
Le 15e baromètre de la conduite responsable de la Fondation Vinci autoroutes estime le temps de conduite moyen sans pause des Français à 2H48, bien au-dessus des deux heures préconisées par la Sécurité routière ( AFP / ERIC CABANIS )
"Parfaitement reposé", Philippe Luquet, 76 ans, relève la toile de son transat couvert installé vendredi sur l'espace sieste de l'aire de Limours-Janvry (Essonne), sur l'autoroute A10. En plein week-end de chassé-croisé de l'été, le moment est au calme et à la sérénité pour ce vacancier en transit.
Il y a quelques secondes, les mocassins bleus du retraité dépassaient encore de son "cocon", au milieu de poufs mis à disposition par la Fondation Vinci autoroutes. "C'est l'objectif, si vous pouvez faire une petite pause et repartir plus apaisé", lui adresse Chloé Baffray, 22 ans, animatrice, tablette sous le bras avec le podcast de méditation proposé au conducteur pour ses quinze minutes de repos.
Ces espaces destinés à la sieste dite "flash", de vingt minutes maximum, existent depuis 2011 sur les espaces de Vinci autoroutes, les vendredis et samedis estivaux. "L'été, (...) c'est aussi un temps où les conducteurs font des trajets plus longs", corrélés à de "mauvaises habitudes", soulève Maxence Berthon, chargé de projet de la fondation.
Se coucher tard pour finir ses préparatifs, mal dormir à cause du stress induit par le voyage, sont "des facteurs qui vont, peut-être, faire survenir la somnolence au volant", rappelle M. Berthon.
Le 15e baromètre de la conduite responsable de la Fondation Vinci autoroutes estime le temps de conduite moyen sans pause des Français à 2H48, bien au-dessus des deux heures préconisées par la Sécurité routière.
Pour ce week-end qui voit se cotoyer "juilletistes" et "aoûtiens", Bison Fûté a annoncé une circulation très dense, avec une journée noire samedi. L’autoroute A10, qui relie l'Ile-de-France à la Nouvelle-Aquitaine en passant par le Centre Val-de-Loire, est particulièrement concernée.
Julien Lambert, 45 ans, a 1.100 km à parcourir, de Lens (Pas-de-Calais) au Barcarès (Pyrénées-Orientales). Installé sur un coussin, il fait une pause après le déjeuner avec sa femme et ses enfants. "La somnolence au volant, je connais, parce que comme je commence très tôt le travail, ça m'est déjà arrivé de m'endormir une fois. (...) j'ai failli brûler un feu rouge", raconte le père de famille.
Cette fois, ils sont donc partis un jour plus tôt, pour passer une nuit à Clermont-Ferrand et pouvoir faire plus de pauses sur leur trajet.
La somnolence au volant a été à l’origine de 19% des accidents mortels sur autoroute en 2024, derrière la prise d’alcool, drogues ou médicaments (35%), la vitesse excessive (20%) et la présence de piétons (20%), selon l’Association des sociétés françaises d’autoroutes.
- "Rester concentré" -
Cette année, les utilisateurs des espaces de sieste sont aussi invités à répondre à un questionnaire d'auto-évaluation permettant de prédire le risque d’accidents liés à la somnolence, fruit d'une étude sur la conduite et les comportements de sommeil de plus de 33.000 usagers de péages autoroutiers.
"Les gens se mettent en dette de sommeil de manière chronique tout au long de l'année", explique Pierre Philip, chef du service universitaire de médecine du sommeil au CHU de Bordeaux et responsable de l’étude financée par la fondation Vinci autoroutes. Environ "20% des Français dorment moins de six heures" par nuit, augmentant ainsi grandement leur risque d’accident, précise-t-il.
En cas de somnolence, la sieste est prioritaire, mais le professeur préconise "sept heures de sommeil, sept nuits par semaine, avec un horaire de lever régulier. Et si, malgré cela, on reste quand même somnolent, il faut aller consulter".
Sur la route, "le message essentiel, c'est de rester concentré", appuie Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la Sécurité routière. Car si la somnolence n'est plus la cause principale de mortalité sur l'autoroute, c'est parce que d'autres facteurs d'inattention augmentent, comme l'utilisation du téléphone portable au volant, indique-t-elle.
A la fin d'une sieste, les usagers sont invités à se dégourdir les jambes avant de reprendre la route. "Très bonne idée, à généraliser dans toute la France", lance Philippe Luquet en se levant avec difficulté de son transat.
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