Le couple franco-allemand et l'emploi : deux des priorités du président Macron

information fournie par Boursorama •08/05/2017 à 17:45

Un des premiers chantiers qui attend Emmanuel Macron : convaincre l’Allemagne des bienfaits d'une politique budgétaire plus souple. (crédit : gouvernement français)

Et maintenant, que faire ? Il est peu probable qu’Emmanuel Macron bénéficiera d’un état de grâce. L’élection présidentielle peut se lire de deux façons. La façon positive montre une France ouverte, attachée à l’Europe et à l’euro, urbaine intégrée et hostile aux thèses extrémistes.

Le vote Front National a dépassé les 10 millions de voix au second tour de l'élection présidentielle. (crédit : Idix)

L’autre, à l'inverse, laisse deviner un population divisé, où l’extrême droite a obtenu plus de voix que jamais et où l’abstention a atteint un niveau record depuis 1969. Où une population plus rurale, plus populaire se sent laissée à l’abandon et pénalisée par des réformes qui rognent sur la générosité des droits du travail, des régimes de santé et de retraite.

L'économie va mieux

Ce matin dans une note intitulée « inégalité, inégalité, inégalité » en référence à la devise française, Paul Donovan d’UBS adressait un avertissement : «Au vu du résultat des récentes élections, les investisseurs pourraient être tentés de croire que c’en est fini des politiques extrémistes. Ce serait commettre une erreur.» Et de dire que les causes menant aux inégalités sont toujours présentes et qu’elles continueraient à alimenter les mouvements populistes. Pour le plus jeune président de la Ve République, il faut donc aller vite et engager les réformes qui vont accélérer le redressement du pays.

Ce redressement justement est déjà entamé même si le phémonène n'est pas forcément perceptible par les Français. La plupart des observateurs, qu’ils soient gérants, analystes ou économistes le disent : l’économie française va mieux.

Le moral des investisseurs en Europe a atteint un plus-haut depuis 10 ans. (crédit : Idix)

Les indicateurs sont solides et bien orientés et, côté microéconomique, les entreprises ont adopté un ton optimiste pour 2017, tout en dévoilant de bons résultats au premier trimestre.

Un avion pour Berlin

Par quel bout commencer pour le nouveau président français ? Pour Bruno Colmant, chef de la recherche macroéconomique de Degroof Petercam la réponse est claire : «L’urgence, c’est de prendre un avion et d’aller à Berlin. Emmanuel Macron doit entamer un nouveau dialogue franco-allemand et convaincre Angela Merkel que plus de souplesse budgétaire est nécessaire si on veut enrayer l’essor des mouvements populistes.»

L’économiste ne croit guère à la possibilité de créer un ministre de l’Economie et des Finances européen mais pense néanmoins que le président français peut obtenir des résultats tangibles en négociant avec les Allemands.

Alexandre Neuvy, directeur gestion privée chez Amplegest ne dit pas autre chose : « Si demain, la France est prête à faire des concessions à Bruxelles et à faire les réformes qui lui sont demandées depuis longtemps, elle sera aussi à même d’avancer avec l’Allemagne main dans la main et de reconstruire un axe franco-allemand très fort »

Côté allemand aussi, on sent que le moment est historique. «Nous savons que l'Allemagne et la France sont liées par un destin commun. (…) Nous coordonnons nos approches et avançons, partout où cela est possible, d'un pas commun pour le bien de nos deux pays mais aussi pour le bien de l'Europe et c'est exactement l'esprit que j'espère et qui sera présent, je le crois, dans le travail en commun», a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel au lendemain de l’élection française.

La réforme du travail par ordonnance

En plus de remettre en marche la machine franco-allemande, la réforme du travail s’annonce comme un autre gros morceau pour le nouveau président. Philippe Martinez, secrétaire général de la CTG, la qualifiait récemment de risque de «conflit social majeur» (extrait vidéo).

Pour Bruno Colmant, «il y a clairement un risque que cette réforme mécontente la classe ouvrière mais il faut aussi dire qu’aujourd’hui, l’industrie ne représente que 12% du PIB de la France. Et le code du travail est perçu comme très coercitif. S’il est facile d’embaucher, il est en revanche très difficile de licencier. Sa flexibilisation progressive va dans le bon sens. Je crois que cette réforme pourrait d’ailleurs signer la fin d’un chapitre du code du travail en France. C’est le projet d’un homme de 40 ans qui a compris la versatilité d’un parcours professionnel à l’heure actuelle et qui pourrait offrir de vraies opportunités à la classe urbaine. »

Pour faire accepter cette réforme, Emmanuel Macron est prêt à légiférer par ordonnance. Un procédé qui se veut rapide et efficace mais qui suscite déjà de nombreuses critiques, dont celles du directeur de l’OFCE Xavier Thimbeau, récemment invité sur le plateau d’Ecorama : «Il faut réformer le code du travail mais il faut batir un consensus entre les entreprises, les salariés, les syndicats et les différentes parties prenantes et cela ne passe pas par ordonnance (…).»

La rentrée sociale pourrait donc commencer très tôt et être très agitée cette année. «La route est droite mais la pente est forte», disait en son temps Jean-Pierre Raffarin. Il est probable qu’Emmanuel Macron en fasse vite l’expérience...

Laurent Grassin (redaction@boursorama.fr) ;