* Abdelhakim Dekhar s'était fait oublier pendant 15 ans * Des fréquentations à l'extrême gauche en 1994 * Presse et capitalisme, ses cibles revendiquées en 2013 * Entre affabulation et revendication politique par Emmanuel Jarry PARIS, 17 novembre (Reuters) - Deux décennies après sa condamnation à quatre ans de prison dans le procès des amants "tueurs de flics" Rey-Maupin, dont il ne fut qu'un comparse, Abdelhakim Dekhar revient devant la cour d'assises de Paris en prévenu vedette mais garde son mystère. Cet homme de 52 ans, qui serait d'allure anodine si son front dégarni, ses cheveux gris mi-longs et frisés, ses lunettes rondes et son épais chandail ne lui donnaient un look d'intello, est jugé depuis vendredi matin pour tentatives d'assassinat. Il lui est reproché d'avoir menacé le 15 novembre 2013 des journalistes et un agent de sécurité de BFM TV avec un fusil à pompe, blessé grièvement trois jours plus tard un photographe dans le hall du quotidien Libération et tiré le même jour sur les locaux de la Société générale à la Défense, près de Paris. Il avait ensuite contraint sous la menace un automobiliste à le conduire sur les Champs-Elysées et n'avait été arrêté que le 20 novembre 2013, sur dénonciation d'un ami. Sébastien Simonian-Lemoine, âgé maintenant de 36 ans, avait mené les policiers jusqu'à un parking de Bois-Colombes (Hauts-de-Seine) et à la voiture de sa soeur, dans laquelle ils avaient trouvé Abdelhakim Dekhar dans un semi-coma médicamenteux. Le procureur François Molins a fait état le lendemain d'une lettre non datée dans laquelle Abdelhakim Dekhar dénonçait "un complot fasciste", le capitalisme et la gestion des banlieues. Le prévenu y accusait aussi les médias de "participer à la manipulation des masses" et les journalistes d'être "payés pour faire avaler aux citoyens le mensonge à la petite cuiller". Sébastien Simonian-Lemoine, qui avait hébergé Abdelhakim Dekhar, a avoué que celui-ci lui avait dit vouloir mettre fin à ses jours, éventuellement en se faisant tuer par la police. Aujourd'hui sous contrôle judiciaire et employé comme contrôleur de gestion, il est pour sa part jugé pour recel de malfaiteur et destruction de preuves. ÉQUIPÉE SAUVAGE Né à Algrange, en Moselle, Abdelhakim Dekhar vivait depuis 15 ans en Grande-Bretagne, où il a notamment travaillé à Londres dans la restauration et comme agent d'entretien et a rencontré la mère de ses deux enfants, dont il est séparé depuis 2008. Il était revenu en France trois mois et demi avant les attaques de novembre 2013. Mais il était en réalité connu depuis 1994 par la police et la justice. Cette année-là, il côtoyait un couple d'étudiants marginaux, Audry Maupin et Florence Rey, avec lesquels il fréquentait les milieux d'extrême gauche, anarchistes et alternatifs. C'est lui qui achète un des fusils à pompe utilisés par les deux jeunes gens un soir d'octobre 1994 quand ils attaquent la pré-fourrière de Pantin pour voler des armes. L'équipée vire au massacre : dans leur fuite, Maupin et Rey tuent trois policiers et un chauffeur de taxi, blessent trois autres policiers et deux passants. Maupin est lui-même abattu. Florence Rey désignera Abdelhakim Dekhar comme étant le troisième homme de l'attaque de Pantin, chargé de faire le guet. Ce que le surnommé "Toumi" niera avec constance, tout en dénonçant des militants d'extrême gauche qui seront innocentés. Il ne sera finalement condamné en septembre 1998 que pour association de malfaiteurs et sortira rapidement de prison, ayant accompli l'essentiel de sa peine en détention provisoire. Il disait alors pour sa défense travailler pour les services secrets algériens et français, qui l'auraient chargé d'infiltrer l'extrême gauche française. MYTHOMANE ? Selon des éléments biographiques réunis lors de l'enquête sur l'affaire Rey-Maupin, il a fait dans les années 1980 un passage par l'armée française, dont il a été réformé, et un séjour de six mois en Algérie. Ses assertions ont néanmoins été mises en 1994 sur le compte de tendances à l'affabulation et à la mythomanie. Mais c'est la version que ce fils d'un ouvrier sidérurgiste algérien ancien agent de liaison du FLN pendant la guerre d'Algérie redonnera aux enquêteurs en 2013. Sébastien Simonian-Lemoine, qui l'a rencontré en 1999 en Angleterre et s'est lié avec lui au point d'assister à son mariage en Turquie et d'être le parrain de son fils, a admis à la barre que son ami était "parfois incohérent" lors de leurs discussions sur la philosophie, l'Histoire et la géopolitique. Abdelhakim Dekhar prenait des positions "parfois un peu extrêmes", a-t-il également déclaré, tout en reconnaissant ne pas toujours avoir cru ce qu'il disait. "Il y a un côté de sa personne auquel je ne pouvais pas ou ne voulais pas avoir accès", a-t-il ajouté, devant un Abdelhakim Dekhar en apparence impassible. Le procès doit durer une semaine. Abdelhakim Dekhar, en détention provisoire depuis novembre 2013, encourt la réclusion à perpétuité et Sébastien Lemoine trois ans de prison.
France-De comparse à prévenu vedette, Dekhar garde son mystère
information fournie par Reuters 17/11/2017 à 14:56
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