
Francois Bayrou lors de sa conférence de presse à Paris le 25 août 2025 ( AFP / Dimitar DILKOFF )
L'histoire se répète? Quatorze mois après la dissolution décidée par Emmanuel Macron au nom d'une nécessaire "clarification", François Bayrou dramatise les enjeux avec les mêmes mots pour se soumettre à un vote de confiance qui risque, lui aussi, de déboucher sur un désaveu cinglant.
La France traverse "un moment d'hésitation et de trouble" qui "impose une clarification", a déclaré lundi le Premier ministre lors d'une conférence de presse de rentrée. Cette "clarification" passera par un vote de confiance qu'il demandera à l'Assemblée nationale le 8 septembre pour valider le principe d'un effort de près de 44 milliards d'euros de réduction du déficit.
Le chef du gouvernement a, une fois de plus, dépeint un sombre tableau de la situation de "surendettement" de la France. Et il a pris l'opinion à témoin, en martelant sa "conviction inarrachable que les Français prendront conscience de la gravité de la situation" et "accepteront de participer à l'effort".
En juin 2024, le président de la République avait lui aussi surpris les Français, et justifié la dissolution de l'Assemblée au soir d'une sévère défaite de son camp aux élections européennes par la volonté de "clarification".
Le résultat est connu: un mois plus tard, les législatives anticipées aboutissaient à un paysage politique plus fragmenté que jamais, sans majorité, à l'origine de l'instabilité qui risque aujourd'hui d'emporter le gouvernement de François Bayrou comme celui, éphémère, de Michel Barnier à l'automne dernier.
"En dissolvant l'Assemblée, Emmanuel Macron demandait une clarification aux Français et à l'opinion de se mobiliser en sa faveur", souligne la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina.
"Pour le Premier ministre, le pari consiste plutôt à consolider sa base parlementaire et éviter que les députés du socle commun", cette fragile coalition du centre et de la droite qui soutient le gouvernement, "ne tirent contre leur camp", dit-elle à l'AFP, évoquant une "logique plus fidèle à la Ve République".
Le résultat est toutefois plus qu'incertain: les oppositions menacent toutes de voter contre la confiance, ce qui ferait tomber le gouvernement. Pour Anne-Charlène Bezzina, "ça dépendra du niveau des abstentions", mais "la dramatisation n'est pas forcément la meilleure technique pour obtenir du soutien parlementaire, surtout si les mesures du plan budgétaire ne changent pas".
-"Hara-kiri"-
"Cela semble être un hara-kiri" de la part de François Bayrou, tranche Mathieu Gallard, directeur de recherche à l'institut de sondage Ipsos.
Selon lui, "le président, il y a un an comme le Premier ministre aujourd'hui, pense pouvoir gagner des soutiens en dramatisant les enjeux, en prenant l'opinion à témoin".

Francois Bayrou lors de sa conférence de presse à Paris le 25 août 2025 ( AFP / Dimitar DILKOFF )
Mais "ça ne peut marcher que si on avance des pistes acceptables par l'opinion, au moins en partie", explique-t-il à l'AFP. Ce qui, au vu des sondages, n'est pas le cas des deux jours fériés supprimés ou du gel des prestations sociales et des pensions, les mesures phares du plan Bayrou concocté en concertation avec le chef de l’État.
La cheffe des Écologistes Marine Tondelier estime que la décision de François Bayrou est "de fait une démission". Et si le gouvernement tombe, les options du président Macron seront très réduites.
Soit il nomme un autre membre de son camp à Matignon, comme son fidèle ministre des Armées Sébastien Lecornu, mais ce sera "perçu comme une provocation" par les oppositions, estime Mathieu Gallard.
Soit il tente de nommer une personnalité de gauche comme Bernard Cazeneuve, ce qu'il n'avait pas voulu faire il y a un an, "mais c'est probablement trop tard" tant les positions se radicalisent à l'approche de la présidentielle de 2027, ajoute-t-il.
Une nouvelle dissolution, que la cheffe des députés du Rassemblement national Marine Le Pen a appelé de ses vœux, deviendrait peut-être inéluctable. Alors même qu'Emmanuel Macron, échaudé par l'échec de la précédente, a dit publiquement vouloir éviter d'y recourir.
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