
Vers un accord commercial UE-USA avec droits de douane de 15% - sources
par Philip Blenkinsop
L'Union européenne et les Etats-Unis s'orientent vers un accord commercial qui prévoirait des droits de douane de base de 15% sur les produits européens importés sur le territoire américain, ont déclaré mercredi deux sources diplomatiques européennes, ce qui permettrait au bloc communautaire d'éviter des taxes douanières américaines de 30% à compter du 1er août.
Ce taux de taxation de 15%, qui pourrait également concerner le secteur automobile, serait ainsi similaire à celui prévu dans l'accord-cadre entre les Etats-Unis et le Japon, annoncé mardi soir par le président américain Donald Trump, lequel a opéré depuis son retour au pouvoir en janvier dernier une refonte de la politique commerciale de Washington.
Des responsables de la Commission européenne, en charge de mener les négociations commerciales avec les Etats-Unis au nom des Vingt-Sept, ont rendu compte aux émissaires européens des avancées des discussions avec leurs homologues américains. Le dernier mot sur un accord appartient toutefois à Donald Trump.
Selon les sources, les grandes lignes du potentiel accord commercial établissent que le taux de 15% pourrait s'appliquer également aux secteurs automobile et pharmaceutique, pour lesquels il remplacerait les droits de douane américains avec un taux médian de moins de 5% jusque-là en vigueur.
Il est possible que des concessions soient obtenues par Bruxelles pour plusieurs industries, comme l'aéronautique, le bois d'oeuvre, ou encore certains produits agricoles, qui seraient exemptés de droits de douane, ont dit les diplomates.
Toutefois, rien n'indique pour l'heure que Washington soit disposé à revoir à la baisse les taxes douanières de 50% imposées sur toutes les importations d'acier aux Etats-Unis.
Interrogée sur l'avancée des négociations avec l'UE, une porte-parole de la Maison blanche a déclaré que tout discussion évoquant un accord commercial devait être considérée comme de la "spéculation" en l'absence d'annonce de Donald Trump.
Le conseiller commercial de la présidence américaine, Peter Navarro, a déclaré plus tôt à Bloomberg que les dernières informations devaient être prises "avec des pincettes".
En déplacement mercredi soir à Berlin pour s'entretenir avec le chancelier allemand Friedrich Merz d'un éventail de sujets, Emmanuel Macron a fait état d'"échanges permanents" au sein de l'UE pour "impulser, coordonner notre réponse à l'offensive tarifaire qui a été lancée" par les Etats-Unis.
"La volonté que nous partageons, c'est de donner de la stabilité et d'avoir les tarifs les plus bas possible", a dit le président français devant les journalistes, disant souhaiter une "finalisation la plus rapide et la meilleure possible".
VERS DES MESURES DE RÉTORSION APPROUVÉES COMME PLAN B
Plus tôt dans la journée, la Commission européenne a fait savoir que sa priorité était de parvenir à un accord avec l'administration Trump afin d'éviter l'instauration d'un seuil plancher de 30% de droits de douane sur tous les produits européens à compter du 1er août, date butoir fixée par le président américain.
En parallèle, ont rapporté les sources, la Commission prévoit de soumettre jeudi au vote des Vingt-Sept un ensemble de mesures commerciales de rétorsion, à hauteur de 93 milliards d'euros, qui viseraient les produits américains en cas d'absence d'accord. Ces mesures entreraient en vigueur après le 7 août.
Un représentant du gouvernement allemand a déclaré que Berlin soutenait les préparatifs en ce sens de Bruxelles.
Les pays membres de l'UE sont en grande majorité favorables à l'imposition de mesures dites d'"anti-coercition" contre les Etats-Unis si aucun accord n'était trouvé et que Washington venait à prélever des droits de douane de 30% sur les produits européens, ont dit les sources diplomatiques. Le secteur américain des services serait notamment ciblé.
L'accord entre les Etats-Unis et le Japon est le plus important annoncé par Washington depuis que Donald Trump a dévoilé en avril des vastes taxes dites "réciproques" contre des dizaines de partenaires commerciaux - des droits de douane pour la plupart suspendus dans la foulée, pour permettre la tenue de négociations bilatérales.
Élément notable de cet accord: Tokyo a obtenu que le taux de base de 15% soit appliqué également au secteur automobile japonais, contre des droits de douane américains actuellement à hauteur de 27,5%.
En 2024, les Etats-Unis ont importé plus de 55 milliards de dollars de véhicules et pièces détachées en provenance du Japon. Ils ont importé sur la même période 55,45 milliards de dollars de produits automobiles depuis l'UE. Un nombre bien moins important de véhicules américains ont été vendus en Europe.
Si Washington s'est montré peu enclin à effecteur des concessions sur le secteur automobile, ont dit des représentants européens, l'accord conclu avec Tokyo illustre une certaine flexibilité qui pourrait inciter Bruxelles à tenter d'obtenir une mesure similaire.
D'après Simon Evenett, enseignant en géopolitique et stratégie à l'école de commerce IMD à Lausanne, "ce qu'a obtenu le gouvernement japonais va devenir le minimum pour les objectifs de négociations de l'UE".
(Philip Blenkinsop, avec la contribution du bureau de Washington; version française Jean Terzian)
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