alstom Norske Coradia Nordic (crédit photo : Alstom / Creative and Advanced Design )
«Whatever it takes!» Cela rappelait les mots de Mario Draghi, en pleine crise de la zone euro. Henri Poupart-Lafarge, le président d'Alstom, a à son tour clamé, en anglais, avec son fort accent français, qu'il ferait «tout ce qui s'avérerait nécessaire» pour redresser la situation financière de son groupe. Le mal à soigner est l'affaiblissement du bilan qu'alimente une capacité défaillante à générer du cash-flow libre. Alstom a annoncé le mercredi 15 novembre «un plan global», à la fois de réorganisation de la gouvernance, de réduction des coûts, à travers notamment la suppression de 1.500 postes administratifs dans le monde, et de renforcement de son bilan, avec augmentation de capital à la clé.
Le groupe n'est pas dans une posture critique, comme pourrait le faire penser l'effondrement du titre, supérieur à 50% sur les trois derniers mois. A moyen terme, son carnet de commandes de 90 milliards d'euros lui assure des ventes de 38 à 40 milliards sur les trois années qui viennent. L'enjeu est de maintenir la qualité d'investment grade (le premier choix) que les agences de notation ont commencé à remettre en question. Une distinction stratégique dans un secteur ferroviaire à cycles longs, pour continuer à obtenir des financements durables bon marché.
Capital augmenté, dividende supprimé
Le plan annoncé pénalise le titre dans un premier temps, à travers le renoncement à un dividende pour l'exercice en cours et la possibilité, cette fois mentionnée officiellement, d'une augmentation de capital, assortie d'un droit de préemption, une perspective qui pèse mécaniquement sur les cours.
L'objectif est de renforcer le bilan de 2 milliards d'euros qui réduiront d'autant l'endettement net. Celui-ci a atteint 3,4 milliards d'euros au 30 septembre, contre 2,1 milliards six mois plus tôt, sans pour autant que le groupe soit confronté à des problèmes de liquidités, les sommes disponibles au 30 septembre atteignant 3,6 milliards.
L'éventuelle émission d'actions est présentée comme le solde restant à financer après qu'auront été épuisées les autres solutions envisagées, à savoir des cessions d'actifs (de 500 millions à 1 milliard d'euros espérés) et des émissions de titres de quasi-capital et assimilés.
Au-delà des craintes de dilution, on sent aussi beaucoup de fébrilité autour de la valeur de la part des investisseurs, qui s'interrogent sur la qualité du management. En juillet, tout allait bien, et la trésorerie était annoncée positive. Trois mois plus tard, on est dans le rouge. Après un cash-flow négatif de 1,1 milliard au premier semestre (au 30 septembre), l'anticipation d'une trésorerie libre «significativement positive» s'est transformée en un flux prévisionnel qui devrait finalement être dans le rouge de 500 à 700 millions!
Mitraillés de questions sur le sujet lors de la présentation des comptes, les dirigeants ont mis en avant une augmentation inattendue du besoin en fonds de roulement sur plusieurs plans: des stocks en forte hausse pour accumuler les composants nécessaires à la montée en cadence dans les usines (la production de voitures augmente de plus de 10% par an), un calendrier de réception des acomptes sur contrats chahuté et, enfin, le décalage dans le temps du programme Aventra de 443 trains suburbains au Royaume-Uni, hérité de Bombardier.
Bons fondamentaux
Le défaut d'anticipation a été admis à demi-mot par les dirigeants, qui ont évoqué une certaine volatilité du modèle d'affaires d'Alstom, reposant sur de forts encaissements périodiques d'acomptes qui, s'ils sont remis en question ou décalés, génèrent des écarts entre prévision et réalisation. Sera cependant mise en œuvre une refonte du système de pilotage de la trésorerie.
Concernant l'activité et les résultats, les performances sont à la hauteur, et c'est sur cette base que nous maintenons notre conseil d'achat, dans un environnement de marché du ferroviaire qui reste favorable. Le groupe confirme pour l'exercice un ratio book-to-bill (prises de commandes sur facturations, qui donne la mesure du renouvellement du chiffre d'affaires) supérieur à 1. L'activité devrait croître de 5% à données comparables, avec une marge d'exploitation voisine de 6%. A noter que les ventes à marge zéro héritées des contrats de Bombardier vont continuer à reculer, de 1,7 milliard attendu sur l'exercice en cours à 1 milliard en 2024-2025.
Nous sommes toujours à l'achat sur la valeur mais à titre spéculatif. A présent que l'éventualité d'une augmentation de capital est intégrée, le potentiel de baisse semble largement consommé.
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