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Cahiers de doléances des "gilets jaunes" : que sont ces archives que Bayrou veut rouvrir?
information fournie par Boursorama avec Media Services 16/01/2025 à 16:07

François Bayrou, comme son prédécesseur à Matignon Michel Barnier, souhaite "reprendre l'étude" des cahiers de doléances remplis au moment de la crise des "gilets jaunes", reflet des revendications de ce mouvement social et politique de 2018-2019. Que sait-on de ces documents?

(illustration) ( AFP / IAN LANGSDON )

(illustration) ( AFP / IAN LANGSDON )

De quoi s'agit-il ?

Dès le début de leur mouvement le 17 novembre 2018, les "gilets jaunes" ont commencé à recenser leurs plaintes et revendications dans des cahiers de doléances sur le modèle de ceux rédigés dans le cadre des Etats généraux avant la Révolution française. Plusieurs dizaines de milliers de contributions ont ensuite été récoltées en décembre 2018 et janvier 2019 dans les mairies, puis regroupées par des associations de maires. La CGT a de son côté ouvert des "cahiers d'expression populaire".

Dans le cadre du Grand débat national organisé par Emmanuel Macron entre le 15 janvier et le 15 mars 2019, des "cahiers citoyens et d'expression libre" ont ensuite été ouverts dans les mairies et les permanences des partis de la majorité présidentielle.

Ces cahiers peuvent-ils être utiles aujourd'hui ?

"Ce qu'on lit dans ces cahiers de doléances n'est pas anachronique" car "les personnes qui ont participé à ce dispositif proposent ce qui leur semble être de l'intérêt général", rapporte à l'AFP Manon Pengam, maîtresse de conférences en sciences du langage à l'Université de Cergy, qui travaille depuis 2022 sur les cahiers du département de la Creuse.

Parmi les revendications de ces cahiers - qui n'ont "pas nécessairement, voire très peu été rédigés par des gilets jaunes"- elle cite l'instauration d'un referendum d'initiative citoyenne (RIC), "un meilleur contrôle sur les élus", l'"amélioration des conditions de vie" ou encore le sujet "omniprésent" des retraites, ou du sentiment d'"isolement, d'abandon".

"La crise démocratique qu'on traverse est lisible dans ces cahiers", c'est "une lame de fond qu'on a pas su, pas voulu écouter", dit cette chercheuse, "assez dubitative" sur cette "agitation autour des cahiers" alors que "depuis six ans au niveau de l'Etat, il ne se passe pas grand chose".

"Les problèmes soulevés par ce mouvement et par ce qu'on sait par bribes de ces cahiers de doléances sont des sujets qui n'ont pas été traités", estime aussi l'historien Stéphane Sirot.

Selon lui, "on pourrait aussi interpréter cette façon de revenir sur les cahiers de doléances de la part des deux Premiers ministres comme une déconnexion par rapport au pays réel" car "des politiques qui sont ancrés en profondeur dans le corps social sont censés avoir quand même un minimum de connaissances des problèmes qui existent sur le territoire".

Comment les cahiers sont-ils accessibles ?

Les cahiers de doléances sont aujourd'hui conservés dans les archives départementales, une institution qui date de la Révolution française, rappelle à l'AFP Magali Della Sudda, directrice de recherche au CNRS qui encadre des travaux sur les "gilets jaunes".

"N'importe quelle personne, avec sa carte d'identité, peut aller au centre d'archives situé dans la ville-préfecture et consulter les archives", sauf pour "quelques documents qui sont accessibles uniquement sur dérogation préfectorale" afin de "protéger la vie privée des personnes qui ont contribué aux cahiers", précise-t-elle.

Dans les départements, les archivistes ont fait le tri entre ce qui est consultable immédiatement ou seulement sur dérogation.

En revanche, "les fichiers numérisés qui se trouvent aux archives nationales de France, le fonds d'environ 16.000 cahiers soit 200.000 documents, ne sera accessible que sur dérogation, parce que ces cahiers ont été numérisés avant même que les archivistes n'aient pu en faire l'inventaire et déterminer ce qui est consultable immédiatement ou ce qu'il faut protéger", détaille Mme Della Sudda.

Ces archives numérisées comportent en outre "pas mal d'erreurs de transcription et de pages manquantes", remarque Manon Pengam.

Les chercheuses déplorent enfin le manque de moyens pour exploiter les cahiers.

Lors d'un colloque organisé en décembre dernier à l'Assemblée nationale, elles ont dénoncé la "mise à l'écart de la recherche publique par le président de la République", alors que l'analyse des données du Grand Débat national a été attribuée pour 2,5 millions d'euros à un consortium privé sous la direction du cabinet de conseil Roland Berger, qui a produit des synthèses critiquées.

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