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"Comment stimuler les investissements pour une économie bas-carbone ?" par Jacques Mistral (Cercle des économistes)
information fournie par Boursorama 08/06/2015 à 10:10

Fixer un prix pour les émissions de carbone est un choix économique de grande importance, explique Jacques Mistral.

Fixer un prix pour les émissions de carbone est un choix économique de grande importance, explique Jacques Mistral.

La France prépare la Conférence internationale sur le climat, la COP21, qui se tiendra à Paris entre fin novembre et début décembre 2015. Récemment, de grands industriels ont réclamé la fixation d'un prix pour le carbone. Jacques Mistral explique en quoi cette question est cruciale.

Pour engager sérieusement la lutte contre le réchauffement climatique, la démarche la plus importante est sans doute de donner aux agents économiques les signaux qui orientent leurs comportements vers une économie bas-carbone. Les gaz à effet de serre ont en effet un coût pour la collectivité (le réchauffement) qui n'est pas pris en compte dans les décisions des uns et des autres tant que ce coût n'est pas internalisé en donnant un prix au carbone envoyé dans l'atmosphère.

Avantages de long terme et coûts actuels

Le problème central auquel sont confrontés les citoyens comme les gouvernements, c'est l'arbitrage entre les avantages futurs que l'on escompte et les coûts que l'on devrait supporter aujourd'hui pour limiter à 2°C la hausse de la température de la planète, comme c'est l'objectif international officiel. Malheureusement, sans même faire référence à une phrase célèbre de Keynes, l'objectif consistant à sauver la planète à long terme est sans doute trop lointain pour être attractif.

Ce problème, central en économie, est abordé en utilisant les techniques de l'actualisation qui permettent de comparer des coûts et des avantages intervenant à différents moments du temps. Choisir un taux d'actualisation élevé, c'est réduire la valeur aujourd'hui des avantages futurs ; choisir un taux bas, comme l'a fait le rapport Stern utilisé par les instances internationales, c'est évidemment rendre les avantages futurs beaucoup plus attractifs. Mais le choix effectué par Nick Stern, très normatif, a paru déconnecté des réalités à la plupart des économistes.

Préférence pour le présent

Cette discordance est cause d'une sorte de  schizophrénie dans les opinions publiques puisque coexistent la prise de conscience du dérèglement climatique, qui appelle l'action des gouvernements, et la préférence indécrottable pour le présent (autre façon de parler d'un taux d'actualisation élevé) qui freine les initiatives et aboutit à un certain immobilisme. Les responsables politiques ont d'ailleurs bien senti qu'il était contre-productif de résoudre le défi climatique sous la forme d'une « pénalité » ou d'une « punition » : la lutte contre le réchauffement climatique a, en régime démocratique, peu de chances de séduire s'il s'agit simplement de payer demain la contrepartie de ce que nous a si longtemps procuré une énergie à bon marché.

Il paraît donc avisé de changer de méthode en mettant, par exemple, l'accent sur les créations d'emplois. Mais peut-on réellement parier sur les retombées, les innovations, les investissements, les emplois de la « croissance verte » ? Les recherches économiques sont à l'heure actuelle loin d'avoir exploré tous les aspects de cette question mais  il semble que l'on doive plutôt considérer l'argument avec prudence.

Manque de visibilité sur le prix du carbone

Autre question centrale, le financement de la lutte contre le réchauffement climatique. On déplore souvent les « réticences » de la sphère financière à s'engager dans la lutte pour le climat. Il y a une raison simple à cela : en fait, une épargne abondante est disponible, prête à s'investir, mais les investissements qui pourraient stimuler la « croissance verte » sont découragés par le manque de visibilité en particulier pour le paramètre central, le prix du carbone.

On en revient au point de départ : la lutte contre le réchauffement climatique se présente à ce jour sous une forme paradoxale puisqu'un consensus assez large sur sa réalité semble établi dans les opinions publiques et les media … alors que les décisions politiques, soumises aux froids calculs des électeurs et des élus, sont plutôt marquées du sceau de l'attentisme voire de l'immobilisme.

Jacques Mistral

A paraître en librairie le 16 juin, sous sa direction : « Le climat va-t-il changer le capitalisme ? » (Editions Eyrolles).

Jacques Mistral est Senior fellow de la Brookings Institution à Washington et Conseiller spécial à l'IFRI (l'Institut Français des Relations Internationales), président de l'Association Paul Ricoeur et directeur indépendant de BNP Paribas Cardif. Ses principaux domaines d'expertise sont l'économie et la finance internationale, les politiques macro-économiques, les Etats-Unis, la Chine et l'Eurozone.

Le Cercle des économistes a été créé en 1992 avec pour objectif ambitieux de nourrir le débat économique. Grâce à la diversité des opinions de ses 30 membres, tous universitaires assurant ou ayant assuré des fonctions publiques ou privées, le Cercle des économistes est aujourd'hui un acteur reconnu du monde économique. Le succès de l'initiative repose sur une conviction commune : l'importance d'un débat ouvert, attentif aux faits et à la rigueur des analyses. Retrouvez tous les rendez-vous du Cercle des économistes sur leur site .

4 commentaires

  • 08 juin 15:43

    le constat à la base est erronné comme l'a démontré J Curry devant le Sénat américian (et elle sait de quoi elle parle)https://curryja.files.wordpress.com/2015/04/house-science-testimony-apr-15-final.pdf


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