Le sneaker, nouveau levier de croissance des marques de luxe

information fournie par Reuters •24/05/2018 à 17:20

    par Giulia Segreti
    MILAN, 24 mai (Reuters) - Le sneaker est devenu le nouveau
levier de croissance des grands noms du luxe comme Gucci (Kering
 PRTP.PA ), Prada  1913.HK  ou Chanel, les plaçant en
concurrence directe avec les spécialistes de secteur, Nike
 NKE.N , Puma  PMUG.DE  et Adidas  ADSGn.DE .
    Les baskets tirent maintenant les ventes de chaussures de
luxe et ce segment connaît la plus forte croissance de
l'industrie de la mode, observe le cabinet comptable EY.
    "Nous avons à faire à des clients très spécialistes du sujet
et nous investissons beaucoup dans cette catégorie de produits",
a déclaré Paul Andrew, styliste de Salvatore Ferragamo
 SFER.MI , lors d'une conférence.
    Les ventes mondiales de chaussures de sport ont grimpé de
10% à 3,5 milliards d'euros l'an dernier, dépassant celle de 7%
enregistrée par les sacs à main, selon le consultant Bain & Co.
    "Ce n'est même plus une tendance mais une catégorie", selon
Bruce Pask, directeur du prêt-à-porter masculin de la chaîne de
grands magasins américaine Neiman Marcus.
    Les groupes du luxe et les équipementiers sportifs tentent
tous de tirer profit de l'engouement pour des chaussures dont le
prix de départ, dans le haut de gamme, peut atteindre 400
dollars et grimper jusqu'à 3.000 dollars pour une paire en cuir
signée Christian Louboutin.
    Quant aux éditions limitées, elles peuvent facilement
dépasser les 10.000 dollars, comme la Chanel X Pharrell Hu Race
Trail ou encore l'Air Jordan 3 Retro DH Khaled Grateful de Nike.
    L'ascension du sneaker tient à l'influence croissante
qu'exerce la mode du "streetwear" et le style décontracté. Il
est ainsi devenu de bon goût de marier chaussure de sport et
complet veston sur mesure.
    
    STYLE NEO-URBAIN
    Les grandes marques ont toutes investi le style néo-urbain
pour rafraîchir leur offre et satisfaire l'appétit des
"millenials" âgés de 18 à 35 ans, qui comptent déjà, selon Bain,
pour un tiers du marché du luxe.
    Emilio Macellari, directeur général de l'italien Tod's
 TOD.MI , qui fut un pionnier en lançant son premier sneaker de
luxe Hogan en 1986, estime qu'il "n'y a aucune marque qui ne
réfléchisse pas à l'heure actuelle à son offre de sneakers".
    En plus de la concurrence habituelle de leurs pairs, les
griffes de luxe doivent maintenant affronter les marques de
sportswear, ajoute-t-il.
    Cette "sneakerisation" risque de détourner la clientèle des
modèles plus traditionnels et plus formels.
    "Après plusieurs saisons passées dans des chaussures
confortables, il sera difficile pour les femmes de porter à
nouveau des talons", dit Federica Montelli, responsable de la
mode de la chaîne de grands magasins italienne La Rinascente.
    Les équipementiers sportifs affichent quant à eux une
certaine sérénité face à cette nouvelle concurrence.
    "Si le luxe va vers le sport (...) ce ne peut être que
positif", note Bjorn Gulden, président du directoire de Puma.
 PUMG.DE . "Si c'est une tendance porteuse pour le marché, tant
mieux".
    Pour les analystes, cette concurrence accrue ne devrait pas
peser sur les marges car le marché est en pleine expansion. 
    "Les prix peuvent encore largement monter", note Erwan
Rambourg (HSBC). "Il se peut même que le passage de la chaussure
de sport par la case luxe ait un impact positif sur les marges".
     

 (Avec Melissa Fares à New York, Emma Thomasson à Berlin, Sarah
White à Venise, Claudia Cristoferi à Milan et Sonya Dowsett à
Madrid,
Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Pascale
Denis)