Ozgur Ozel, le chef du principal parti d'opposition en Turquie, le Parti républicain du peuple, s'exprime devant la presse après l'abandon des poursuitesvisant la direction du CHP, à Ankara le 24 octobre 2025 ( AFP / Adem ALTAN )
Soulagement pour l'opposition turque: un tribunal d'Ankara a abandonné vendredi des poursuites visant la direction du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), qui croule depuis un an sous les enquêtes et les arrestations.
Les juges ont déclaré non recevable une plainte sur des allégations d'achats de voix lors d'un congrès en 2023 du principal parti de l'opposition turque.
Les poursuites menaçaient d'invalider l'élection de l'actuelle direction du CHP, sorti largement victorieux d'élections locales l'an passé, et de déboucher sur la nomination à la tête du parti d'un administrateur désigné par l'Etat.
Le tribunal a notamment estimé qu'un des plaignants, un ancien élu du CHP qui avait déjà été exclu du parti lors du dépôt de la plainte, n'avait "pas la capacité d'intenter une action en justice".
La décision a été accueillie par des applaudissements dans la salle d'audience, a constaté une journaliste de l'AFP.
"Ceux qui soutiennent l'autocratie et les autocrates ont perdu, et ceux qui soutiennent la démocratie ont gagné", a jugé vendredi le patron du CHP, Özgür Özel, promettant que "la démocratie l'emportera(it) face à l'autocratie aux prochaines élections".
L'avocat du CHP, Caglar Caglayan, s'est lui félicité d'une décision "résultant de l'État de droit". "Puisse-t-elle être bénéfique pour tous", a-t-il déclaré à la presse à l'issue de l'audience, tandis que la défense du plaignant annonçait sa volonté de faire appel.
Les marchés, sensibles aux soubresauts politiques en Turquie, ont aussi réagi favorablement: le BIST100, indice vedette de la Bourse d'Istanbul, progressait fortement (+4%) peu avant 14H30 (11H30 GMT).
"Le gouvernement nomme des administrateurs au lieu de s'occuper des problèmes de la population. Mais ses ambitions ont été contrecarrées aujourd'hui", s'est réjouie auprès de l'AFP Ummu Gulsun Seyfi, retraitée de 75 ans et membre du CHP depuis 1977, présente dans la salle d'audience vendredi matin.
- Offensive judiciaire -
Le siège du Parti républicain du peuple (CHP), principal parti d'opposition en Turquie, à Ankara, le 24 octobre 2025 ( AFP / Adem ALTAN )
Le CHP nie depuis le départ ces allégations d'achats de voix, et accuse le gouvernement d'utiliser le pouvoir judiciaire pour mener à bien un "coup d'État politique".
Pour tenter de consolider sa direction, le CHP avait organisé un congrès extraordinaire le 21 septembre, au cours duquel son patron Özgür Özel avait été réélu.
Le CHP, fondé par le père de la République turque, Mustafa Kemal Atatürk, est la cible depuis un an d'une vaste offensive judiciaire.
Sa figure la plus populaire, le maire d'Istanbul Ekrem Imamoglu, est incarcéré depuis mars pour corruption, une accusation qu'il rejette. Vendredi, une nouvelle enquête, cette fois pour espionnage, a été ouverte contre lui.
L'arrestation de M. Imamoglu, vu comme le plus sérieux rival du président Recep Tayyip Erdogan, avait provoqué de nombreuses réactions internationales et suscité une contestation inédite en Turquie depuis 2013.
Accusé de dérive autoritaire, M. Erdogan, Premier ministre entre 2003 et 2014, et président depuis lors, avait juré lors de cette mobilisation de ne pas céder à la "terreur de la rue".
Plus d'une dizaine d'autres maires CHP d'arrondissements d'Istanbul et de villes turques ont également été arrêtés et incarcérés depuis un an, la plupart pour corruption ou terrorisme.

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