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Le groupe Soufflet sème aux quatre coins du monde
Par Valerie Froger | 07/10/13 | 06:00
Le groupe agro-industriel, spécialisé dans la collecte et la transformation de céréales, réalise 54 % de son chiffre d'affaires à l'export. Le résultat d'une stratégie de longue date, impulsée il y a plus de cinquante ans.
Plus de 4.000 salariés, un chiffre d'affaires de 4,7 milliards d'euros, 42 usines dans le monde
Voilà des chiffres à faire tourner la tête. Et pourtant, le groupe Soufflet est comme la plupart des entreprises familiales : discret et peu loquace sur ses performances. Son actuel président du directoire, Jean-Michel Soufflet, préfère jouer la carte de l'humilité pour expliquer la pérennité de l'entreprise créée par ses arrières grands-parents. « C'est le fruit de décennies de travail et d'une logique industrielle à long terme fondée sur la volonté d'être présent sur l'ensemble de la filière des céréales, de la collecte à la transformation. C'est notre socle historique », explique le dirigeant, qui a pris la succession de son père en 2001.
Car Soufflet, c'est avant tout l'histoire d'une famille, qui commence en 1900 à Nogent-sur-Seine, en Champagne. Au départ, c'est une simple graineterie gérée par Pierre et Lucie Juchat. En 1927, ils passent la main à leur fille Yvonne et son mari, Jean Soufflet, qui développent la collecte de céréales auprès des agriculteurs. La petite affaire tourne bien, mais la collecte reste locale, dans un rayon de 20 kilomètres autour de Nogent. Le changement d'échelle est réellement opéré dans les années 1960 avec l'arrivée aux commandes de Michel Soufflet. « Mon père a tout de suite eu l'ambition de développer les ventes à l'international mais il lui manquait l'outil industriel pour le faire. Il a fait construire un silo portuaire à Rouen pour développer les exportations de céréales, d'abord vers les pays de la Communauté européenne puis vers les pays tiers », raconte Jean-Michel Soufflet. Un pari coûteux - il mettra plus deux ans à obtenir son crédit de 900.000 francs - mais finalement payant : en quelques mois, 194.000 tonnes d'orge et de blé sont exportées dans les pays limitrophes. Fort de cette réussite, le groupe décide d'aller plus loin et de poser ses premières bases à l'étranger, en créant des filiales en Grande-Bretagne, en Italie et aux Pays-Bas. Cette stratégie opportuniste sera la bonne. En 1980, Soufflet devient le troisième exportateur français de céréales et commence à faire de l'ombre sur la scène internationale à des mastodontes du secteur comme Cargill ou Dreyfus.
Ces premières conquêtes européennes se sont faites en parallèle d'une structuration des métiers de l'entreprise. Devenu premier collecteur privé de céréales en France, le groupe se tourne dès les années 1980 vers la transformation pour valoriser sa collecte et pousser ses pions sur l'échiquier du commerce international. Il scinde ses activités en plusieurs pôles : agriculture, négoce, malterie, meunerie
aujourd'hui Soufflet opère dans 8 métiers (*).
Cap à l'Est
S'ensuit une série de rachats, en France et à l'étranger, avec par exemple l'acquisition du meunier belge Ceres en 1989, du malteur tchèque Tchecomalt en 2002 et plus récemment, en 2011, de la branche malterie de Kamenitza AD, filiale du groupe StarBev en Bulgarie. En 1998, Soufflet fait même construire une malterie en Russie, à Saint-Pétersbourg. Il y a bien sûr eu des erreurs dans cette quête éperdue de nouveaux débouchés ainsi que des retournements de marché. La Libye, par exemple, fut un temps le premier débouché mondial pour la farine, mais le pays s'est équipé de moulins et est aujourd'hui en mesure d'exporter. Même chose pour l'Egypte, le Maroc ou la Syrie. Quant à la Turquie, c'est un autre problème, qui n'est pas sans irriter Jean-Michel Soufflet. Le pays, qui importe ses blés, est devenu le deuxième exportateur mondial de farine. « Bien que membre de l'OMC, il pratique un dumping sur le marché grâce à des aides gouvernementales déguisées. Nous aimerions que les pouvoirs publics français réagissent et dénoncent ce type de pratiques. Mais, malheureusement, on se sent bien souvent très seuls ! », s'insurge le dirigeant.
Ces conflits ne freinent pas pour autant l'élan du groupe qui continue les opérations de croissance externe. Son indépendance financière et le réinvestissement systématique des bénéfices dans l'entreprise - les trois actionnaires familiaux ne se versent aucun dividende - lui permettent de financer une partie de ces investissements.
Vers les pays émergents
En homme prudent, Jean-Michel Soufflet a néanmoins contracté un emprunt obligataire de 100 millions d'euros en 2012. « Nous avons souhaité diversifier nos sources de financement pour développer des projets de croissance, notamment hors d'Europe », indique-t-il. Car les projets vont bon train dans les pays émergents, particulièrement dans la malterie. En 2012, le groupe a racheté une malterie au Brésil et une implantation en Inde est dans les tuyaux. « En Europe de l'Ouest et aux Etats-Unis, les marchés sont matures. La situation dans les pays moins développés est nettement plus porteuse, du fait de la croissance du marché de la bière. En Inde, les accords ne sont toujours pas conclus : ce pays, organisé en Etats fédéraux, est difficile d'accès, culturellement très différent, voire dangereux », raconte Jean-Michel Soufflet.
Reste l'Afrique et l'Asie, des marchés potentiellement tentants pour le groupe. Mais, là encore, Jean-Michel Soufflet ne démord pas de sa ligne de conduite. « Nous ciblons les pays où il faut organiser des filières agricoles, en cherchant à accompagner nos clients brasseurs dans leur développement. Nous apportons ainsi un savoir-faire dans la structuration de la filière. » Un leitmotiv qui dure depuis bientôt plus de cent treize ans.
Valérie Froger
Les chiffres
4,7 milliards d'euros
de chiffre d'affaires, dont 38 % en agriculture, 27 % en négoce, 16 % en malterie, 11 % en meunerie et 8 % pour les autres métiers.
54 % du chiffre d'affaires à l'export
Fortement présent en Europe et en CEI, le groupe Soufflet s'implante depuis 2012 dans les pays émergents. Il possède 42 usines dans 17 pays.
5 Nombre de malteries
Cinq malteries acquises en 2012, soit 225.000 tonnes de capacité de production supplémentaire.