Dans la région des champs Phlégréens, en Italie, une remontée lente du niveau du sol, appelée bradyséisme, a mis au jour un édifice de l’époque impériale le 26 février.
C’est un phénomène scientifique extraordinaire. Sur les rives du lac Fusaro, dans la ville antique de Bacoli en Italie , plusieurs vestiges romains immergés depuis des siècles ont refait surface le 26 février dernier, comme révélé par le quotidien napolitain Il Mattino . D’après les premières observations des archéologues, il s’agirait des restes d’une villa ou d’un édifice annexe datant de l’ époque impériale qui s’étend de -27 av. J.-C. à 476 apr. J.-C.
Cette formidable découverte est le fruit d’un phénomène volcanique caractéristique de la région des champs Phlégréens , située à 9 kilomètres du nord-ouest de Naples . Dans cette caldeira - nom donné à un cratère volcanique - qui a vécu deux éruptions majeures il y a 36 000 et 14 000 ans, les sols se soulèvent ou s’affaissent sur une période de plusieurs années ou siècles en raison de l’accumulation de gaz volcaniques dans les roches poreuses. On appelle cela le bradyséisme.
Une ancienne maison maritime ?
Les spécialistes indiquent aux journalistes italiens que ce phénomène et celui de la marée basse sont à l’origine de la récente découverte de Bacoli. « Grâce à la remontée des fonds marins, provoquée par le bradyséisme, on peut aujourd'hui admirer des zones en opus reticulatum (une technique de maçonnerie romaine, NDLR) » , se réjouit le maire de la ville, Josi Gerardo Della Ragione, sur ses réseaux sociaux. Ainsi, murs et pièces de l’époque romaine sont désormais visibles.
« [Ces zones] sont habitées par des canards dans le bassin lacustre, à quelques pas de la Casina Vanvitelliana » , remarque également l’élu. Cet édifice est un pavillon de chasse construit par les Bourbon-Siciles au XVIII e siècle, trônant sur le lac Fusaro. Pour la petite histoire, les poissons de ce lac napolitain sont mentionnés dans Le Comte de Monte-Cristo d’ Alexandre Dumas . « Un voyage entre merveilles bourboniennes et vestiges impériaux » , décrit avec émerveillement Josi Gerardo Della Ragione.
Tout porte à croire que ces vestiges nouvellement immergés font partie des anciennes installations thermales romaines des Grottes dell’Acqua, où les villas abritaient des infrastructures dédiées à l’agriculture, à la pêche et à l’aquaculture. Il se pourrait alors que le bâtiment, dévoilé par le bradyséisme, soit une ancienne maison maritime avec pêcherie. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que l’affaissement ou le soulèvement des sols transforme le paysage de la région. Le parc archéologique de Baïes , composé de plusieurs complexes thermaux, avait lui aussi été submergé par les eaux il y a plusieurs siècles, avant de refaire surface en juillet 2023.
Agir vite pour documenter et protéger
Le bradyséisme a également permis la découverte d’autres vestiges impressionnants dans la cité romaine de Pouzolles, l’une des grandes villes de la caldeira des champs Phlégréens. Il Mattino indique que d’anciens entrepôts, des temples et peut-être même un petit phare situés dans les quartiers antiques de Lartidianus et Annianus deviennent « de plus en plus visibles avec la montée progressive du sol ».
Le phénomène est apprécié par les archéologues italiens, car il leur permet de mettre au jour des éléments oubliés de l’Antiquité. Mais il inquiète aussi en matière de préservation du patrimoine. « Aujourd’hui, le bradyséisme nous permet d’observer des vestiges archéologiques qui étaient autrefois submergés, mais nous devons agir rapidement pour les documenter et les protéger », constate Mariano Nuzzo, surintendant archéologique interrogé par le quotidien italien.
L’un des quartiers de Pouzolles, celui du Rione Terra, est le plus touché par le bradyséisme dans la région. En février 2024, son sol s’est élevé de 121 centimètres, dont 88 centimètres depuis 2016. Sur la dernière année, il a gagné encore 20 centimètres. « Nous travaillons avec des instituts de recherche et des universités pour surveiller ces évolutions, en utilisant des technologies avancées comme la photogrammétrie et les scanners laser sous-marins » , conclut Mariano Nuzzo.
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