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Fin de l'accord sur les céréales d'Ukraine : quelles conséquences après la suspension du corridor maritime ?
information fournie par Boursorama avec Media Services 18/07/2023 à 12:10

La suspension du corridor maritime céréalier, qui a permis de sortir 33 millions de tonnes de grains d'Ukraine en un an, devrait n'avoir que peu d'impact dans l'immédiat, à l'heure où l'hémisphère nord moissonne, mais créera inévitablement tensions et inflation alimentaire à moyen terme.

(illustration) ( AFP / OLEKSANDR GIMANOV )

(illustration) ( AFP / OLEKSANDR GIMANOV )

Faible impact immédiat

La situation est très différente de celle de fin février 2022, quand la Russie a envahi l'Ukraine, avec pour effet la fermeture à la navigation de la mer Noire, principale voie d'exportation des produits agricoles de l'Ukraine.

Ce pays était alors le premier exportateur mondial d'huile de tournesol, le quatrième pour le blé et le maïs.

L'ouverture du corridor le 1er août 2022 a permis de soulager les pays importateurs, notamment en Méditerranée et en Afrique, faisant refluer les prix mondiaux qui avaient atteint en mai des niveaux inédits.

En deux ans, l'Ukraine a vu sa production de céréales diminuer pratiquement de moitié, avec des prévisions de 25 millions de tonnes de maïs et 17,5 millions de tonnes de blé pour 2023-24, contre respectivement 42 MT et 33 MT en 2021-22, selon le dernier rapport du ministère américain de l'Agriculture.

"En 2023-24, elle devrait exporter 6 millions de tonnes de blé et 10 millions de tonnes de maïs en moins, par rapport à la campagne précédente", relève Gautier Le Molgat, analyste au cabinet Agritel.

La situation est donc moins tendue, car il y a moins de produits à exporter et parce que l'hémisphère nord est en pleine période de récolte. "Les besoins à venir se préciseront en fin de moisson. C'est une période calme sur les marchés, qui ont d'ailleurs très peu réagi à la suspension de l'accord", le cours du blé augmentant de moins d'1% sur Euronext, précise Gautier Le Molgat.

En outre, ces derniers mois, "on observait un goulet d'étranglement dans le Bosphore, avec un trafic très ralenti", notamment du fait d'un plus faible nombre d'inspections russes sur les navires empruntant le corridor, relève Edward de Saint-Denis, courtier chez Plantureux & Associés.

Les limites de l'alternative terrestre

Avant même l'ouverture du corridor, l'Union européenne a mis en place les "Solidarity Lanes", des corridors terrestres et fluviaux, destinés à faciliter les exportations ukrainiennes à travers l'Europe.

La Fondation Farm, think tank dédié aux questions agricoles mondiales, estime qu'actuellement la moitié des exportations ukrainiennes passent par ces voies, notamment à travers la Pologne et la Roumanie.

"Une des questions qui se pose est de savoir si l'UE, qui a récupéré 50% de l'offre céréalière ukrainienne depuis le début du conflit, a les capacités de réexporter ces volumes", note Olia Tayeb Cherif, responsable d'études chez Farm.

L'UE voudrait améliorer l'offre terrestre, notamment avec un projet d'harmonisation du gabarit ferroviaire (écartement des rails) aux frontières entre UE et Ukraine, mais cela prendra du temps. "On pourra augmenter un peu la cadence, mais on ne règlera pas le problème pour les volumes en jeu", estime Edward de Saint-Denis.

Des inquiétudes à moyen terme

A l'heure actuelle, le monde ne manque pas de blé. Mais, souligne Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage, "l'essentiel du blé exportable est en Russie, avec environ 12,5 millions de tonnes de stocks, et c'est le blé le moins cher du monde".

La Russie pourrait pallier au moins une partie du manque ukrainien, tout comme l'UE, avec une récolte qui s'annonce très correcte. Mais cela accélérerait la dépendance des pays tiers vis-à-vis de Moscou et serait difficile à gérer en cas d'accident climatique majeur.

Il faut bien différencier maïs et blé. La Chine, qui est de loin le premier bénéficiaire du corridor maritime pour le maïs, pourra se tourner vers le Brésil, qui vend actuellement moins cher et dont la récolte a été record.

La situation est plus complexe pour le blé, céréale du pain. Si les volumes existent, les pays demandeurs pourront être fournis, mais à quel prix? "Une fermeture durable du corridor aura un impact sur l'inflation alimentaire, qui jouera sur la sécurité alimentaire", souligne Olia Tayeb Cherif, de Farm.

Déjà, des Etats, comme l'Egypte récemment, ont du mal à honorer les paiements de certains appels d'offres. Par ailleurs, l'aide alimentaire elle-même pourrait être fragilisée, car "l'Ukraine est fournisseur du Programme alimentaire mondial: environ 8% des volumes de blé ukrainien exportés sont allés au PAM, à destination de pays comme le Yemen, l'Afghanistan et la Corne de l'Afrique", souligne-t-elle.

2 commentaires

  • 18 juillet 18:32

    mais la turquie fait payer le passage, c'est pour cela qu'erdogan favorise l'accord céréalier ... il a besoin de recettes vu l'état de son pays ! il ne bloquera jamais les navires ! et le plus gros exportateur de blé est la russie.... ils ne pourront pas refuser longtemps !


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