L’ère Trudeau a pris fin cette nuit au Canada avec l’élection de l’ancien gouverneur de la banque nationale, un homme sans expérience politique qui devra, pour rester premier ministre, gagner les élections générales prévues au plus tard en octobre.
Son manque d’expérience politique a joué en sa faveur. Cette nuit, Marck Carney, 59 ans, banquier d’envergure mondiale, a été élu à la tête du parti libéral canadien et donc du Canada puisque Justin Trudeau, charismatique premier ministre depuis 2015, très impopulaire ces dernières années, a démissionné en janvier. Dans la compétition pour lui succéder, Mark Carney affrontait Chrystia Freeland, l’ex ministre des Finances. Très proches, le premier est le parrain du fils de la seconde, Carney et Freeland défendaient des programmes semblables sur plusieurs points comme la réduction des impôts des classes moyennes.
Si Carney a devancé Freeland, c’est sans doute grâce à son profil techno, novice en politique. Il a l’air sérieux mais pas usé. Ancien gouverneur de la banque du Canada au pire moment de la crise financière entre 2008 et 2012 - ses décisions furent alors saluées - puis de la banque d’Angleterre, ce catholique pratiquant n’est pas associé à l’ère Trudeau. Les électeurs l’estiment même capable de gommer son héritage négatif : l’inflation et la crise du logement pour laquelle il défend la construction de maisons préfabriquées à coût modique. «Je suis un pragmatique, a-t-il déclaré lors du premier débat . Lorsque je vois des problèmes, je les règle.»
Droitisation du programme
Originaire de Fort Smith aux confins de l’Arctique, ce fils d’une institutrice et d’un directeur d’école, ensuite nommé professeur d’histoire de l’éducation à l’université d’Alberta, est diplômé d’Harvard puis d’Oxford. Pendant treize ans, cet anglophone au français malhabile a travaillé pour Goldman Sachs avant d’être nommé sous-gouverneur de la banque du Canada puis haut fonctionnaire à des postes clefs où sa maîtrise des sujets et sa belle gueule lui ont valu le surnom du Georges Clooney de la finance.
Pour demeurer en poste au-delà des quelques prochains mois, Carney devra battre l’ultraconservateur Pierre Poilievre aux élections générales initialement prévues fin avril, début mai, mais qui peuvent se tenir au plus tard en otobre. Afin de déstabiliser son adversaire, Carney a droitisé son programme en supprimant par exemple l’impopulaire taxe carbone sur les ménages, l’une des rares mesures environnementales du Canada.
L’homme que choisiront les électeurs aura pour première mission de tenir tête à Donald Trump qui, ces derniers temps, mène une guerre commerciale à son voisin et a laissé entendre que l’annexion de ce «pays brisé» pouvait faire partie de ses projets. Selon un sondage de l’institut Angus Reid de la semaine dernière, Carney est le choix préféré des Canadiens pour affronter le président américain, avec 43% des sondés qui le plébiscitent contre 34% pour Poilievre - dont les idées «anti woke» ressemblent à celles de Trump.
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