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Au procès Péchier, la détresse des collègues de l'anesthésiste
information fournie par AFP 25/09/2025 à 17:43

Frédéric Péchier à la cour d'assises du Doubs, à Besançon, le 8 septembre 2025 ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Frédéric Péchier à la cour d'assises du Doubs, à Besançon, le 8 septembre 2025 ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Les décès inexpliqués survenus dans une clinique de Besançon ont traumatisé les collègues du docteur Péchier, a entendu jeudi la cour d'assises du Doubs, où l'ex-anesthésiste est accusé de 30 empoisonnements, dont 12 mortels, entre 2008 et 2017.

Lors de la troisième semaine de ce procès, la justice examine les deux premiers décès imputés à Frédéric Péchier, en octobre 2008 à la clinique Saint-Vincent.

L'accusation soupçonne l'ex-anesthésiste star d'avoir frelaté des poches de produits anesthésiants pour nuire à des collègues avec lesquels il était en conflit et faire valoir au passage ses talents de réanimateur.

Le premier décès, celui de Damien Iehlen, un homme de 53 ans victime d'un arrêt cardiaque en marge d'une opération, a affligé son anesthésiste, Catherine Nambot, décédée depuis, ont indiqué des témoins.

"Le docteur Nambot était bouleversée, je l'ai vue dans un état d'incompréhension", a rapporté devant la cour Delphine Ravily, à l'époque cheffe du service pharmacie à la clinique.

La médecin se reprochait d'avoir endormi un patient "stressé", imaginant alors qu'il avait pu succomber à un syndrome de tako-tsubo, un trouble cardiaque lié à une émotion intense.

- Neuf ans d'enfer -

Auditionnée elle-même dans le cadre de l'instruction en novembre 2017, cette médecin née en 1955 avait confié avoir "vécu un enfer pendant neuf ans" à la suite du décès de son patient, selon un compte-rendu lu à l'audience par la présidente Delphine Thibierge.

Lors d'une audition ultérieure, Mme Nambot avait expliqué que le décès de M. Iehlen, "c'était la première fois qu'il m'arrivait un tel événement au bout de ma seringue".

Une partie des dossiers du procès de Frédéric Péchier, le 8 septembre 2025, au tribunal de Besançon ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Une partie des dossiers du procès de Frédéric Péchier, le 8 septembre 2025, au tribunal de Besançon ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Mme Nambot avait ajouté que, lors de l'opération, Frédéric Péchier "était à la porte du bloc" et regardait l'électrocardiogramme du malade. "Ton patient est en asystolie" (une insuffisance des contractions du cœur), l'aurait avertie l'accusé.

"Et effectivement, mon patient était en asystolie." Frédéric Péchier s'était "précipité pour m'aider à le réanimer". En vain, avait-elle témoigné.

"Je voulais poursuivre la réanimation, je n'arrivais pas à accepter la mort de mon patient, il a fallu me prendre par la main pour sortir du bloc", avait-elle confié au magistrat instructeur.

La médecin, convaincue d'avoir anesthésié son patient dans les règles, ne pouvait pas comprendre comment des doses mortelles d'anesthésiant s'étaient retrouvées dans l'organisme de M. Iehlen.

Car "la malveillance ne venait pas à l'esprit", observe devant la cour Mme Ravily. "On essayait de trouver une explication rationnelle, médicale."

- "Des blagues" -

Le deuxième incident, quatre jours plus tard, impliquant Suzanne Ziegler, 74 ans, a également changé la carrière de Colette Arbez, son anesthésiste, née en 1948.

L'état de santé de cette dernière est "incompatible" avec un témoignage devant la cour, selon la présidente.

"Elle avait cette culpabilité du décès de ma mère", a déclaré au tribunal le fils aîné de Mme Ziegler, François, qui a rencontré Mme Arbez en 2001. "Elle fait partie des victimes du docteur Péchier, elle a lourdement payé cette affaire."

François Ziegler a rapporté que la culpabilité de Frédéric Péchier ne faisait pas de doute aux yeux de sa collègue.

"Pour elle, c'était quelqu'un de très intelligent, calculateur, froid, sombre, une sorte de folie. C'est la seule explication que l'on peut avoir", a-t-il dit. En outre, "il avait besoin d'argent, de travailler plus, elle me l'a dit".

Après le décès de Mme Ziegler, le docteur Arbez "n'était plus la même dame qu'on avait connue quelques années auparavant", a déclaré un ancien infirmier, Davy Gérôme. "On voyait qu'elle était souvent en panique, elle n'avait plus confiance en elle."

Lors d'auditions à partir de 2017, Mme Arbez avait confié: "J'étais atterrée, c'était mon premier cas de décès". "Je me suis fermée, j'ai gardé cela en moi, c'était très lourd", a lu la présidente du tribunal.

M. Gérôme a assuré avoir un jour entendu Frédéric Péchier dire à propos de sa collègue: "Elle devrait partir en retraite plus tôt, on va l'aider".

"J'ai entendu cette phrase, je l'ai d'abord prise à la rigolade, puis ça m'a heurté, ça m'a choqué", a-t-il lancé à la cour.

L'avocat de Frédéric Péchier,  Randall Schwerdorffer, le 8 septembre 2025 devant la cour d'assises du Tarn, à Besançon ( AFP / ROMEO BOETZLE )

L'avocat de Frédéric Péchier, Randall Schwerdorffer, le 8 septembre 2025 devant la cour d'assises du Tarn, à Besançon ( AFP / ROMEO BOETZLE )

Une petite phrase minimisée par la défense de Frédéric Péchier. "Dans tous les milieux professionnels, on fait tous des blagues un peu raides", a observé son avocat Randall Schwerdorffer.

Frédéric Péchier, qui a toujours clamé son innocence, comparaît libre, mais encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

Le verdict est attendu le 19 décembre.

1 commentaire

  • 18:03

    L'avocat de Frédéric Péchier, Randall Schwerdorffer, le 8 septembre 2025 devant la cour d'assises du Tarn, à Besançon ( AFP / ROMEO BOETZLE )

    Y a pas que des erreurs médicales !
    Mais l’erreur de géographie n’est pas mortelle heureusement !


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