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La protection des investisseurs risque de produire les effets contraires à ceux recherchés (Amundi)
information fournie par Boursorama 24/02/2016 à 16:21

Le régulateur européen veut protéger les investisseurs contre les conseils hasardeux. Mais attention : malgré ses bonnes intentions, la régulation pourrait faire plus de mal que de bien.

Le régulateur européen veut protéger les investisseurs contre les conseils hasardeux. Mais attention : malgré ses bonnes intentions, la régulation pourrait faire plus de mal que de bien.

Prenant un peu de recul face à l'actualité toujours mouvementée des marchés, Bernard Agulhon, directeur des affaires réglementaires chez Amundi, signe une tribune dénonçant les excès de la régulation européenne en termes de protection des investisseurs.

L'objectif central du projet de Capital Market Union est celui de la relance du financement de l'économie réelle par le marché financier. Pour être durable, cette substitution partielle au rôle majeur qu'occupent aujourd'hui les banques dans le financement de l'économie européenne doit s'appuyer sur un recours beaucoup plus marqué à l'épargne des ménages.

En effet, cet investissement des ménages peut apporter au marché une stabilité que les institutionnels – surtout étrangers – n'apporteront jamais. Cependant, faire revenir les ménages sur le marché financier constitue un réel défi si l'on en juge par la baisse de la part des ménages dans le capital des sociétés européennes observée depuis plus de dix ans.

Face à ce défi, le thème de la ‘protection des clients' n'a cessé de s'amplifier dans la réglementation européenne, surtout depuis la première directive MIF. Il n'est bien sûr pas question de sous-estimer l'importance de ce sujet. Mais il en va de la protection des épargnants comme de la protection des salariés : de même qu'un droit du travail trop protecteur finit par nuire à l'emploi, de même une règlementation trop contraignante et tatillonne en matière de protection des investisseurs finit par se retourner contre ceux-là mêmes qu'elle entend protéger.

Sans trop schématiser, l'objectif de cette règlementation vise à protéger les clients à l'égard de deux types de risques : d'abord celui qui est propre à l'investissement financier, ensuite celui qui résulterait de la malhonnêteté présumée des acteurs financiers. Cette approche est doublement problématique. S'agissant du risque de marché, focaliser l'épargnant sur ce risque est en soi anxiogène et radicalement opposé à l'objectif poursuivi par la CMU : l'investissement financier a toujours comporté des aléas et le rendement constitue en quelque sorte le ‘salaire de la peur'.

Quant au manque de probité présumé des acteurs, il n'est heureusement pas généralisé même si cette défiance s'appuie sur quelques abus avérés ; pour autant, les investisseurs ont beaucoup plus pâti depuis 15 ans des trois crises successives subies par  les marchés que de ces pratiques relativement isolées. De fait, les bonnes pratiques autant que le respect du client permettent habituellement de l'emporter dans la durée. Une règlementation qui prétend graver de telles pratiques dans des textes de loi ne peut qu'échouer. Deux volets de la réglementation européenne en cours d'élaboration illustrent particulièrement cet écueil :

1. L'encadrement du conseil en investissement

Le premier volet concerne donc le conseil aux clients. Durant des décennies, c'est la notion de placement qui prévalait dans la réglementation : placement de titres et placement de produits financiers. Cette activité s'accompagnait, selon les compétences et l'expérience du prestataire, d'un conseil plus ou moins éclairé. Les meilleurs praticiens s'attiraient les bons clients et étaient capables de former des équipes pour les seconder.

La nouvelle approche issue de la MIF a remplacé la notion de placement par deux alternatives : le conseil ou la réception / transmission d'ordres, et elle s'est mis en peine de définir ce qu'est un bon conseil : il faut « s'assurer que les questions posées seront comprises par le client et permettront de saisir de manière précise les objectifs et besoins du client (Actes délégués de la CE pour MiFID2, Art. 49, 7c).

Ceux qui ont un tant soit peu pratiqué le placement de produits financiers connaissent le degré de précision des objectifs des clients… Au-delà de la recherche du meilleur rendement possible, couplé au moindre risque et à la meilleure fiscalité, les besoins et les objectifs des clients sont souvent assez flous. Tout au plus arrive-t-on à déterminer une durée d'investissement et une préférence pour le revenu ou bien pour la valorisation du capital.

Pour mettre un peu plus à l'aise encore le conseiller, il doit produire une déclaration d'adéquation de son conseil et en remettre une copie à son client.  Enfin, dans le cadre des mandats de gestion de portefeuille, le gérant sera obligé de prouver que ses arbitrages ont apporté de la valeur et que le bénéfice qui en a découlé a été supérieur au coût de l'arbitrage.

Pour compléter le tout, le conseiller devra présenter à son client des scénarios de détérioration du marché et s'assurer que le produit reste compatible avec les besoins et objectifs de son client pendant la durée de son investissement. Au vu des contraintes imposées aux conseillers, le choix risque de se réduire sensiblement dans les années à venir, au bénéfice des robo-advisors et des plateformes de transaction en ligne sur lesquelles le ‘clic' permet de s'accommoder beaucoup plus aisément de telles contraintes réglementaires…

2. L'information des clients

Le second volet de la protection des clients est celui de l'information qui doit être communiquée aux clients avant toute transaction ou investissement, puis pendant toute la durée de cet investissement. L'essentiel de la réglementation concernant cette information se trouve dans la Directive MiFID et, surtout, dans le Règlement PRIIPs (Packaged Retail & Insurance-based Investment Products).

Côté MiFID, en plus des informations relevées ci-dessus, il faudra aussi fournir un reporting détaillé du passage des ordres à l'investisseur, tendant à lui démontrer la best execution . Il faudra alerter immédiatement les clients si la valeur de leur portefeuille vient à baisser de 10%, et il faudra les informer quant aux frais de recherche payés aux brokers dans le cadre de la gestion de leurs mandats de gestion.

Le règlement PRIIPs quant à lui vise à répliquer pour tous les produits d'investissement (assurance vie, produits structurés émis par des banques) un document similaire à celui qui est déjà utilisé pour les OPCVM. Autant ce ‘DICI' (Document d'Informations Clé pour les Investisseurs) conçu il y a cinq ans a montré sa pertinence, autant le projet en cours de finalisation pose-t-il de nombreux problèmes. Alors que le DICI contient une sélection pertinente d'informations, le futur KID (Key Information Document) va ajouter des éléments qui, au mieux, sont superflus.

Par exemple, le règlement PRIIPs obligerait à la production de scénarios de performances futures pour tous les produits, basés sur trois hypothèses, favorable, défavorable ou neutre. Or, l'idée de remplacer la présentation des performances passées par de tels scenarios futurs laisse pour le moins perplexe et l'on se demande sur quelle base sérieuse construire des scénarios de performance future pour des fonds actions ou diversifiés.

En dépit de tout ce dispositif réglementaire très articulé autour du nouveau conseil financier, deux règles de base en la matière ont été complètement perdues de vue alors qu'elle constituaient le socle du conseil financier traditionnel : la nécessité de prendre en compte les fluctuation régulières du marché des actions sur lequel il vaut mieux éviter d'entrer quand il est au plus haut, et le fait que la valeur des fonds obligataires vient à baisser en cas de relèvement des taux. De nombreuses déconvenues s'expliquent par l'oubli de la première règle au cours des 15 dernières années, tandis que la seconde règle pourrait être bonne à garder en tête pour les années à venir…

Bernard Agulhon , directeur des affaires réglementaires chez Amundi

6 commentaires

  • 25 février 18:33

    b.renie - vous etes sur que vous comprenez quoi que ce soit a la finance? Carrefour propose des prets, ce qui est le contraire de l'argent depose par ses clients, c'est elle qui file de l'argent aux clients (de ses exces de liquidite). Si Carrefour fait faillite, les clients remboursent les prets ou pas, mais ils ne perdent rien. Si l'epargne est segregee et non placee sur les marches, les banques doivent gagner de l'argent autrement - donc en chargeant toutes les prestations clients plus cher.


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