Edmund Kemper, Ted Bundy, Jeffrey Dahmer... L’exposition aux Galeries Montparnasse promettait une immersion dans l’univers des criminels les plus redoutés de l’histoire. En réalité, le visiteur est noyé sous une pluie d’informations sordides et une mise en scène confuse.
Les tueurs en série, faut-il s’en féliciter, n’ont jamais été aussi populaires. Entre Dahmer , Mindhunter, Dexter ou encore You , les plateformes de streaming regorgent de séries retraçant le parcours de ces criminels terrifiants. L’exposition Serial Killer , produite par la société italienne Italmostre, profite de notre curiosité malsaine. Mais derrière l’effet d’annonce, la visite, déconseillée aux enfants de moins de 14 ans, se transforme rapidement en une accumulation lassante d’informations plutôt qu’une expérience immersive.
Dès l’entrée, le ton est donné avec l’exposition de la célèbre Coccinelle de Ted Bundy, véhicule Volkswagen dans lequel le tueur en série enlevait ses victimes. Certains visiteurs s’arrêtent, fascinés, comme s’ils se trouvaient devant une relique. Pour un peu, ils la caresseraient. Dans l’une des salles suivantes, une petite pièce reconstitue l’une des scènes de crimes de Jack l’Éventreur : le corps nu d’une de ses victimes, est allongé sur un lit, le visage et une partie du corps tailladé. Sans la moindre hésitation, un visiteur immortalise la scène sous tous les angles, jusqu’au gros plan sur le visage. Plus sordide tu meurs...
À première vue, on pourrait croire que des moyens considérables ont été investis pour satisfaire une fascination morbide, justifiant le prix de l’entrée qui oscille entre 23 et 27 euros pour un adulte suivant l’heure et le jour. D’une salle à l’autre, les portraits des tueurs s’enchaînent : Ed Gein, John Wayne Gacy, Edmund Kemper, Leonarda Cianciulli... Autant de patronymes qui évoquent l’horreur.
Dans certaines salles, des objets ayant appartenu aux tueurs sont exposés, mais une question persiste : s’agit-il de véritables pièces à conviction ou de simples répliques ? Certains cartels précisent la nature de ses artefacts diaboliques, mais d’autres restent mystérieusement vagues, laissant place à des doutes qu’on préférerait ne pas nourrir.
Pour les tueurs qui ne sont pas encore devenus les «héros » des productions Netflix, leur présentation se limite trop souvent à de grands panneaux explicatifs : « victimes » , « condamné pour » , « méthode de mise à mort » , « période de crimes » , « statut actuel », etc. Une galerie de carnaval pour un soir d’Halloween. Rapidement, la visite se transforme en une lecture fastidieuse plutôt qu’en expérience immersive. Et cette ambiance sonore façon thriller n’y change rien.
Un déséquilibre dans le choix des figures mises en avant
Dans cet excès d’informations macabres, on se noie. On découvre beaucoup de lettres, des bijoux, des lunettes ou des montres, sans lien évident avec les crimes évoqués. À cela s’ajoute un déséquilibre flagrant dans le choix des figures mises en avant : l’exposition se focalise principalement sur les criminels américains, reléguant les tueurs français (Émile Louis, François Vérove) à une petite pièce en fin de parcours. Bien étrangement, Jacques Mesrine en a également les honneurs, rangé à son corps défendant si l’on peut dire, parmi les serial killers.
Un espace interactif, avec des quizz sur les tueurs en série et une scène de crime en réalité virtuelle, tente de relancer l’intérêt de cette exposition. En vain. Au terme de la visite de ce Disneyland de crime, une salle entière est dédiée à la médecine légale, abordant des notions aussi variées que la balistique, la toxicologie, l’anthropologie ou encore la graphologie. Un contenu intéressant mais présenté, une fois encore (mais que fait la police ?), sous forme d’un catalogue. « On est attentif au début, et puis on perd le fil », déclare un groupe de visiteurs. « C’était long » , résume un autre. Oui, une bien longue agonie...
Mais le crime paie parfois. Ainsi retrouve-t-on le visage antipathique de Jeffrey Dahmer sur un mug en céramique à la boutique. Lors de la première semaine de l’exposition, des livres du Français Nicolas Claux, condamné en 1996 pour meurtre et auteur d’actes de cannibalisme, étaient également en vente dans la boutique. Ce dernier s’est affiché fièrement sur les réseaux sociaux à l’intérieur de l’exposition. Écœuré, cette fois pour de vrai, par cette provocation, le public s’est plaint à la société Italmostre, qui a retiré ces ouvrages de la vente.
Jusqu’au 11 mai, à la Galerie du Montparnasse - 22 Rue du Départ, Paris 15. Du mercredi au dimanche, prévoir entre 90 et 120 minutes, à partir de 14 ans. 27 euros (23 euros en tarif réduit).
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