La prime affichée par les titres souverains américains à 10 ans par rapport aux titres d'Etat allemands à maturité comparable devrait afficher sa plus forte baisse trimestrielle depuis la crise de 2008, ce alors que les politiques budgétaires ont profondément évolué de part et d'autre de l'Atlantique.
L'écart de taux ("spread") entre les deux titres a perdu 62 points de base depuis le début de l'année, à 158 pb.
Cet écart reflète la divergence de politique monétaire et de trajectoire économique, et il est crucial dans la détermination des flux d'investissement et du taux de change entre l'euro et le dollar - des paramètres qui déterminent à leur tour la balance commerciale, les niveaux d'inflation et les revenus des entreprises.
Or, depuis le début de l'année, l'Allemagne a approuvé un plan d'investissement massif, faisant s'envoler les rendements du Bund, tandis que les mesures prises par Donald Trump font s'inquiéter les marchés de la trajectoire économique aux États-Unis, ce qui a fait pression sur les rendements des bons du Trésor.
"La politique budgétaire est désormais la principale raison de la divergence entre la zone euro et les États-Unis", résume Athanasios Vamvakidis, responsable de la stratégie devises chez BofA.
Certains analystes estiment que l'écart de taux pourrait chuter sous les 100 points de base, un niveau jamais vu depuis 2013.
"En cas de récession [aux Etats-Unis, NDLR], les rendements des bons du Trésor s'effondreraient et l'écart de taux retrouverait ses niveaux de 2000 à 2009, période durant laquelle il atteignait 30 pb en moyenne", explique Padhraic Garvey, responsable de la recherche Amériques chez ING.
Une récession n'est pas pour ING le scénario principal pour l'économie américaine, Padhraic Garvey tablant sur un rendement de 3% à 3,5% pour le Bund et de 4,3% pour les titres américains.
"Les consommateurs craignent d'éventuels licenciements, dans le secteur public, mais aussi dans le secteur privé", nuance toutefois Thierry Wizman, stratège chez Macquarie.
"Les entreprises souffrent de l'incertitude autour des droits de douane. Tout cela plaide pour des rendements américains plus faibles", ajoute le stratège qui ne juge "pas inconcevable" de voir un écart de taux inférieur à 100 points de base.
APPETIT POUR LES BUNDS
Barclays estime que le rendement du Bund à dix ans toucherait 3%, contre 2,8% actuellement, si les risques de droits de douane ne se matérialisent pas ou sont moins importants que prévu.
Des rendements plus élevés attirent les capitaux des investisseurs: le resserrement de l'écart de taux entre les États-Unis et l'Allemagne a soutenu l'euro qui a pris 4% au premier trimestre, sa meilleure performance trimestrielle depuis fin 2023.
"L'intérêt pour l'Europe est surprenant au sein des investisseurs américains", remarque Reinout De Bock, stratège chez UBS.
"Depuis la crise de l'euro, je n'ai pas vu autant d'intérêt pour l'Europe depuis New York, mais les clients ont du mal à évaluer dans quelle mesure l'Allemagne profiterait davantage en termes de croissance que d'autres pays (de la zone euro)", a-t-il ajouté.
Vasileios Gkionakis, économiste chez Aviva, estime quant à lui que le lien entre la croissance du PIB nominal et les rendements à long terme pourrait porter le rendement du Bund à dix ans à 3,5%, voire 4%.
(Rédigé par Stefano Rebaudo, version française Corentin Chappron, édité par Blandine Hénault)
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