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Port du masque dans les bars : «Une fois sur deux, les clients s'en vont»
information fournie par Le Figaro 22/07/2020 à 20:25

(Crédits photo : Unsplash - Fabien Maurin )

(Crédits photo : Unsplash - Fabien Maurin )

Difficile d'imposer le port du masque dans les bars de nuit, qui craignent que le nouveau décret fasse fuir une clientèle déjà rare depuis la crise du coronavirus.

Quand on se promène rue de Lappe dans le XIe arrondissement de Paris ce 21 juillet, on est loin d'imaginer la cohue qui battait le pavé il y a encore quelques mois. Une vingtaine de clients sont installés sur les quelques tables qui ont pu être disposées le long du trottoir. À l'intérieur, ils ne sont guère plus. Des portes ouvertes s'échappe de la musique entraînante. En vain. Le temps où l'on jouait des coudes pour entrer dans un bar bondé et boire un verre collé à son voisin semble bel et bien révolu. Covid oblige, il faut désormais montrer patte blanche et masque sur le nez. Depuis le 20 juillet, ce dernier est obligatoire dans tous les lieux clos.

Accoudée à son comptoir, Chloé désespère. « Le bar parle de lui-même. Même à cette heure-là, normalement, on a des gens », soupire-t-elle, le visage éclairé par les sports lumineux qui balaient une salle complètement vide. Pour la jeune femme, gérante de l'un des établissements de la ruelle, un seul responsable à cette morosité ambiante : le port du masque. « Quand on demande aux clients de le porter, une fois sur deux ils refusent et s'en vont », se lamente-t-elle avant d'ajouter : « Et même quand ils acceptent, une fois entrés dans le bar, c'est terminé. Au fil de la soirée, ils finissent par l'enlever ». De bonne composition, l'établissement offre des masques pour ceux qui l'auraient oublié, d'autres en vendent. En cas de refus, « on les envoie gentiment vers un autre bar ». Plus loin dans la rue, un autre gérant confirme : « Jusque-là, on n'obligeait pas le masque mais on va devoir le faire. Ça va être compliqué de devoir le répéter à chaque fois, on va passer pour des enquiquineurs et on prend le risque que les gens aillent sur les quais à la place… »

«Ce n'est pas à nous de faire la police»

Dans les lieux clos, le port du masque est désormais obligatoire pour tous les déplacements à l'intérieur. Une fois à leur table, les clients peuvent l'enlever pour manger ou boire un verre, mais doivent le remettre pour se rendre aux toilettes ou aller commander au bar, explique le décret qui punit tout écart de 135 euros d'amende. « Nous sommes très contents de cette décision », explique Laurent Lutse, président national des cafés brasseries et établissements de nuit à l'Union des métiers et de l'industrie de l'hôtellerie (Umih). « Beaucoup d'établissements font appliquer les règles surtout dans les restaurants. Mais dans les bars, on rencontre des clients récalcitrants. Une fois qu'ils ont pris un verre, on n'arrive même plus à les raisonner. Donc, nous nous félicitons de ce décret, qui va aider nos cafetiers et restaurateurs à faire appliquer les règles ».

Plus question de dire : « Oui, mais à côté, le masque n'est pas obligatoire », comme David Zenouda se l'est si souvent entendu dire. À la tête de six établissements dans Paris dont deux bars de nuit (le Next et le Maze), il a lui aussi constaté un relâchement. « Nous avons un agent d'accueil qui demande aux clients lorsqu'ils se déplacent de mettre le masque. Ça a très bien fonctionné pendant quinze jours. Tous étaient respectueux et le faisaient. Mais voyant que dans beaucoup d'autres établissements, le masque n'était pas obligatoire, ils nous ont répondu qu'ils ne voyaient pas pourquoi ils devraient le porter chez nous », raconte-t-il. « Quand le chat n'est pas là les souris dansent », abonde Chloé, amère, qui admet parfois fermer les yeux. « On n'a pas le choix, on ne peut pas être partout. De toute façon, ce sont eux (les clients, NDLR) qui prendront l'amende ». Même discours du côté de David Zenouda, qui ne se voit pas réclamer à ses équipes de faire respecter le port du masque. « Je sais que c'est la règle, mais si les clients ont décidé de se responsabiliser… Les obliger, c'est aussi les empêcher de danser, de ne pas boire trop. On devient une police interne de nos établissements », résume-t-il. « Ce n'est pas à nous de faire la police », confirme Chloé. Tous deux ne voient pas d'un bon œil ce décret, jugé hypocrite. « C'est impossible de faire appliquer cette règle dans des établissements où les gens sont réunis pour faire la fête », assène David Zenouda, également représentant de l'Umih à Paris.

«Concurrence déloyale»

Pour lui, il faudrait tout simplement supprimer cette obligation dans les bars de nuit. «Je préfère qu'on l'impose au personnel pour le protéger, car ce sont eux qui sont au contact des clients mais qu'on laisse la possibilité à ces derniers de vivre un peu tranquillement. Ou alors, on ferme ces établissements et on nous donne des aides mais, là, on ralentit une économie» , peste-t-il. Le propriétaire du célèbre Café A dénonce le manque de contrôle dans les «soirées sauvages» en plein air , notamment dans le bois de Vincennes ou à La Villette, qui créent «une concurrence déloyale pour les bars de nuits et discothèques qui, elles, sont fermées ». Il avoue même réfléchir à fermer certains de ces établissements et placer son personnel au chômage partiel jusqu'à la levée de l'obligation de port du masque. Certains établissements ont d'ailleurs préféré ne pas rouvrir plutôt que d'appliquer cette règle ou par crainte d'être tenu responsable en cas d'infection au coronavirus. Entre les Parisiens qui fuient la capitale et le manque de touristes, le mois d'août s'annonce encore plus calme que d'habitude. «On attend les prochaines décisions en espérant que l'on arrivera à se maintenir à flot d'ici là et ne pas couler», soupire Chloé qui balaye d'un regard triste les tables vides de son bar.

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