les vols à la souris, une plaie pour se faire indemniser
Ces vols sans effraction, commis en hackant les systèmes électroniques des voitures, se multiplient. Les assureurs rechignent à rembourser les victimes.
C'est la double peine : se faire voler sa voiture et essuyer un refus de remboursement de son assureur. En cause, l'absence d'effraction qui pousse certaines compagnies d'assurances à priver les propriétaires d'indemnisation, bien qu'ils soient assurés contre le vol.
Même si aucun chiffre officiel n'existe, le phénomène des vols sans effraction prend de l'ampleur.
Piratage des clés et des circuits internes
« En cinq ans, la part des vols sous la menace d'une arme, par effraction au domicile ou dans le garage est passée dans nos statistiques de 50% à moins de 20% », observe Marc Verdet, fondateur de Traqueur, spécialisé dans les solutions de géolocalisation de véhicules disparus. A contrario, celle des vols dits à la ruse grimpe en flèche, passant de 30% à plus de 70%. En particulier les vols à la souris : les hackeurs s'introduisent en douce dans les voitures grâce à un ordinateur ou à un équipement électronique portable qui permet de pirater les clés électroniques d'ouverture de porte ou les circuits internes des véhicules.
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« Le rôle de l'expert, si le véhicule a été retrouvé, est donc primordial, estime Pascal Jusselme, directeur du service client de BCA Expertise, qui emploie près de 580 experts (et dont plusieurs actionnaires sont des compagnies d'assurances). Il peut lancer des diagnostics pour vérifier par exemple que des puces ont bien été reprogrammées, afin de confirmer s'il s'agit bien d'un vol. » Problème : prouver qu'un programme ou un circuit électronique a fait l'objet d'une manipulation extérieure est difficile.
Certaines victimes ont alors toutes les peines du monde à prouver leur bonne foi. « Dans ce cas, reprend Pascal Jusselme, si certaines d'entre elles n'arrivent pas à se faire rembourser, c'est que leur contrat d'assurance ne couvre pas le vol sans effraction. » C'est là que le bât blesse : la plupart des compagnies d'assurances n'ont pas adapté leurs contrats.
« C'est vrai que nous subissons de plus en plus ces nouvelles techniques de vol, admet Floréal Sanchez, chargé de mission au groupe Macif, premier assureur auto de France avec près de 6 millions de contrats. Ces pratiques datent de quelques années à peine et il faut que nos experts puissent les maîtriser. Nous sommes en cours de réflexion pour adapter dans le futur nos contrats aux évolutions technologiques. »
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Des assureurs n'hésitent pas à inclure des clauses excluant la prise en charge en cas d'absence de preuve d'effraction. « Ils les utilisent pour refuser d'indemniser leurs clients, alerte Me Laurent Mercié, qui a défendu plusieurs propriétaires de véhicules volés. Toutes ces clauses doivent être, à terme, considérées comme abusives. C'est d'ailleurs ce qu'a reconnu la cour d'appel de Paris en septembre dernier, exigeant in fine de l'assureur qu'il indemnise son client, malgré l'absence de ces fameuses preuves. » L'avocat espère ainsi que cela poussera les compagnies d'assurances encore réfractaires à changer leurs conditions générales de vente.