Le "summum" de l'horreur dans l'entourage d'une "revenante" jugée à Paris ( AFP / Damien MEYER )
Carole Sun, Française jugée pour terrorisme à Paris, se décrit comme une femme "ordinaire" quand le Renseignement intérieur égraine, lui, la violence de ses fréquentations au sein du groupe Etat islamique en zone irako-syrienne avant son rapatriement en juillet 2022.
L'accusée de 30 ans, née en région parisienne, comparaît depuis mardi devant la cour d'assises spéciale. Partie avec son frère pour la Syrie en juillet 2014, elle avait été arrêtée par les forces kurdes en décembre 2017.
"Je me considère comme une femme ordinaire", "banale", à la "vie très mouvementée, très dure", résume l'accusée, maquillée et longs cheveux de jais.
Ses "rêves de grandeur", être avocate, étudier à Sciences Po, etc., volent en éclats en 2009. Elle vient d'avoir 14 ans quand trois jeunes de son quartier la violent. Suivent une fugue, un proxénète qui la prostitue, le repli sur elle et le décrochage scolaire.
L'accusée date à 2012 les débuts de sa radicalisation, qui se fait en ligne. Des éléments scientifiques du Coran sur les embryons résonnent en elle, peu après une IVG, dit-elle. Pour l'adolescente d'origine vietnamo-chinoise, l'islam radical apparaît comme une purification d'évènements traumatiques, dont l'absence de son père biologique.
Elle multiplie les relations avec des hommes, dont Nassim Tache. C'est là, selon des enquêteurs de la DGSI entendus par la cour, le premier marqueur de sa "dérive radicale". Ce dernier, condamné par la suite entre autres pour ses liens avec une filière de recrutement, compte en effet parmi ses proches le prédicateur Abdelhakim Sefrioui, qui sera rejugé après avoir été condamné en première instance pour son rôle dans l'assassinat de Samuel Paty.
La lycéenne ne finalisera pas son bac. Elle part juste avant, cinq jours après la proclamation du "califat" transfrontalier par l'EI.
Les femmes représenteront un tiers des quelque 1.500 Français partis sur zone, les convertis 23%, selon la DGSI.
- "tellement facile" -
En Syrie, Carole Sun retrouve un homme rencontré récemment en ligne. "Le plan émotionnel prenait le pas sur tout", dit-elle mercredi. Dès son arrivée, il lui tend un papier. Leur mariage religieux est scellé.
Un enquêteur de la DGSI estime que la jeune majeure ne pouvait ignorer dans quoi elle s'engageait et elle évoluera dans un "environnement très combattant, cruel, criminel".
Le président souligne ses contacts avec des "personnages charismatiques" aux "profils lourds".
Il y a d'abord Salaheddine Guitone, son premier mari: un Français décrit comme un propagandiste "sanguinaire" par un enquêteur de la DGSI. Il évolue avec Chaquir Maaroufi dans la katiba al-Battar, une brigade islamiste de combattants étrangers qui représente "le summum de ce qu'a pu être l'horreur" et a constitué "un vivier pour des cellules de préparation d'opérations extérieures", comptant dans ses rangs des assaillants du 13-Novembre. Il meurt au combat quelques jours après son union religieuse avec Carole Sun.
Puis il y a son frère Charly Sun, d'un an son aîné. Il est membre de la police islamique chargée de la sécurité de la ville, selon un document retrouvé sur zone.
Quand l'accusée évoque pendant l'enquête des "rondes" et des "confiscations de cigarettes" réalisées par son frère, la DGSI énumère les décapitations et passages à tabac de son unité d'environ sept Français menée par Salim Benghalem.
Enfin, son second mari épousé en janvier 2015, un Palestinien originaire de Gaza. Il est membre de l'Amni, la branche de l'EI chargée notamment de la sécurité intérieure et du renseignement.
Carole Sun sera arrêtée fin 2017 par les forces kurdes alors qu'elle se trouve dans un convoi, au même titre qu'Emilie König, entre autres jihadistes françaises connues. L'accusée dit avoir tenté de fuir l'organisation.
Il ne s'agissait pas d'une reddition mais d'une tentative de l'EI de "relocaliser" des membres dans des "poches un peu partout sur le territoire", avance mercredi un agent de la DGSI.
Dans le boxe, l'accusée assure qu'elle ne savait pas quelle organisation elle rejoignait. "C'était tellement facile de partir", lâche-t-elle en pleurs, qu'on ne s'est...". "Pas poser de question", termine pour elle le président.
Quand l'avocate générale pointe une série de contradictions, un ton de défiance remplace les larmes.
L'accusée doit être entendue sur ces faits jeudi, dernier jour du procès.

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