
Fraîchement retraité, Jacques se lance avec passion dans la collection de montres de luxe. Avant sa première vente aux enchères, il s’informe sur les rouages du marché, la conservation des pièces et la fiscalité liée à leur transmission. ( crédit photo : Getty Images )
Sommaire:
- Jacques, un retraité passionné d’horlogerie
- Les ventes aux enchères: un univers codifié, transparent et fascinant
- Les frais d’adjudication: un coût à bien anticiper
- Jacques achète sa première montre, un moment décisif
- Comment assurer et conserver ses montres?
-
Étape suivante: construire progressivement sa collection - Transmission aux petits-enfants: la donation en nue-propriété
-
Quelques reventes bien senties… - Les frais d’enchères: de fortes disparités
Jacques, un retraité passionné d’horlogerie
Jacques vient tout juste de prendre sa retraite à 65 ans, après une carrière d’ingénieur dans le secteur aéronautique. Actif, méthodique et passionné de mécanique de précision, il s’est toujours intéressé à l’horlogerie, sans jamais oser franchir le pas de l’achat de montres de collection. Aujourd’hui, avec du temps libre et une épargne sécurisée, Jacques souhaite se faire plaisir. Son projet est clair: se constituer progressivement une petite collection de montres haut de gamme, à la fois par passion, mais aussi avec un double objectif:
- En revendre une partie pour réaliser de belles plus-values,
- En transmettre une autre partie à ses petits-enfants le moment venu.
Pour la première fois, il va assister à une vente aux enchères organisée par une grande maison parisienne. Mais avant d’enchérir, il prend soin de comprendre le fonctionnement de ces ventes un peu particulières.
Les ventes aux enchères: un univers codifié, transparent et fascinant
Les ventes aux enchères sont organisées par des sociétés de ventes volontaires agréées et sous contrôle judiciaire. Tous les lots sont décrits dans un catalogue détaillé et publié à l’avance. Pour chaque montre proposée, le descriptif inclut obligatoirement:
- la marque et le modèle,
- l’année de fabrication,
- l’état général (révision récente, usure, traces d’usage),
- la présence éventuelle du «full set» (boîte, papiers, certificats d’authenticité),
- l’estimation de prix.
Jacques découvre que la transparence est au cœur du processus de vente. Chaque lot est présenté lors d’une exposition préalable, parfois sur plusieurs jours. Il peut examiner lui-même les montres, les essayer, poser des questions aux experts. Ces derniers fournissent volontiers des précisions sur l’authenticité, la révision et même l’intérêt patrimonial de la pièce.
Le jour de la vente, l’ambiance est solennelle: le commissaire-priseur dirige les enchères en annonçant les montants croissants. Jacques observe d’abord quelques ventes avant de se lancer. Les premiers lots s’enchaînent rapidement: une Omega Speedmaster vendue 5500 euros, une Rolex Submariner adjugée 9800 euros, une Audemars Piguet Royal Oak à 25.000 euros. Jacques est fasciné par ces montres et la façon dont elles se vendent.
Les frais d’adjudication: un coût à bien anticiper
Lorsqu’un lot est adjugé, l’acquéreur doit payer:
- Le prix marteau (c’est-à-dire le dernier prix atteint lors des enchères, lorsque le commissaire-priseur prononce: «adjugé»),
- Les frais d’adjudication. Ceux-ci représentent souvent entre 20% et 30% du prix marteau, en fonction des maisons de vente (voir encadré).
Ainsi, lorsqu’un lot est adjugé à 10.000 euros, l’acquéreur règle en réalité 12.400 euros à 13.000 euros, frais inclus.
Jacques doit aussi tenir compte des spécificités liées aux ventes aux enchères. Exemples:
- certaines ventes appliquent des frais dégressifs au-delà d’un certain montant,
- des frais additionnels peuvent exister si la maison de vente assure l’expédition ou le stockage.
Jacques achète sa première montre, un moment décisif
Avec toutes ces informations emmagasinées, Jacques est prêt à se lancer. Il jette son dévolu sur le lot n°23: une Patek Philippe Calatrava vintage de 1970, présentée en excellent état avec sa boîte d’origine. Le catalogue annonce une estimation comprise entre 16.000 euros et 20.000 euros. Le commissaire-priseur ouvre les enchères à 15.000 euros, prix de départ fixé par le vendeur. Pendant quelques secondes, personne ne se manifeste. Puis un premier enchérisseur propose 15.500 euros. Les offres montent par paliers de 500 euros, les numéros de paddle se lèvent dans la salle, le commissaire-priseur rythme les hausses avec calme. Jacques, un peu fébrile, hésite. La montre atteint rapidement 17.500 euros.
Jacques lève la main pour la première fois. Son numéro est annoncé, il entre officiellement dans la course. Un autre collectionneur renchérit aussitôt à 18.000 euros. Jacques hésite un instant, puis relance à 18.500 euros. La tension est palpable. Après quelques secondes de silence, plus personne ne surenchérit. «Adjugé à 18.500 euros, monsieur!» Le marteau s’abat: Jacques vient d’acquérir sa première pièce! Avec 25% de frais, son acquisition lui revient à 23.125 euros. Cela correspond budget qu’il comptait mettre dans ce premier achat.
Comment assurer et conserver ses montres?
Une fois son achat réalisé, Jacques s’organise pour assurer sa montre. Il sait bien que son assureur habitation classique plafonne les garanties et contacte donc un courtier spécialisé. Ce dernier lui propose une expertise officielle (pour un coût de 300 euros) et une police d’assurance dédiée, couvrant le vol, la casse, la perte et les sinistres domestiques, avec une prime annuelle de 0,9% de la valeur assurée.
En contrepartie, l’assureur impose certaines obligations strictes:
- conserver les montres dans un coffre-fort agréé et certifié,
- fournir un justificatif d’achat et l’expertise mise à jour en cas de revalorisation,
- limiter le port quotidien des pièces les plus précieuses afin de réduire les risques d’accident ou de vol.
Jacques comprend rapidement que pour rester bien couvert, il devra respecter rigoureusement ces exigences contractuelles. En cas de sinistre, toute négligence sur les mesures de conservation pourrait entraîner une réduction voire un refus d’indemnisation.
Étape suivante: construire progressivement sa collection
Fort de cette première acquisition réussie, Jacques décide de planifier soigneusement l’enrichissement de sa collection. Plutôt que de multiplier les achats impulsifs, il adopte une approche raisonnée et patiente. Il identifie en amont les modèles recherchés pour leur qualité horlogère, leur prestige et leur potentiel de valorisation future. Jacques se fixe un objectif annuel: acquérir une à deux pièces emblématiques par an, en fonction des opportunités offertes par les catalogues de ventes et des tendances du marché. Il consulte régulièrement les calendriers des grandes maisons d’enchères, participe à des expositions préalables, échange avec des experts et d’autres collectionneurs pour affiner ses choix.
Rapidement, il complète sa collection avec des montres iconiques: une Rolex Daytona pour son prestige sportif, une Vacheron Constantin Overseas pour sa polyvalence et une Jaeger-LeCoultre Reverso, véritable symbole d’élégance classique. À chaque nouvelle acquisition, Jacques veille à faire réaliser une expertise actualisée afin de tenir à jour la valorisation de sa collection auprès de son assureur.
Il diversifie aussi ses canaux d’achat en participant ponctuellement à des ventes privées et en suivant certaines plateformes spécialisées, tout en restant vigilant sur la provenance et l’état des pièces. Pour chaque nouvelle montre, il conserve systématiquement tous les éléments constitutifs du «full set» (certificat, boîte, facture, historique de révision), sachant que ces documents sont déterminants pour la revente ou la transmission future.
Transmission aux petits-enfants: la donation en nue-propriété
Jacques envisage de transmettre certaines montres à ses petits-enfants. Avec son notaire, il étudie l’intérêt de réaliser des donations en nue-propriété:
- Jacques conserve l’usufruit (droit d’usage et de conservation) tant qu’il est vivant, ce qui lui permet de continuer à les porter, mais aussi de les conserver, gérer leur assurance et leur entretien. Il souhaite laisser ses petits-enfants à l’écart de cette charge financière et mentale,
- ses petits-enfants reçoivent la nue-propriété, avec une fiscalité avantageuse: abattement de 31.865 euros chacun tous les 15 ans. Fort de cette information, Jacques échelonne la transmission de son patrimoine horloger,
- à son décès, les montres intègrent automatiquement le patrimoine des petits-enfants, sans droit de succession supplémentaire à régler.
Grâce à cette stratégie, Jacques allie passion horlogère, gestion patrimoniale et transmission anticipée.
Quelques reventes bien senties…
Outre la transmission, Jacques envisage également l’éventualité de revendre certaines pièces si les marchés horlogers venaient à fortement s’apprécier. Or, la cession de montres de collection constitue une opération taxable dès lors que le prix de vente dépasse 5000 euros.
Deux régimes fiscaux peuvent s’appliquer:
- Par défaut, la taxe forfaitaire sur les objets précieux (TOF) s’élève à 6% du prix de vente (plus 0,5% de CRDS), sans possibilité de déduction des frais ou de la durée de détention.
- Sur option expresse, Jacques peut choisir le régime des plus-values sur biens meubles. Ce régime permet d’appliquer un abattement progressif de 5% par année de détention au-delà de la deuxième année, aboutissant à une exonération totale après 22 ans de détention. La plus-value nette est alors soumise au taux global de 36,2% (19% d’impôt + 17,2% de prélèvements sociaux).
En attendant, Jacques conserve soigneusement ses factures d’achat, certificats d’expertise et tous les justificatifs permettant de reconstituer le prix d’acquisition et les éventuels frais (commission d’achat, expertise, assurance). Cette documentation est essentielle pour pouvoir justifier du régime des plus-values et calculer correctement l’impôt en cas de revente future.
Les frais d’enchères: de fortes disparités
Les frais d’adjudication varient selon les maisons de ventes et les canaux de vente. Dans les grandes maisons internationales spécialisées dans le luxe, les frais d’adjudication atteignent fréquemment 25% à 30% du prix marteau. Les maisons françaises traditionnelles affichent plutôt des commissions autour de 20% à 24%, tandis que les plateformes de ventes aux enchères exclusivement en ligne peuvent cumuler divers frais techniques alourdissant sensiblement le coût total, parfois au-delà de 30%. Par ailleurs, lorsque certaines montres proviennent de vendeurs situés hors Union européenne, Jacques doit également intégrer d’éventuels droits de douane et une TVA à l’importation, qui s’élève à 5,5% en France pour les montres de collection.
A noter
Certaines maisons proposent des frais réduits lors de ventes thématiques pour attirer les collectionneurs réguliers, afin de stimuler le marché sur certains segments très convoités.
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