(Avec poursuite du dépouillement) par Lisandra Paraguassu et Gabriel Stargardter BRASILIA, 30 octobre (Reuters) - L'ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva devance le sortant, Jair Bolsonaro, selon les résultats encore partiels du second tour de scrutin, marqué par les accusations portées par des responsables du Parti des travailleurs (PT) de Lula contre la police pour tentative d'entrave au vote dans certaines régions. Après dépouillement des 93,1% des voix, Lula totalisait 50,61% des suffrages validés contre 49,39% pour Jair Bolsonaro. Mais ces chiffres n'incluent pas les résultats de l'Etat de Sao Paulo, considéré comme favorable à Bolsonaro. L'institut de sondage Datafolha a quant à lui annoncé que ses projections donnaient Lula vainqueur. Des alliés de Lula ont déclaré avant la fermeture des bureaux de vote que des policiers avaient arrêté des bus transportant des électeurs alors que les autorités électorales avaient interdit de tels contrôles. Des médias ont rapporté que ces opérations avaient lieu principalement dans le nord-est du pays, région favorable à Lula. "Ce qui s'est passé aujourd'hui est criminel. Rien ne justifie que (la police) installent des barrages le jour de l'élection", a déclaré à la presse Gleisi Hoffman, la présidente du PT. Le Tribunal supérieur électoral (TSE), chargé de l'organisation des élections, a déclaré qu'aucun électeur n'avait été empêché de voter et il a refusé à prolonger l'ouverture des bureaux de vote. Jair Bolsonaro, après avoir voté dans la matinée sur une base militaire à Rio de Janeiro, a dit "s'attendre à la victoire, pour le bien du Brésil". Le président sortant s'est engagé à poursuivre la politique ultra-conservatrice qu'il a mise en oeuvre au cours d'un premier mandat bousculé par la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19. Lula, qui a voté dans une école de Sao Paulo, entend quant à lui se montrer plus responsable sur les plans social et environnemental que son adversaire et améliorer la situation des Brésiliens les plus pauvres et de la classe moyenne. Il a appuyé sa campagne sur le rappel des années de prospérité que le pays a connues lors de son double mandat, entre 2003 et 2010, avant que des scandales de corruption n'entachent sa popularité et celle de son Parti des travailleurs (PT). Les électeurs ont voté grâce à des machines électroniques, un système introduit en 1996 et généralisé au début des années 2000, sans fraude attestée jusqu'à présent, mais critiqué par Jair Bolsonaro qui met en doute, sans preuve à l'appui, son intégrité. Ces déclarations font craindre qu'il puisse contester les résultats en cas de défaite, à l'image de Donald Trump face à Joe Biden en novembre 2020 aux Etats-Unis. POLARISATION Les propos de Jair Bolsonaro sur les machines à voter ont contribué pendant la campagne électorale à une polarisation de la vie politique brésilienne sans précédent depuis la fin de la dictature militaire en 1985, combattue à l'époque par Lula, âgé de 77 ans, lorsqu'il était dirigeant syndical, et que le président sortant, qui a 67 ans, invoque avec nostalgie. Arrivé en tête du premier tour avec 48,3% des suffrages exprimés contre 43,2% pour Bolsonaro, sur un total de 11 candidats, Lula a conservé entre les deux tours un léger avantage dans les sondages mais l'écart s'est resserré dans la dernière semaine de campagne et de nombreux analystes estiment que l'un comme l'autre peut l'emporter, d'autant que les enquêtes d'opinion avaient sous-estimé le score de Jair Bolsonaro le 2 octobre. En cas de victoire, le retour de Lula au sommet de l'Etat prendrait des airs de revanche pour le dirigeant de gauche, qui a passé dix-neuf mois derrière les barreaux après sa condamnation en appel pour corruption en 2018. La Cour suprême a confirmé l'an dernier l'annulation de ses condamnations, donnant libre champ à sa candidature à un troisième mandat présidentiel. Lors de la campagne, Lula a promis de rétablir une politique économique et sociale étatiste qui avait permis, lors de sa présidence, de sortir des millions de Brésiliens de la pauvreté dans un contexte d'envolée du prix des matières premières. Il a également juré de lutter contre la déforestation en Amazonie, qui se poursuit à un rythme sans précédent depuis quinze ans. Jair Bolsonaro, soutenu par une coalition de partis conservateurs et de puissants lobbies agricoles, lesquels ont financé sa campagne, entend poursuivre ses réformes favorables au marché et continuer à abaisser les normes de protection de l'environnement. (Reportage Ricardo Brito, Maria Carolina Marcello, Lisandra Paraguassu et Anthony Boadle; version française Camille Raynaud, Jean-Stéphane Brosse et Marc Angrand)
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