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Comment fonctionne le marché de l’énergie en France?
Dernière mise à jour le : 03/05/2023

Les opérateurs historiques, les producteurs de gaz et le secteur des énergies renouvelables sont les grands gagnants de la crise énergétique. ( crédit photo : GettyImages )

Les opérateurs historiques, les producteurs de gaz et le secteur des énergies renouvelables sont les grands gagnants de la crise énergétique. ( crédit photo : GettyImages )

Les fonctionnements des marchés de l’électricité et du gaz sont complexes. Quelles sont les différences entre producteurs, fournisseurs et gestionnaires de réseaux ? Pourquoi les prix de l’énergie flambent autant et durablement depuis 2021 ? Au fond, à qui profite la crise ? Quelles sont les meilleures stratégies d’investissement dans un contexte si bouleversé ? Les réponses claires et indispensables à tous ces questionnements actuels.

Sommaire:

  • Les prix de l’énergie flambent depuis 2021
  • Des boucliers tarifaires instaurés par l’État pour protéger le pouvoir d’achat
  • Électricité et gaz: qui produit et qui fournit l’énergie?
  • Transport et distribution: le rôle des gestionnaires de réseaux
  • Les fournisseurs d’électricité et de gaz ouverts à la concurrence depuis 2007
  • Électricité: un marché européen impuissant à combler la demande
  • Marché de l’énergie bousculé: à qui profite la crise?

Les prix de l’énergie flambent depuis 2021

Les factures d’énergie flambent en Europe, et a fortiori en France. Les consommateurs cherchent à réduire leurs dépenses en électricité et en gaz. En même temps, l’ inflation a fait son retour (après quarante ans d’absence) à l’automne 2021. Elle s’est accentuée à partir du printemps 2022, lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, provoquant une crise de l’énergie. En effet, les importations de gaz russe, entre autres, ont diminué. À l’échelle européenne, cette crise s’est traduite par une explosion des prix de l’énergie sur les marchés financiers.

Selon le site gouvernemental vie-publique.fr, la France a vu ses tarifs s’envoler en matière d’énergie. Une publication en ligne actualisée le 2 janvier 2023 décrivait: «De 50 euros/MWh en début d’année 2021, le prix de gros est passé à 222 euros/MWh en décembre 2021. Au cours de l’été 2022, il a même atteint les 700 euros. Cette évolution a une répercussion sur la facture finale des consommateurs.» En effet, les fournisseurs augmentent leurs prix à mesure qu’ils subissent des augmentations, eux aussi. D’après l’Insee, en janvier 2023, les prix à la consommation ont augmenté en moyenne de 6% sur un an. Le même institut indiquait en septembre 2022 que les prix de l’énergie ont augmenté de 28% pour les ménages, entre les deuxièmes trimestres 2021 et 2022.

Cette hausse des tarifs s’explique notamment par la rareté des énergies. En effet, le parc nucléaire traverse une période d’indisponibilité historique, avec 27 des 56 réacteurs du territoire à l’arrêt pour maintenances et contrôles. L’hiver 2022 s’accompagne d’un risque important de pénurie.

Des boucliers tarifaires instaurés par l’État pour protéger le pouvoir d’achat

La hausse spectaculaire des prix de l’énergie a été contrainte par l’État. Ce dernier a mis en place des «boucliers tarifaires» pour protéger le pouvoir d’achat des Français. La première mesure du bouclier tarifaire a été le gel des tarifs réglementés du gaz à leur niveau d’octobre 2021. En règle générale, ces tarifs réglementés sont actualisés mensuellement. Selon une publication de septembre 2022 de l’Insee, ce gel a évité une hausse de 47% des tarifs réglementés entre octobre 2021 et juin 2022.

La seconde mesure gouvernementale a consisté en un plafonnement de l’augmentation des tarifs réglementés de vente de l’électricité lors de la révision de ces derniers, au 1er février 2022. Ces tarifs sont actualisés deux fois par an. Or, ils ont été augmentés de 4% seulement entre août 2021 et février 2022. Ils ont été stabilisés depuis cette date. Ceci se compare à une hausse de 35,4%, préconisée par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) en suivant la formule usuelle. La CRE est une autorité administrative indépendante. Elle veille au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz naturel.

À noter

Le chèque énergie remplace les tarifs sociaux de l’électricité et du gaz.

- des travaux de rénovation énergétique .

- une redevance en logement-foyer,

- une facture d’énergie,

Depuis le 1er janvier 2019, les ménages dont le revenu fiscal de référence annuel par unité de consommation est inférieur à 10.700 euros peuvent bénéficier du chèque énergie pour régler:

Électricité et gaz: qui produit et qui fournit l’énergie?

Parmi les principaux acteurs du marché de l’énergie figurent les producteurs et les fournisseurs d’énergie. Les producteurs d’électricité exploitent des centrales nucléaires ou thermiques classiques (au fioul, au gaz naturel, au charbon) et des sources d’énergies renouvelables (centrales hydrauliques, éoliennes, panneaux photovoltaïques). Selon le bilan électrique national du RTE (Réseau de Transport d’Électricité), l’électricité produite en France en 2021 provenait du nucléaire (69%), du thermique à combustible fossile (7%), de l’hydraulique (12%), de l’éolien (7%), du solaire (3%) et du thermique renouvelable et déchets (2%).

À noter

Les producteurs d’électricité sont français ou européens: en effet, les réseaux d’électricité sont reliés entre eux au sein de l’Union européenne, dans le cadre du marché intégré de l’énergie. Parmi eux, on peut citer EDF ou Engie en France, RWE en Allemagne, Enel en Italie ou Iberdrola en Espagne.

Concernant le gaz, les producteurs exploitent des gisements souterrains de gaz naturel aux quatre coins du monde. Les principaux pays producteurs de gaz mondiaux sont la Russie, les États-Unis, le Canada, le Qatar, l’Iran et la Norvège. Le gaz extrait est transporté par gazoduc ou par des méthaniers, jusqu’aux pays importateurs.

Selon le ministère de la Transition écologique, en 2020, le gaz consommé dans l’Hexagone provenait de Norvège (36%), de Russie (17%), des Pays-Bas (8%), d’Algérie (8%), du Nigéria (7%) et du Qatar (2%). Depuis la guerre opposant la Russie et l’Otan en Ukraine, l’Union européenne compense la perte de gaz russe par l’importation de gaz américain.

À noter

Les plus grosses entreprises de production d’hydrocarbures (dont le gaz) sont les américaines ExxonMobil et Chevron, la britannique BP, l’anglo-néerlandais Shell, le français TotalEnergies ou l’algérien Sonatrach.

Transport et distribution: le rôle des gestionnaires de réseaux

Pour que l’énergie produite parvienne jusqu’aux domiciles des Français (et aux entreprises), il faut l’acheminer, puis la distribuer. Concernant le transport, les gestionnaires exploitent les «autoroutes» de l’énergie, ayant pour fonction de répartir l’énergie dans toute la France: RTE pour l’électricité et de GRTGAZ pour le gaz (TEREGA pour le Sud-Ouest).

Pour la distribution, les gestionnaires finalisent la répartition de l’énergie entre les communes et entre les habitations via les «départementales» de l’énergie. Il s’agit d’Enedis pour 95% de l’électricité, et de GRDF pour 95% du gaz. Dans les deux cas, les 5% restants sont gérés par des sociétés de distribution locales.

L’activité des gestionnaires de réseaux est régulée: les conditions d’accès et les prix sont fixés par les pouvoirs publics sur recommandation de la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

À noter

Les gestionnaires exploitent, entretiennent et développent les réseaux. Ils ont pour mission de garantir un niveau élevé de qualité et de sûreté. Ainsi, quel que soit votre fournisseur d’énergie, vous disposez de la même qualité d’énergie.

Les fournisseurs d’électricité et de gaz ouverts à la concurrence depuis 2007

Les fournisseurs d’énergie achètent l’électricité et/ou le gaz produit par les producteurs d’énergie sur les marchés «de gros», avant de la revendre «au détail» aux consommateurs. Le fournisseur facture aux consommateurs ce service de fourniture d’énergie.

Pendant longtemps, la France a maintenu un monopole d’État sur les énergies électriques et gazières. Les deux entreprises nationales, EDF et GDF, étaient les seules à pouvoir produire et distribuer leurs énergies respectives. L’État en fixait les tarifs. Les règles européennes ont profondément changé la donne. Le processus de libéralisation du marché a commencé en 1996 pour l’électricité et en 1998 pour le gaz, dans le sillage des directives européennes. Il a d’abord concerné les industriels, puis s’est déployé à l’ensemble des consommateurs. En France, le marché de l’énergie est totalement ouvert à la concurrence depuis le 1er juillet 2007.

À noter

Depuis 2000, les activités de production, de transport et de distribution sont séparées. Dans ce cadre, RTE s’occupe du transport de l’électricité depuis les centres de production sur les lignes à très haute tension jusqu’aux réseaux de distribution. Enedis (ex-ERDF) se charge de la distribution à moyenne et basse tension pour les autres clients (particuliers, entreprises, collectivités…) sur 95% du territoire métropolitain. EDF produit et vend l’électricité aux clients.

Depuis cette ouverture à la concurrence , les fournisseurs non historiques sont appelés fournisseurs alternatifs. Ils sont entrés sur le marché de détail de l’électricité. Leurs contrats sont «en offre libre»: ni les prix ni les modalités ne sont réglementés. EDF et Engie sont les fournisseurs historiques d’électricité et de gaz en France. Ils conservent toujours une position dominante, même si leur part de marché a diminué. Selon la lettre d’information de la CRE de juillet 2022, «au 31 décembre 2021, 12 millions de sites résidentiels sur un total de 33,8 millions (soit 35,5%) sont en offre de marché en électricité». Autrement dit, 64,5% des ménages étaient encore clients des tarifs réglementés de l’électricité, soit le Tarif Bleu d’EDF.

En effet, les opérateurs historiques continuent de pratiquer des tarifs réglementés, fixés par les ministres en charge de l’Économie et de l’Énergie. Ces tarifs sont révisables périodiquement, après avis de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Ainsi, la CRE doit proposer au gouvernement des tarifs réglementés de vente reflétant les coûts d’approvisionnement. La plupart du temps, ces tarifs sont validés par les ministères. Toutefois, en 2022, la loi de finances a autorisé le gouvernement à s’opposer aux propositions tarifaires de la CRE, à titre exceptionnel. En raison de la crise énergétique, la hausse était limitée à 4%.

À savoir

Cette opération est chiffrée à 9,7 milliards d’euros. Elle vise à accélérer les projets indispensables à notre avenir énergétique, notamment concernant la mise en œuvre du programme du nouveau nucléaire et le déploiement des énergies renouvelables en France.

Face à la crise énergétique, l’État français a décidé en octobre 2022 de renationaliser EDF. Il en détenait 84%. L’Autorité des marchés financiers (AMF) a donné son feu vert en novembre 2022 au projet de rachat complet de l’énergéticien. En janvier 2023, l’État détenait 90% du capital.

Pendant des années, les fournisseurs alternatifs, comme Cdiscount Energie, Ohm Energie, ou Direct Energie ont cassé les prix. Dans le même temps, ils proposaient aux clients une meilleure maîtrise de leur consommation d’énergie. Toutefois, la crise énergétique actuelle a enrayé la tendance. Ces derniers mois, plusieurs acteurs du secteur se sont retirés du marché: E.Leclerc énergies, Oui Energy… Hydroption a été placé en liquidation judiciaire. Désormais, nombre de Français retournent chez les opérateurs historiques pour protéger leur portefeuille et profiter du bouclier tarifaire en place.

À noter

Les consommateurs dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kVA peuvent résilier leur contrat et changer d’offre ou de fournisseur à tout moment, sans frais, et sans coupure de fourniture.

Électricité: un marché européen impuissant à combler la demande

L’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence s’est inscrite dans une dynamique européenne. Le but était de créer un marché commun de l’énergie, appelé marché intérieur de l’électricité ou marché intégré de l’électricité. Ce marché unique européen aurait pu garantir une sécurité d’approvisionnement de l’énergie à un prix abordable pour tous les consommateurs. Le contexte prévu était celui du respect de la protection de l’environnement et de la promotion d’une concurrence saine sur le marché européen de l’énergie. Toutefois, la situation actuelle nuit au bon fonctionnement de ce marché intégré. La demande des consommateurs est croissante tandis que l’offre chute.

Pour comprendre comment les prix de gros de l’électricité évoluent et pourquoi ils ont tant augmenté récemment, il faut connaître le fonctionnement du marché européen intégré de l’électricité. Chaque jour, un prix de gros de l’électricité est fixé en fonction du coût marginal de l’électricité, c’est-à-dire en fonction du coût de production de la dernière centrale utilisée pour satisfaire la demande. Ainsi, les sources de production les moins chères sont appelées en premier: les énergies renouvelables et le nucléaire. À mesure que la demande d’électricité augmente, les centrales à charbon sont sollicitées. En dernier lieu, l’approvisionnement provient des centrales à gaz, dont les coûts de production sont les plus élevés.

À retenir

En période de forte demande et d’offre réduite d’énergie, les prix de l’électricité sont en réalité déterminés par ceux du gaz. Or, leurs cours atteignent des records historiques sur fond de tensions internationales.

Marché de l’énergie bousculé: à qui profite la crise?

Les prix de l’électricité sur le marché européen atteignant des sommets, les consommateurs paient le prix fort, directement ou indirectement. Ceux ayant souscrit des offres de marché ont vu leurs factures grimper. Ceux restés ou revenus aux offres à tarif réglementé ont pu bénéficier du bouclier tarifaire mis en place par l’État. Cela représente une aide publique chiffrée à 15 milliards d’euros.

À l’inverse, les acteurs importants du marché de l’électricité sont gagnants. Ils profitent des faillites en cascade des petits opérateurs (le danois Barry, Bulb, E.Leclerc énergies…) asphyxiés par les conditions de marché. En effet, les fournisseurs alternatifs ont été contraints de répercuter les hausses de prix sur les factures de leurs clients, lesquels ont rompu leurs contrats. Les consommateurs rejoignent notamment EDF et Engie pour leurs tarifs réglementés et plafonnés par l’État. Les deux gagnent des parts de marché depuis la crise énergétique. Ainsi, dans un communiqué de presse publié le 21 février 2023, Engie annonçait un résultat opérationnel de 9 milliards d’euros sur 2022. Engie est le premier fournisseur de gaz en France.

Les producteurs de gaz américains profitent également d’un effet d’aubaine. Les États-Unis deviennent les premiers fournisseurs de gaz de l’Europe, devant la Russie. En 2022, la valeur moyenne d’une cargaison est passée de 50 millions à 80 millions de dollars. Selon le GIIGNL (International Group of Liquefied Natural Gas Importers), les exportations américaines de GNL vers l’Europe atteignent environ 30 milliards de dollars au premier semestre de 2022. La flambée des prix fait exploser les marges des producteurs, TotalEnergies en tête. Dans son communiqué de presse du 8 février 2023, le groupe pétrolier a annoncé 20,53 milliards de dollars de bénéfice net sur l’année 2022. 2021 était déjà une année record, avec 18 milliards d’euros de profits pour le groupe.

Par ailleurs, les déséquilibres commerciaux provoqués par la reprise économique post-Covid ont fait flamber les prix du fret maritime. D’après le Drewry World Container Index, en 2021, les prix ont en moyenne quadruplé (ils ont parfois décuplé sur certaines lignes est-ouest) pour les conteneurs standards de 40 pieds. Le transporteur maritime français CMA CGM, 3e mondial du secteur, a ainsi engrangé des bénéfices historiques. Selon ses chiffres publiés en novembre 2022, le troisième armateur mondial accumulait un chiffre d’affaires de 19,9 milliards de dollars au troisième trimestre de la même année.

Investir dans les énergies renouvelables

Néanmoins, face aux enjeux climatiques de notre monde, de plus en plus d’investisseurs souhaitent flécher leur épargne vers des secteurs dits «verts». L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a estimé que l’année 2021 a connu un déploiement inédit des capacités électriques renouvelables dans le monde. 290 gigawatts (GW) de capacités nouvelles ont été installés. Quelque 4.800 GW d’installations devraient être disponibles d’ici à 2026. Cela représente une hausse de 60% par rapport à 2020 et des capacités équivalentes à celles du nucléaire et des énergies fossiles. La Chine reste le leader mondial du déploiement des énergies renouvelables. À l’avenir, la région Asie-Pacifique pourrait dominer le marché. Parmi les autres plus gros producteurs d’énergies renouvelables figurent les États-Unis, le Brésil, le Canada, la Russie, la Norvège et l’Allemagne. Plusieurs grands acteurs mondiaux de référence se distinguent, comme l’américain First Solar, le danois Vestas Wind, le canadien Canadian Solar ou encore le chinois Jinko Solar. Ce dernier est le plus grand fabricant de panneaux solaires depuis 2016.

La crise énergétique actuelle profite principalement aux opérateurs historiques, aux producteurs de gaz, aux transporteurs maritimes et au secteur financier. Investir dans ces secteurs semble être un bon moyen de profiter des mannes financières que les entreprises de ces secteurs dégagent. La plupart d’entre elles reversent des dividendes records aux actionnaires, particulièrement en France. Selon l’étude trimestrielle réalisée par le gérant Janus Henderson, les dividendes versés par les grandes entreprises ont atteint un niveau record de 44 milliards d’euros sur le seul deuxième trimestre de 2022 en France. Dans le monde, ces versements représentent 544 milliards de dollars, tirés par l’énergie, la banque et l’automobile.