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Dans la jungle des labels des produits de grande consommation
information fournie par Le Figaro 10/04/2021 à 13:18

DÉCRYPTAGE - Face à l'exigence et à la méfiance croissante des consommateurs, ces certifications se multiplient, au risque de devenir contreproductives.

Eco-score, note globale, label rouge, Fairtrade, AOC, bio, made in France... on ne compte plus les labels apposés sur les produits de grande consommation. Ces logos, censés certifier l'engagement éthique, environnemental ou de qualité des produits, se sont multipliés ces dernières années, au risque de devenir contre-productifs et de perdre le consommateur.

Ces problématiques, Patrick Mercier, président de l'ADÉIC, une des associations de défense des consommateurs les plus influentes, les connaît bien. Depuis une vingtaine d'années, son association a pu constater la prolifération de ces labels qui, progressivement, « sont apparus vers les années 1990 » et ont ensuite « explosé vers les années 2000 ». Pour le président, cette multiplication est concomitante d’une « méfiance » grandissante des consommateurs envers les industriels. Après les nombreux scandales alimentaires, et les reportages à charge, les producteurs doivent désormais montrer patte blanche, en apportant les preuves de la qualité de leurs produits.

Malgré les nombreux labels, la confiance entre les deux parties continue de se détériorer. Un paradoxe que Patrick Mercier constate au quotidien : « alors que le consommateur est de mieux en mieux défendu il devient de plus en plus inquiet ». En définitive, la prise de conscience des conditions de production aboutit à une « perte de confiance généralisée, qui fait douter de tout ». Les raisons d'un tel échec ? « Trop de labels tue le label (…) parce qu'on a trop d'informations, on n'arrive plus à les assimiler. Cette surinformation désinforme. In fine, les gens ne savent plus ce qu'ils consomment » analyse le président de l'association.

Faux-labels et auto-proclamation

Et certains industriels n'hésitent pas à profiter de ce flou autour des certifications pour apposer sur leurs produits des « faux labels » et « se faire de la publicité » à moindres frais. « Il y a de plus en plus de labels autoproclamés qui concernent les produits de grande consommation », le président de l'ADÉIC cite notamment en exemple les sigles « Les produits de l'année » et « Saveur de l'année ». Ces derniers mettent en avant le fait qu'ils sont décernés par les consommateurs eux-mêmes mais « tout dépend des questions posées et du traitement des réponses, par ailleurs subjectives » note le président. Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l'UFC Que Choisir, rejoint le constat de son collègue, mais dénonce plus largement tous les labels ou notations décernés par les marques elles-mêmes ou des organismes pseudo-indépendants. « À force de se la jouer perso avec chacun sa petite notation, on crée une cacophonie en termes de logos et il est ensuite impossible de comparer les produits » : le défi est donc d'harmoniser ces notations pour créer un cadre de référence.

Le Nutriscore : améliorer la lisibilité

C'était en partie l'ambition d'une notation comme le Nutri-Score. Lancé en 2017 par Santé Publique France, le logo nutritionnel a connu un véritable succès auprès des consommateurs et des entreprises : un Français sur deux déclare avoir changé au moins une habitude d'achat grâce à cette notation et près de 500 entreprises l'ont adopté selon l'évaluation à 3 ans publiée en février 2021 par l'organisme de santé publique. D'un simple coup d'œil, avec un code couleur et des chiffres, le consommateur peut comparer la valeur nutritionnelle des produits.

Si l'outil est, dans l'absolu, un progrès pour le consommateur, l'UFC Que Choisir y décèle de nombreuses limites. Tout d'abord sur le principe, « cet outil fait porter la responsabilité sur le consommateur ». Avoir une telle notation, c'est la preuve qu'il y a « une forme d'irresponsabilité des industriels et une forme de démission des pouvoirs publics » juge Olivier Andrault. Pour ce dernier, les autorités françaises ont manqué de courage politique, il était tout à fait possible d'interdire ces produits ou de forcer les industriels à modifier leurs recettes, comme « en Angleterre où le ministère de la santé a défini des objectifs obligatoires sur les taux de graisse, sucre et sel ». Au-delà de cette opposition sur le fond, le Nutri-Score, reste d'une grande aide selon les associations de consommateurs. Sans un tel indicateur « un industriel n'a aucun intérêt à modifier son produit car pour changer des recettes il faut engager des frais en R&D et c'est un risque considérable si la concurrence ne prend pas elle aussi ce virage » explique Olivier Andrault, qui constate la boucle vertueuse que le Nutri-Score peut susciter dans les entreprises qui l'adoptent « c'est très efficace, il y a une forte pression en interne pour améliorer les produits ».

Certains distributeurs intègrent déjà avec succès l'outil dans leur cahier des charges : « le Nutri-Score fait partie de nos briefs d'appels d’offres : notre objectif est de développer des produits ayant un Nutri-Score au moins équivalent au marché, voire mieux disant » déclare Auchan Retail au Figaro . Reste que ce cadre de référence n'est pour le moment pas obligatoire. Des blocages à l'échelle européenne empêchent sa généralisation, ceux-ci sont notamment dus à « des industriels très remontés qui « montent des coalitions » et « font pression sur les ministères ».

Un désir de transparence généralisé

Toutefois, même si le Nutri-Score était rendu obligatoire, cet indicateur se limitant à l'aspect nutritionnel des produits, ne répondrait pas au désir de transparence généralisé qui « s'est exacerbé à la faveur de la pandémie ; il y a désormais chez les consommateurs beaucoup d'attentes sur l'environnement, la provenance des produits, ou encore le bien-être animal » explique au Figaro Karine Perrot, Directrice Conseil de Kantar, cabinet spécialisé dans les études marketing. Pour répondre à ces attentes, certaines applications et sites tentent de synthétiser les informations via la data et promettent « de déchiffrer l'indéchiffrable » comme la garantie Yuka, la célèbre application, dans un communiqué. À en croire ces nouveaux acteurs, et en attendant des mesures politiques, il semblerait donc que nos smartphones restent nos seuls alliés pour s'extraire de la jungle des labels.

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