
Le Premier ministre Michel Barnier à l'Assemblée nationale à Paris le 1er octobre 2024. ( AFP / ALAIN JOCARD )
Selon le baromètre des industriels français, le projet de budget de rigueur présenté jeudi par le gouvernement Barnier "n'est pas bon à court terme" pour les usines, mais semble avoir préservé trois atouts de la réindustrialisation naissante: les crédits impôt-recherche, la "flat tax" et le programme France 2030.
"Chaque année revient la polémique sur le maintien du crédit impôt-recherche (qui porte sur quelque 7 milliards d'euros NDLR), mais il faut savoir que cette mesure ancre en France les activités de recherche et développement des entreprises industrielles", se félicite Vincent Charlet, économiste du groupe de réflexion la Fabrique de l'Industrie.
"Le maintien de ce dispositif fiscal est essentiel" pour l'industrie française, juge-t-il.
Le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) sur les revenus du capital, surnommé "flat tax", maintenu inchangé dans le projet de budget 2025 est aussi un "élément d'attractivité pour les investisseurs", relève Alexandre Saubot, président de France Industrie, l'organisation qui représente les 31 branches industrielles du pays.
Idem pour le programme d'investissement France 2030 qui "soutient" la recherche et l'industrie, "à condition qu'il ne subisse pas de régulation budgétaire" lors de la discussion du texte devant le Parlement, ajoute-t-il.
Ces trois éléments confortent quelque peu l'industrie très fragilisée en France, qui ne représente plus que 13,5% du PIB marchand selon l'institut Rexecode, pour 7,6 millions d'emplois directs et indirects, après plus de 30 ans de fermetures d'usines et de délocalisations.
Néanmoins, l'augmentation présentée comme temporaire de l'impôt sur quelque 400 très grandes sociétés (IS), qui doit rapporter 8 milliards d'euros à l'Etat en 2025, "aura des effets sur l'ensemble de la chaîne de valeur", prévient Alexandre Saubot, dans un entretien avec l'AFP.
"Ne croyez pas que parce que vous ne touchez qu'aux gros cela ne touchera pas les petits, car dans les filières industrielles, que ce soit l'aéronautique, l'acier, les commandes des grands groupes vont baisser vers leurs sous-traitants plus petits", souligne-t-il.
Autre indicateur jugé défavorable pour l'activité des entreprises en général, le report, auquel on s'attendait, de la baisse de l'impôt de production CVAE, censé rapporter 1,1 milliard d'euros de recettes dans les caisses de l'Etat.
- la décarbonation, chantier industriel -
"C'est un impôt à la source, avant même que l'industriel ait commencé à faire tourner la machine: il est bon pour alimenter les contributions de l'Etat aux collectivités territoriales mais ce n'est pas une bonne idée pour la rationalité économique" et l'emploi, remarque M. Charlet.
Troisième point du budget jugé négatif par le monde de l'industrie: la forte réduction appliquée au programme Ma Prime Renov destiné à encourager les rénovations énergétiques des bâtiments pour faire baisser les émissions de CO2 de la construction et les factures énergétiques.
"Il y aura un impact sur les entreprises et sur le marché du bâtiment qui va déjà très mal", prédit Benoit Lavigne, délégué général de la Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC) qui couvre notamment les entreprises de chaudières et de climatisation.
"La décarbonation de l'économie est l'un des plus gros chantiers industriels à venir, et ne pourra pas se faire en décroissance, il faut inciter les gens à investir", ajoute-t-il.
Pour Alexandre Saubot, les grandes priorités pour soutenir à la fois l'industrie et les comptes publics du pays devront désormais porter sur "les réformes structurelles" à mener.
"Il faudra travailler plus pour ramener de l'argent à l'Etat sous forme de cotisations, mais aussi remettre de la responsabilité dans tous nos dispositifs d'assurances sociales, en responsabilisant individuellement les acteurs", affirme-t-il.
"Si les réformes structurelles ne sont pas menées nous doutons du côté temporaire annoncé des hausses d'impôts", ajoute-t-il.
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