AZF : intérimaire "anonyme" sur le site le jour du drame
Etrange, très étrange, voire même suspect
. Alors quétait examinée vendredi à laudience du procès AZF la piste de lacte volontaire, le témoignage de la courageuse Réjane Boucly fut pour le moins édifiant.
Secrétaire sur le site depuis 2000 pour le compte de la société TMG - sous-traitante de Grande-paroisse, propriétaire de lusine - cette dernière fait état de faits particulièrement surprenants survenus durant la semaine du 21 septembre 2001, jour de la catastrophe.
Principale anomalie constatée : un intérimaire autant anonyme que muet qui sommé à plusieurs reprises de fournir papiers et de se présenter à laccueil sécurité na pas obtempéré. Ce qui fait dire à Serge Biechlin, lancien directeur du site, prévenu à la barre "que chose extraordinaire, il y avait donc sur le site ce jour-là un intérimaire qui travaillait sans vouloir être payé ! "
Notons également pour "planter le décor" et rajouter deux pincées de sel, que cet employé « bénévole » est apparu à chaque fois accompagné par Hassan Jandoubi, lui-même suspecté un moment par la justice dappartenir à une mouvance terroriste, voire même plus, ayant été retrouvé mort sur le site, vêtu dun "accoutrement" que certains estiment être celui dun « kamikaze » islamiste.
Mais revenons en détail aux propos énoncés par Réjane Boucly, chargée de la facturation et de la gestion du personnel de la société TMG et des sous-traitants que cette dernière emploie sur le site.
Venue à la barre pour témoigner des "anomalies" constatées les jours précédents la fatale journée du 21 septembre, lancienne secrétaire précise quun intérimaire est venu "trois fois se traîner dans lusine". Signalée au poste de garde, cette personne na pas daigné bon de se présenter à laccueil sécurité pour régler les aspects sécuritaires et administratifs, tel quil lui avait été demandé.
Alors que Réjane Boucly lui a avait demandé de prendre contact avec la société dintérim Adecco en vue de se faire embaucher par elle, conformément aux accords conclus entre les deux entreprises, linconnu a semble-t-il préférer travailler bénévolement
. Puisque quaucune formalité administrative le concernant na pu être établie, et ceci de son fait.
Craignant le jour de la catastrophe que la personne soit sous les décombres, lancienne secrétaire de TMG en a informé la police, qui semble-t-il sest montré très peu intéressée par le « sujet »
Réjane Boucly lénonce même haut et fort : « à ce jour Mr Do Santos (PJ) ne ma toujours pas présenté les photos pour permettre de l identifier ».
Elle précise par ailleurs, que lors de ses interrogatoires, elle a été "mise en situation émotionnelle difficile", les policiers nhésitant pas à lui parler en ces termes : "si vous continuez, on va vous envoyer Allègre"
.
Autre fait troublant : dans la liste des intérimaires présents sur le site - document remis par son patron chez TMG, Monsieur Bourgeois - deux intérimaires manquent à lappel. Alors que Réjane Boucly lui en fait part, ce dernier refuse de les inclure dans la liste établie dans le cadre de la cellule de la crise mise en place par TMG suite à la catastrophe.
Les deux journalistes dinvestigation, Anne-Marie Casteret et Marc Mennessier, pourtant de fins limiers et très au fait du dossier nont pu mettre la « main » sur les deux personnes concernées.
En tout état de cause, la secrétaire laffirme fermement : toutes deux intérimaires chez ADECCO, elles ont travaillé sur le site dAZF durant la semaine du 21 septembre 2001.
Réjane Boucly confirme par ailleurs que Hassan Jandoubi parlait arabe, ajoutant que le commissaire avait essayé de lui faire dire le contraire.
Lancienne secrétaire estime par ailleurs quelle na pas eu « libre cours à sexprimer avec Mr Badji », considérant que les policiers Belaval et ses collègues ont été dépourvus de toute attitude objective.
Sexprimant sur sa déclaration écrite établie à la demande du CHSCT de lusine Grande-Paroisse : « Ce nest pas moi qui ai tapé ce texte, mais jaurai bien aimé, jaurai mis mes propres mots » affirme-t-elle à la barre.
Alors quil lui ai demandé lors de linterrogatoire des précisions sur lendroit où le chef des pompiers a retrouve le corps dHassan Jandoubi, elle précise quayant peur de se tromper sur lendroit précis, elle a demandé à la PJ daller sur le site pour confirmer lendroit. Aucune suite na été donnée à sa requête
Or, Réjane Boucly le précise : elle ne connaissait pas lusine sur le terrain mais en temps que secrétaire. En vue daméliorer sa perception des lieux pour faciliter sa mission détablissement des factures et de la paie via notamment suivi de pointages horaires, elle a pu visiter lusine par deux fois, et à sa demande.
Sagissant plus particulièrement de lidentification de lintérimaire anonyme, il sagit selon elle dun individu « trapu, cheveux courts, mat yeux noirs, plus petit que Jandoubi ».
Alors quil semble clair que Réjane Boucly a insisté pour pouvoir identifier le personnage auprès de la police, elle précise que si la PJ est certes allée chez la belle sur avec les photos, cette dernière était alors poly-traumatisée, avec un il déficient
. Proposant aux policiers de passer chez elle après avoir rendu visite à sa belle-sur
. Réjane les attend toujours
.
Concernant Hassan Jandoubi dont un chauffeur a fait auparavant un portrait pour le moins édifiant à la barre, la secrétaire précise que travaillant dans la même bureau que Mr Pons, chef d'équipe, ce dernier lui avait signalé aux alentours du 19 septembre des problèmes liés au travail des intérimaires générant des tensions. Réjane Boucly en a certes fait état devant la police, mais cela na pas été entendu
.
Ayant eu des contacts avec Mme Jandoubi dans le cadre de la cellule de crise - passant outre la consigne qui lui avait été faite de ne pas soccuper des intérimaires la secrétaire précise que lépouse du manutentionnaire décédé sur le site lui a demandé sil était possible de récupérer « pour raisons sentimentales » des affaires personnelles de son mari Hassan Jandoubi - un sweet shirt, un sac de sport - dans la voiture de ce dernier, immatriculé en Allemagne.
Troublant tout de même puisque lors de la perquisition faite par la PJ au domicile de Jandoubi, plusieurs jours après le drame, sa veuve avait expliqué qu'elle s'était débarrassée des affaires personnelles de son mari, lesquelles lui rappelaient trop douloureusement la catastrophe
. Ce qui fait dire à certains que lappartement a été « nettoyé », « stérilisé »
Par Elisabeth Studer le 26 avril 2009