Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des paramilitaires brandissant des armes et célébrant dans les rues d'El-Facher, au Darfour dans l'ouest du Soudan ( Rapid Support Forces (RSF) / - )
Civils piégés ou en fuite, communications coupées, accusations d'exactions: l'ONU et des groupes locaux ont alerté lundi sur les risques pesant sur el-Facher, au lendemain de l'annonce par les paramilitaires de la prise de cette ville clé du Darfour, dans l'ouest du Soudan.
Assiégée depuis 18 mois, el-Facher était la dernière ville de la vaste région du Darfour encore hors du contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par le général Mohamed Hamdane Daglo, en guerre depuis avril 2023 contre son ancien allié, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée.
L'armée n'a pas officiellement réagi à l'annonce de "victoire" des paramilitaires dimanche, tandis que lundi matin, les combats se poursuivaient autour de l'aéroport et dans plusieurs zones de l'ouest de la ville, selon des militants locaux.
Si leur victoire se confirmait, les FSR contrôleraient l'ensemble du Darfour, où existe déjà une administration parallèle défiant le pouvoir du général Burhane, dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, basé à Port-Soudan (est).
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants armés des FSR dans une rue d'El-Facher, au Darfour, dans l'ouest du Soudan ( Rapid Support Forces (RSF) / - )
"Cela représente une terrible escalade du conflit", a averti lundi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. "Le niveau de souffrance que nous voyons au Soudan est intolérable", a-t-il dit.
Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Volker Türk, a évoqué lundi un risque croissant de "violations et d'atrocités motivées par des raisons ethniques" à el-Facher.
Il a appelé à "une action urgente et concrète (...) pour garantir la protection des civils à el-Facher et un passage sûr pour ceux qui tentent de rejoindre un lieu relativement sûr".
Des images diffusées sur la page Facebook du comité de résistance local, des militants pro-démocratie qui documentent le conflit, montrent des civils en fuite, des corps jonchant le sol près de voitures enflammées.
"Plusieurs membres des cuisines populaires et des bénévoles ont été tués", a alerté le groupe en précisant avoir des difficultés à joindre de nombreux volontaires qui aidaient les civils au milieu des combats.
De leur côté, les FSR ont affirmé lundi mener "des opérations de ratissage et de nettoyage complet" pour "éliminer les dernières poches de terroristes et de mercenaires". Les paramilitaires assurent aussi avoir déployé des équipes pour "protéger les civils", "enlever les mines", "nettoyer la ville de ses débris" et "sécuriser les rues".
- "Dernier souffle" -
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants des FSR célébrant près d'un char dans une rue d'El-Facher, au Darfour, dans l'ouest du Soudan ( Rapid Support Forces (RSF) / - )
L'AFP n'est pas en mesure de vérifier de source indépendante la situation sur le terrain.
Les communications satellite starlink, le seul réseau encore opérationnel mais contrôlé par les FSR, ont été coupées, laissant la ville dans un "black out médiatique", selon le Syndicat des journalistes soudanais.
"Nous exigeons la protection des civils, la révélation du sort des déplacés et une enquête indépendante sur les violations et les crimes" des paramilitaires, a dit le gouverneur pro-armée du Darfour, Minni Minnawi, sur X.
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants des FSR célébrant dans une rue d'El-Facher, au Darfour, dans l'ouest du Soudan ( Rapid Support Forces (RSF) / - )
Selon l'ONU, plus d'un million de personnes ont fui la ville depuis le début de la guerre et les quelque 260.000 habitants d'el-Facher, dont la moitié sont des enfants, manquent de tout.
Depuis dimanche, plus de 26.000 personnes ont fui les combats, la majorité se réfugiant dans les zones périphériques de la ville, d'autres rejoignant Tawila, à 70 kilomètres à l'ouest, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
- "Tuer et voler" -
Capture d'écran d'une vidéo diffusée le 26 octobre 2025 sur le compte Telegram des Forces de soutien rapide (FSR), montre des combattants des FSR célébrant dans une rue d'El-Facher, au Darfour, dans l'ouest du Soudan ( Rapid Support Forces (RSF) / - )
"Les milices et les mercenaires sont dans tous les coins de rue pour tuer et voler", affirme un message publié sur la page Facebook du groupe de résistance locale, sous une vidéo montrant une femme morte gisant au sol.
Les paramilitaires "ferment délibérément les yeux sur les comportements connus de leurs éléments qui pratiquent des exécutions collectives contre les civils et les prisonniers", a affirmé le collectif des Avocats de l'urgence, en dénonçant "un comportement systématique qui s'apparente à des crimes de guerre".
Les paramilitaires ont diffusé des vidéos où l'on voit des centaines d'hommes en tenue civile assis par terre entourés de combattants en uniforme paramilitaire, présentés comme des prisonniers des rangs de l'armée ou des forces conjointes alliées.
Le syndicat des journalistes a exprimé "sa profonde inquiétude pour la sécurité des confrères présents à el-Facher" en pointant le cas d'un journaliste indépendant, Maamar Ibrahim, arrêté dimanche par les FSR.
Le Soudan, déjà amputé du Sud en 2011, risque à terme de se fragmenter, selon les experts. Et malgré des efforts internationaux pour un cessez-le-feu, les deux camps, tous deux accusés d'exactions sur les civils, restent sourds aux appels à négocier.

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