever en 2023 "les freins règlementaires à la valorisation des eaux non conventionnelles". Selon le Programme des Nations unies pour l'environnement, "seulement 11%" des eaux usées domestiques et industrielles sont intentionnellement réutilisées à l'échelle de la planète. Avec de grandes variations: moins de 1% en France, d'après le centre d'études sur l'environnement Cerema, et au moins 80% en Israël, principalement pour irriguer les cultures.
"Une ressources insuffisamment exploitée"
La Jordanie a été "l'un des précurseurs" en matière de réutilisation -ou "réut"- pour irriguer les cultures "dès la fin des années 1970 (...), avant que d'autres pays arabes s'y mettent", soulignait un rapport interministériel d'octobre. "Israël est aujourd'hui en pointe avec près de 50% des terres cultivées arrosées avec de l'eau recyclée (...). Peuvent être aussi cités Doha au Qatar, avec 245.000 m3 par jour de 'réut' destinés à l'irrigation, ou encore l'Italie avec des cultures maraîchères dans la région de Milan", selon ce rapport.
En France, l'un des premiers projets remonte aux années 1990 , porté par des cultivateurs de maïs semence et de betteraves de la plaine de Limagne, en Auvergne. Il permet d'irriguer 750 hectares à partir des eaux usées de Clermont-Ferrand.
La "réut" est "une ressource insuffisamment exploitée, forte de développements potentiels intéressants, mais sous le poids d'importantes contraintes techniques, réglementaires et socio-économiques", relevait en 2022 un rapport du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), qui dépend du ministère de l'Agriculture.
L'un des obstacles est son coût : l'eau d'irrigation issue des eaux usées traitées était alors estimée "entre 0,8 et 1 €/m3, contre 0,05 à 0,20 €/m3 pour une irrigation 'classique'". Le CGAAER ajoutait qu'il n'y avait pas de "solution miracle" face à la raréfaction de la ressource en eau et qu' il importait "déjà d'essayer de diminuer la demande en eau d'irrigation des cultures".
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