
L'ancien président colombien Alvaro s'adresse à la presse à la fin de son procès à Bogota le 10 février 2025 ( AFP / Raul ARBOLEDA )
La justice colombienne a annulé mardi la condamnation de l'ex-président Alvaro Uribe pour des pressions sur des témoins afin de cacher ses liens présumés avec des paramilitaires.
En première instance en août, l'ex-président (2002-2010), âgé de 73 ans, avait été condamné à 12 ans d'assignation à résidence pour subornation de témoins et fraude procédurale. Il était ainsi devenu le premier ancien président de Colombie condamné pénalement et privé de liberté.
Après avoir passé une vingtaine de jours en détention à domicile, il avait été autorisé par la justice à être libre le temps de la procédure en appel.
Mardi, le juge du tribunal de Bogota a annulé sa condamnation pour les deux chefs d'accusation, faute de preuves. Il a déclaré illégaux les enregistrements présentés comme preuves, et signalé des failles dans la "méthodologie" de la juge qui avait statué en première instance.
L'audience, à laquelle l'ancien président a assisté virtuellement, a pris fin après six heures de lecture du verdict.
Le sénateur de gauche Ivan Cepeda, auteur de la plainte contre M. Uribe, a annoncé qu'il déposerait un recours en cassation devant la Cour suprême de justice.
Lors d'une conférence de presse, il a dit accueillir avec "sérénité" la décision du tribunal, qu'il "respecte" même s'il n'est "pas d'accord" avec elle.
Alvaro Uribe était accusé d'avoir cherché à soudoyer des témoins afin d'éviter d'être associé aux milices d'extrême droite ayant livré une guerre sanglante aux guérillas en Colombie.
- "Gouvernance paramilitaire" -
M. Uribe demeure une figure-clé de la scène politique en Colombie, où il exerce une grande influence sur la droite, dans l'opposition depuis que le premier président de gauche du pays, Gustavo Petro, a pris ses fonctions en 2022.
La décision de mardi donne un nouvel élan à la droite en vue de la présidentielle de 2026. L'une des candidates proches de M. Uribe n'a pas exclu qu'il se présente au Sénat ou à la vice-présidence.
"C'est ainsi qu'on dissimule l'histoire de la gouvernance paramilitaire en Colombie, c'est-à-dire l'histoire des politiciens qui sont arrivés au pouvoir alliés aux narcotrafiquants et qui ont déclenché le génocide en Colombie", a vivement réagi sur X le président Petro, ennemi politique de M. Uribe. Il a appelé à des manifestations pour vendredi.

Un portrait de l'ancien président Alvaro Uribe lors d'un rassemblement de soutien à Medellin, le 7 août 2025 en Colombie ( AFP / JAIME SALDARRIAGA )
Cette affaire, très médiatique, a commencé en 2018 lorsque la Cour suprême a ouvert une enquête sur les liens présumés de M. Uribe avec les paramilitaires, face aux accusations du candidat à la présidence Ivan Cepeda.
L'ancien paramilitaire Juan Guillermo Monsalve a affirmé que l'avocat de M. Uribe avait tenté de le soudoyer. La justice a condamné l'avocat Diego Cadena à sept ans de prison à domicile pour corruption.
L'ex-président a toujours nié tout lien avec les paramilitaires et soutient que l'affaire est une persécution politique de la gauche.
Son nom apparaît également dans au moins trois autres enquêtes, sur la création et le financement d'un groupe paramilitaire, plusieurs tueries, et le meurtre d'un défenseur des droits de l'Homme. Toutes sont entre les mains du parquet colombien.
- "Chasse aux sorcières" -
Gustavo Petro a interpellé le président américain Donald Trump, avec qui il entretient des relations notoirement tendues et qui soutient ouvertement Alvaro Uribe.
"Maintenant Trump, allié avec ces politiciens et avec Uribe, cherchera la sanction contre le président qui a dénoncé dans sa vie les alliances entre le pouvoir politique colombien et le narcotrafic paramilitaire en Colombie", a-t-il affirmé sur X.
Le chef de la diplomatie Marco Rubio a répondu en affirmant que "la justice (avait) prévalu en Colombie (...) après des années de chasse aux sorcières politique" contre M. Uribe et sa famille.
Alvaro Uribe est très populaire pour sa lutte féroce contre la guérilla pendant ses deux mandats consécutifs. Cependant, les autorités ont enregistré à cette époque de graves violations des droits humains, comme l'assassinat par l'armée de milliers de civils, présentés à tort comme des guérilleros morts au combat.
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