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Vaccin contre le covid-19 : faut-il craindre une pénurie de seringues en France ?
information fournie par Le Figaro 15/01/2021 à 22:35

LA VERIFICATION - Si les inquiétudes portent sur la quantité de doses de vaccins disponible, le nombre de seringues en stock pose également question. Faut-il craindre une pénurie de ce matériel médical essentiel à la vaccination ?

LA QUESTION. Après la pénurie de masques, de gants et le difficile démarrage de la campagne vaccinale, les Français sont de nouveaux inquiets et s'interrogent : aura-t-on assez de seringues nécessaires pour injecter le vaccin contre le coronavirus ? Mardi, la Belgique a confié qu'elle pourrait rencontrer une pénurie entre février et mars. En cause, une commande européenne qui peine à arriver. En France, l'inquiétude a gagné le réseau social Twitter où certains ont accusé l'État d'avoir pris du retard dans l'approvisionnement, conséquence, selon eux, de la lenteur de la vaccination. Des scientifiques ont également fait part de leurs craintes dans Libération sur l'état des stocks constitués par le gouvernement pour répondre à la forte demande. Faut-il donc s'inquiéter d'une pénurie de seringues ?

VÉRIFIONS. Pour chaque vaccin injecté, il faut deux seringues. La première est utilisée pour diluer le vaccin avec une dose de sérum physiologique. La seconde sert ensuite à faire l'injection. Il faut bien sûr changer de seringue à chaque personne vaccinée. Les modèles utilisés pour l'injection sont des seringues intramusculaires d'un millilitre. Elles possèdent une graduation suffisamment précise pour prélever la dose nécessaire pour un vaccin, ni trop, ni pas assez, de sorte à pouvoir prélever six doses de vaccin à partir d'un seul flacon. Depuis le 8 janvier, l'agence européenne du médicament (EMA) recommande en effet d'effectuer six doses avec un même flacon de vaccin Pfizer/BioNtec au lieu des cinq recommandées auparavant.

Pour chaque flacon de vaccin, il faut donc douze seringues : six pour la dilution (celles-ci n'ont pas besoin d'être des seringues d'1ml) et six pour l'injection. Ce sont ces dernières qui préoccupent le plus les professionnels de santé car elles sont les seules à pouvoir être utilisées pour le vaccin contre le coronavirus. Or, avec le déploiement de la vaccination en France, la quantité nécessaire de ce produit médical ne va cesser d'augmenter et son approvisionnement pourrait être compromis si les commandes de l'État ne sont pas suffisantes ou tardent à venir. Ce n'est pas le cas pour l'instant, a assuré Olivier Véran. «Nous avons 3,3 millions d'aiguilles, nous allons en recevoir 2 millions supplémentaires dans les prochains jours. Nous avons 4,6 millions de seringues et d'autres sont également à venir. Cette semaine, sont destockées à destination des territoires, 850.000 aiguilles, 600.000 seringues, qui s'ajoutent à tout le matériel d'injection dont disposent déjà par nature les hôpitaux» , a détaillé le ministre de la Santé. La direction générale de la Santé se veut elle aussi rassurante et précise à Libération avoir acquis, «pour le compte de l'État, des aiguilles et des seringues, en plus des doses de vaccin. Ces stocks viennent en complément de ceux déjà détenus par les établissements» de santé. Contactée par le Figaro, Santé Publique France n'a pas encore répondu.

«On a ce qu'il faut pour vacciner environ 20.000 personnes»

C'est en effet l'État qui fourni aux hôpitaux les stocks nécessaires de seringues servant au vaccin contre le coronavirus. À charge ensuite aux établissements de santé de les répartir, sous forme de kits de vaccination (contenant aiguilles, seringues et flacons de vaccin) aux Ehpad et centres de vaccination. Un approvisionnement qui se déroule bien, témoigne Jean-Pascal Collinot, chef de service de la pharmacie du centre hospitalier (CH) de Verdun (Meuse). «La situation s’est plutôt bien dénouée en début de semaine car nous avons reçu beaucoup de ces seringues. Aujourd’hui, nous en avons plus de 5000, ce qui correspond quasiment au nombre de vaccins que nous pouvons injecter» . Julien boyer, pharmacien et chef de service des dispositifs médicaux au centre hospitalier de Valenciennes (Nord) confirme : «Actuellement, on a ce qu’il faut pour vacciner environ 20.000 personnes» .

Un soulagement d'autant plus grand que les premières livraisons ont connu quelques couacs. Le CH de Verdun n'a pas reçu les bonnes seringues. De même pour le CHU de Nice (Alpes-Maritimes) et l'hôpital de Valenciennes qui ont eux reçu avec leurs seringues des aiguilles trop courtes. Ce dernier a toutefois pu être réapprovisionné avec les bons modèles en moins d'une semaine. «Heureusement, nous avions anticipé ce type de problème en réalisant, dès novembre, un achat de matériel spécifique pour le vaccin. On a donc pu puiser dans notre propre stock», confie Julien Boyer.

Des stocks fragiles

Malgré un acheminement des seringues jusqu'aux hôpitaux qui ne connaît pour l'instant que peu d'embûches, Jean-Pascal Collinot et Julien Boyer notent toutefois un manque de perspectives sur les commandes à venir. «On compte sur cet approvisionnement de l’État et nous préférerions avoir un peu de seringues de côté pour être plus sereins dans la gestion de nos propres stocks. En temps normal, nous ne descendons pas en dessous d’une semaine de stock» , explique Jean-Pascal Collinot. Si le centre hospitalier de Verdun vaccine environ 500 personnes par jour (à raison de cinq jours par semaine), il aura épuisé toutes ses seringues en seulement deux semaines. «On a commencé doucement donc nous avions beaucoup de stock devant nous mais cela se complique avec l'accélération qui s'organise et notre planning de vaccination ne cesse de se remplir» , s'inquiète-t-il. Même préoccupation du côté de l'hôpital de Valenciennes. «On ne sait pas à l'avance combien de matériel on va recevoir donc on essaye d'anticiper un peu pour avoir une source d'approvisionnement en cas de défaillance de la première, l'État» , explique Julien Boyer.

Ayant en tête les précédentes pénuries, l'établissement a tenté de s'organiser pour éviter de se retrouver à court de seringues. Avant même la première vague du virus, le CH a dressé la liste des produits dont la demande allait augmenter afin de renforcer ses stocks. Une application utilisée en interne a même été créée pour «visualiser minute par minute l'évolution du nombre de médicaments et de dispositifs médicaux dont nous disposons et suivre les commandes de l'État» . L'hôpital a également entrepris de renforcer ses stocks de seringues en plus de celles fournies par l'État. Le nombre de seringues disponible lui permet d'assurer deux à trois jours de vaccination en cas d'un retard des livraisons de l'État. Mais à trop ponctionner les stocks de l'hôpital, les activités internes de ce dernier pourraient être pénalisées si les seringues venaient à manquer et que l'établissement rencontrait des difficultés pour s'approvisionner.

Des fournisseurs sollicités de toute part

D'autant que passer des commandes auprès de leurs fournisseurs traditionnels est de plus en plus difficile. Sollicités de toute part, ils doivent déjà répondre à la forte demande des États comme la France. Interrogé par le Figaro , Becton, Dickinson & Co (BD), l'un des plus gros fabricants au monde de seringues se montre pourtant confiant sur ses capacités. «BD s'est organisé pour répondre aux commandes des États, à ce jour toutes les commandes sont planifiées et seront honorées selon les calendriers agréés avec chaque État. Nous ne prévoyons pas de rupture de stock» , indique-t-il. Selon la société d'analyse scientifique Airfinity, citée par Libération , la production actuelle de seringues s'élève à 9,05 milliards d'unités par an et pourrait atteindre 12,03 milliards en 2021. Mais le vaccin contre le coronavirus n'est pas seul à nécessiter des seringues et si on y ajoute tous les autres usages, il faudrait plus de 17 milliards d'unités pour éviter toute pénurie. Chez Becton, Dickinson & Co, on assure avoir « anticipé cette demande et pris toutes les mesures pour augmenter ses capacités de production en vue de la vaccination à venir. Nous sommes aujourd'hui organisés pour produire 1 milliard de produits supplémentaires à l'horizon des 12 prochains mois» . «BD a poussé les cadences de production et maximisé les horaires de fonctionnement des usines qui sont désormais en 24h/24 7j/7» , ajoute-t-on. Si Julien Boyer veut croire aux enseignements tirés par les fournisseurs depuis le début de la crise sanitaire, il craint, comme Jean-Pascal Collinot, que l'explosion de la demande mondiale ne crée de fortes tensions sur l'approvisionnement. «Nous rencontrons déjà d'énormes difficultés pour commander auprès de nos fournisseurs» , atteste le responsable de la pharmacie à Verdun.

Effet toutefois positif : les pénuries et tensions dans l'approvisionnement de matériel médial ont démontré que «la notion d'approvisionnement est cruciale au sein d'un hôpital. Quand la direction demande de composer avec des stocks et des budgets bas, on peut très vite se retrouver en difficulté en cas de crise. Donc, je pense que ce qui restera, c’est l'importance d'avoir suffisamment de stocks» , indique Julien Boyer. Le pharmacien espère néanmoins que son service pourra bientôt reprendre son fonctionnement normal. «Nous avions en route d’autres missions de pharmacies cliniques qui ont pu être réduites mais qui sont pour autant très importantes à développer» .

EN CONCLUSION. Non, il n'y a pour l'instant aucune pénurie de seringues nécessaires pour le vaccin contre le coronavirus, mais les hôpitaux chargés d'acheminer les kits de vaccination craignent de devoir puiser dans leurs propres stocks si les commandes de l'État ne permettaient pas de répondre à l'accélération du déploiement de la vaccination. L'approvisionnement pourrait en effet être ralenti par la forte demande mondiale qui ne va cesser, elle aussi, d'augmenter, accroissant la pression sur les fabricants.

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