La présidente du groupe Rassemblement national à l'Assemblée nationale, Marine Le Pen, applaudit avec d'autres membres du RN durant l'examen des textes de ce parti le 30 octobre 2025 à Paris ( AFP / Anne-Christine POUJOULAT )
Les députés ont adopté jeudi une proposition de résolution du Rassemblement national visant à "dénoncer" l'accord franco-algérien de 1968. Une première "historique" pour le parti d'extrême droite, obtenue à une voix près avec l'appui des groupes LR et Horizons.
Le piège a fonctionné, semant le trouble jusque dans les rangs macronistes. Maître de l'ordre du jour dans l'hémicycle toute la journée, dans le cadre de sa "niche" parlementaire, le RN a engrangé une victoire inédite dès son premier texte. Et sur un sujet hautement symbolique: la convention du 27 décembre 1968 entre la France et l'Algérie.
Cet accord, signé six ans après la fin de la guerre d'Algérie, crée un régime d'immigration favorable pour les Algériens, qui n'ont pas besoin de visa spécifique pour rester plus de 3 mois dans l'Hexagone et accèdent plus rapidement que les autres étrangers aux titres de séjour pour 10 ans, y compris dans le cadre du regroupement familial.
Réclamée de longue date par la droite et l'extrême droite, la dénonciation de ce traité a donc obtenu une majorité, de justesse: avec 185 voix contre 184, soit la totalité des troupes de Marine Le Pen et de son allié UDR Éric Ciotti, mais aussi la moitié des groupes LR et Horizons.
"Quand le RN porte des projets ou des convictions que nous partageons, il n'y a aucune raison (...) de ne pas voter ce que nous voulons pour notre pays", a justifié le chef des élus de droite, Laurent Wauquiez.
- Le Pen triomphante -
Du côté du parti d'Édouard Philippe également, "nous demandons cette dénonciation", a rappelé le député Sylvain Berrios, soutenant un texte présenté comme "un mandat donné au gouvernement pour qu'il fasse son travail".
La présidente du groupe Rassemblement national à l'Assemblée nationale, Marine Le Pen, après l'adoption d'une résolution de son parti dénonçant l'accord franco-algérien de 1968, le 30 octobre 2025 à Paris ( AFP / Anne-Christine POUJOULAT )
Une position à rebours de celle de l'exécutif. Le ministre des Relations avec le Parlement, Laurent Panifous, a d'ailleurs fait part de son incompréhension auprès de l'AFP. Auparavant, il avait expliqué à la tribune que Paris entendait "privilégier la voie de la renégociation dans le cadre d'un dialogue exigeant" avec Alger, car il n'y aurait "rien à gagner à une aggravation de la crise" déjà prégnante entre les deux pays.
Mais désormais, "il faut que le gouvernement tienne compte du vote de l'Assemblée nationale", a jugé une Marine Le Pen triomphante, se félicitant d'une "journée que l'on peut qualifier d'historique" pour son parti, dont les initiatives ont toujours fait l'objet d'une opposition de principe au Palais Bourbon.
Le ministre des Relations avec le Parlement, Laurent Panifous, à l'Assemblée nationale le 30 octobre 2025 ( AFP / Anne-Christine POUJOULAT )
Un barrage qu'a de nouveau tenté d'ériger la gauche en dénonçant, à l'instar de l'Insoumis Bastien Lachaud, les "lubies racistes" et "l'obsession morbide" d'un RN qui "rejoue à l'infini la guerre d'Algérie".
Mais ni LFI, ni les socialistes, les écologistes et les communistes n'ont fait le plein, avec 143 voix cumulées contre le texte sur un total de 195.
Les critiques se sont toutefois concentrées sur Gabriel Attal et son groupe Ensemble pour le République, dont seulement 30 députés ont voté contre le texte. Telle était pourtant la consigne, selon un cadre attaliste, quand bien même le leader du parti Renaissance avait lui-même appelé à dénoncer l'accord de 1968.
- Attal absent et critiqué -
L'intéressé s'est surtout fait remarquer par son absence lors du débat et du vote - il participait au même moment à un forum sur la transformation durable du tourisme.
"Ils étaient où les macronistes?" a réagi le patron du PS Olivier Faure. "Cette voix qui nous a manqué pour faire face au RN, c'est celle de Gabriel Attal", a même affirmé la cheffe du groupe écologiste Cyrielle Chatelain.
Dans la foulée de ce coup de théâtre, le RN espère décrocher une deuxième victoire sur sa proposition de loi pour rétablir le délit de séjour irrégulier, idée également "majoritaire au sein de l'Assemblée", selon Marine Le Pen.
Le même rapport de forces semblait en tout cas se dessiner avant le déjeuner, avec l'appui de LR et Horizons. Les premiers revendiquant la paternité originelle de cette mesure instaurée sous Nicolas Sarkozy et abrogée sous François Hollande - "une faute politique et morale" selon Eric Pauget. Les seconds se plaçant dans la même filiation avec la "volonté de restaurer l'autorité de l'Etat", a souligné Xavier Albertini.
Positions toujours contraires à celle du gouvernement, qui "ne soutiendra pas" un texte qualifié de "posture simplement démagogique" par le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez, et des macronistes qui ont dénoncé "l'archétype de la loi d'affichage" par la voix de Thomas Cazenave.

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