La cheffe du gouvernement a ainsi officialisé la construction d'un nouveau terminal méthanier flottant au Havre. Cette infrastructure vise à augmenter les capacités d'importation de GNL, acheminé par bateau depuis la vingtaine de pays dans le monde qui en exportent. A l'arrivée, le GNL est regazéifié pour être injecté dans le réseau de transport de gaz national ou il peut être transporté par camion-citerne vers des sites industriels.
Ce terminal flottant viendra s'ajouter aux quatre terminaux terrestres d'importation de GNL que compte déjà l'Hexagone : un à Dunkerque, un autre à Montoir-de-Bretagne et deux à Fos-sur-mer. L'avantage d'une infrastructure flottante réside dans le temps et les coûts de construction, significativement moins importants. Elle peut aussi être repositionnée en fonction des besoins.
Le gouvernement s'est ainsi fixé pour objectif de débuter les travaux à l'automne 2022 pour raccorder ce terminal flottant au réseau dès 2023. Des "dispositions législatives" vont être prises "pour le financer et l'installer", indique-t-on dans l'entourage d'Elisabeth Borne.
"Il couvrira 10% de la consommation française de gaz", précise encore Matignon.
Une solidarité européenne variable
Encore faut-il que l'Hexagone puisse importer suffisamment de GNL. Ce qui n'est pas une certitude à l'heure où le marché mondial est particulièrement tendu et où les prix flambent. "Aujourd'hui, tous nos terminaux méthaniers sont réservés à plein sur le long terme", rassure Matignon. Dans le cas d'une pénurie mondiale de GNL, qui conduirait à un manque de gaz, le pays "a des marges de manœuvres", rassure-t-on encore.
Toutefois, si une telle situation arrivait, la France ne pourrait pas jouer à plein le jeu de la solidarité européenne, alors que certains pays membres sont bien plus exposés au tarissement du gaz russe et bien moins équipés en terminaux GNL, comme l'Allemagne, qui n'en compte aucun pour le moment.
"Si nous n'avons pas suffisamment de gaz qui entre dans nos terminaux méthaniers, cela fera baisser la pression [dans le réseau de transport gazier du pays, ndlr]. Il faudra alors réduire notre capacité d'export vers les autres pays pour maintenir la pression en France. Il y aura un minimum de solidarité, mais l'intensité de l'envoi de gaz vers l'Est [notamment vers l'Allemagne, la Belgique, l'Italie et la Suisse ndlr] va dépendre du niveau des importations de GNL", détaille-t-on au ministère de la Transition énergétique.
Remplir les cuves de stockage à 100%
Le second dispositif d'urgence consiste à pousser les niveaux de stockage de gaz à 100% d'ici la fin de l'été, contre 58% actuellement. Le gouvernement entend donc aller au-delà de l'obligation prévue par la loi française, qui prévoit que les fournisseurs remplissent leurs réserves à au moins 85% de leurs capacités au 1er novembre. A l'échelle européenne, le minimum requis à la même période est de 80%.
Concrètement, cela signifie que l'Etat va mettre en place un mécanisme de garantie publique pour encourager GRTGaz et Terega, les deux gestionnaires de réseau de transport de gaz naturel en France, à acheter eux-mêmes le gaz supplémentaire permettant de remplir les cuves à 100%. "15% de stockage supplémentaire c'est beaucoup d'argent", justifie-t-on à Matignon.
Des économies d'énergie partout
En parallèle de ces deux mesures, le gouvernement prévoit de mettre sur pied trois groupes de travail autour des économies d'énergie. L'un concernera l'administration, l'autre les entreprises et le dernier les établissements recevant du public.
L'idée est d'amener les filières et les acteurs économiques à construire des plans d'actions concrets et chiffrés d'économies d'énergie avec le volume de térawattheures gagnés en face de chaque levier d'action.
"L'objectif est de réduire la consommation d'énergie de 10 % en deux ans ", a annoncé Agnès Pannier-Runacher, la ministre en charge de la Transition énergétique
En revanche, aucune campagne de communication sur la sobriété énergétique auprès du grand public n'est prévue pour le moment, contrairement à ce qui se fait chez certains de nos voisins. "Inciter les gens à baisser la température pendant l'été, ce n'est pas le bon moment", estime le gouvernement, qui envisage plutôt un tel dispositif cet hiver.
Le charbon à la rescousse
Le gouvernement se garde également la possibilité de faire fonctionner "quelques heures de plus" la centrale à charbon Emile Huchet, en Moselle, dont les portes ont officiellement fermé le 31 mars dernier.
"Ce dispositif reste activable, mais il ne s'agit pas d'une relance du charbon, sous aucune forme", insiste-t-on au ministère de la Transition énergétique, alors qu'Emmanuel Macron s'était engagé à fermer toutes les centrales à charbon de l'Hexagone avant la fin de son premier mandat.