Sur le marché à Uvira, en RDC, le 12 décembre 2025 ( AFP / - )
Quelques jours après la signature de l'accord de Washington entre Kinshasa et Kigali, les Etats-Unis ont fustigé vendredi l'implication du Rwanda dans le conflit dans l'est de la RDC où une nouvelle offensive du groupe armé M23 fait craindre à l'ONU un "embrasement régional".
"Au lieu d'une avancée vers la paix, comme nous l'avons vu sous la direction du président Trump ces dernières semaines, le Rwanda mène la région vers plus d'instabilité et vers la guerre", a dénoncé l'ambassadeur américain à l'ONU Mike Waltz lors d'une réunion du Conseil de sécurité.
Alors que la RDC et le Rwanda ont signé le 4 décembre un "accord pour la paix" sous l'égide de Donald Trump, les Etats-Unis "sont profondément inquiets et de plus en plus déçus" de ce regain de violences, a-t-il insisté, dénonçant "l'ampleur et la sophistication" de l'implication du Rwanda dans l'est de la RDC.
"Les forces de défense rwandaises ont fourni un soutien matériel, logistique et en termes d'entraînement et se battent aux côtés du M23 en RDC avec environ 5.000 à 7.000 soldats début décembre, sans compter une possible augmentation" lors de la nouvelle offensive en cours, a-t-il affirmé.
Carte du Sud-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo montrant la progression du M23, allié du Rwanda, au 10 décembre 2025, selon le CTP ( AFP / Nalini LEPETIT-CHELLA )
"Ces derniers mois, le Rwanda a déployé de nombreux missiles sol-air et d'autres armements lourds et sophistiqués dans le Nord et le Sud-Kivu pour aider le M23", et "nous avons des informations crédibles d'une augmentation de l'utilisation de drones explosifs et d'artillerie de la part du M23 et du Rwanda, y compris des frappes au Burundi", a-t-il ajouté.
Après s'être emparé des grandes villes de Goma en janvier et Bukavu en février, le M23, soutenu par le Rwanda, a lancé une nouvelle offensive début décembre dans la province orientale du Sud-Kivu, le long de la frontière burundaise.
Il s'est notamment emparé mercredi de la grande ville d'Uvira, lui permettant de contrôler la frontière terrestre entre la RDC et le Burundi, ce qui vise notamment à priver Kinshasa du soutien militaire de Bujumbura.
Cette nouvelle offensive "a réveillé le spectre d'un embrasement régional aux conséquences incalculables", a alerté le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU Jean-Pierre Lacroix, s'inquiétant d'une "régionalisation de plus en plus marquée" du conflit.
- "Légitime défense" -
"L'implication directe ou indirecte de forces et de groupes armés en provenance de pays voisins ainsi que les mouvements transfrontaliers de populations déplacées et de combattants accroissent considérablement le risque d'un embrasement régional", a-t-il ajouté, craignant par ailleurs la "fragmentation progressive" de la RDC en raison de l'expansion territoriale du M23 et de l'établissement d'administrations parallèles par le mouvement.
Alors que plusieurs Etats membres du Conseil se sont également inquiétés d'une escalade régionale, l'ambassadeur burundais Zéphyrin Maniratanga a souligné que son pays, qui a accusé le Rwanda d'avoir bombardé son territoire, "se réserve le droit de faire usage de la légitime défense".
"Si ces attaques irresponsables devaient se poursuivre, il deviendrait extrêmement difficile d'éviter une escalade directe entre nos deux pays", a-t-il lancé.
Son homologue rwandais Martin Ngoga a assuré que son pays n'avait "pas l'intention" de faire la guerre au Burundi, répétant à l'inverse les accusations de violation du cessez-le-feu par Bujumbura et Kinshasa.
La ministre congolaise des Affaires étrangères Thérèse Kayikwamba Wagner a elle fustigé "le vide d'action" et l'absence de "mesures concrètes" du Conseil de sécurité.
Malgré une résolution adoptée en février réclamant le retrait des troupes rwandaises et un cessez-le-feu, "le constat est implacable, une nouvelle ville est tombée, une administration parallèle s'est consolidée, des milliers de familles supplémentaires ont fui, d'autres ont été tués, violés, terrorisés", a-t-elle lancé, réclamant une nouvelle fois des sanctions contre le Rwanda.
Dans ce contexte, elle a également plaidé pour un mandat "robuste" pour la force de maintien de la paix de l'ONU en RDC (Monusco) alors que le Conseil doit voter sur le renouvellement de la mission à la fin de la semaine prochaine.
L'ambassadeur français Jérôme Bonnafont, en charge du dossier, a indiqué avoir soumis aux Etats membres un projet de résolution permettant de "positionner la Monusco dans un rôle d'accompagnement de tous les efforts de paix", notamment "la surveillance du cessez-le-feu".

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